Législatives 2022. Cinq députés RN en Aquitaine : les ingrédients d'une percée annoncée

Contexte politique favorable, absence de barrage républicain, territoires délaissés... En Aquitaine, les facteurs favorables à l'élection de cinq députés du Rassemblement national sont multiples.

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Ils sont au nombre de cinq, ils sont membres du Rassemblement national et tous ont été élus députés ce dimanche 19 juin en Aquitaine. 

Edwige Diaz et Grégoire de Fournas ont remporté respectivement la 11e et 5e circonscription de Gironde. En Lot-et-Garonne,  Annick Cousin s'impose dans la 3e circonscription, celle de Villeneuve-sur-Lot et de Fumel.
Hélène Laporte, elle, a remporté une triangulaire dans la circonscription de Marmande. Et en Dordogne, c'est Serge Muller qui représentera le Bergeracois à l'Assemblée nationale.

Ces élections constituent une première pour l'extrême-droite depuis 1986 et l'élection du député Front national Pierre Sirgue, en Gironde, à la proportionnelle.

Des profils variés

En trente-six ans, les choses ont beaucoup changé. Le Front national, devenu Rassemblement national, présente désormais des candidats aguerris, habitués aux défis électoraux et aux campagne locales. Le résultat d'une stratégie élaborée et réfléchie. "Quand vous réussissez à placer cinq députés sur 28, ce n'est plus une aventure individuelle. Cela devient un récit collectif", confirme le politologue Jean Petaux qui distingue pourtant des profils différents parmi les candidats.

"Edwige Diaz, Grégoire de Fournas et Annick Cousin sont des militants de terrain. Ils ont labouré le terrain de manière très professionnelle, très systématique, puis ont multiplié des candidatures aux élections". Municipales, départementales, régionales... Ces candidatures leur ont permis d'acquérir une véritable visibilité, et une stature. "Pour Hélène Laporte, qui est députée européenne, c'est différent", estime Jean Petaux :

C'est un secret de Polichinelle : Hélène Laporte n'avait pas particulièrement envie de se lancer dans cette bataille des législatives. Son statut de parlementaire européenne lui convenait parfaitement, et elle n'y est allée que parce qu'elle y a été poussée par l'état major au niveau national.

Jean Petaux, politologue

Source : France 3 Aquitaine

Contexte favorable

Une frilosité qui expliquerait donc la  campagne de la députée du Marmandais, "pas particulièrement dynamique, ni destinée à renverser la table". Cette dernière a pourtant ravi un siège à l'Assemblée nationale, en battant le député sortant Alexandre Frechi (LaREM) et le candidat de la Nupes Christophe Courrègelongue dans une triangulaire.
En dépit des sollicitations de son parti entre les deux tours, Alexandre Freschi avait refusé de se retirer pour faire barrage au Rassemblement national. 
Hélène Laporte a aussi bénéficié d'une "mini vague RN", estime Jean Petaux. "On est loin de la vague rose de 1981 ou de celle LaREM de 2017, mais il y a bien, au plan national une vague du Rassemblement national", poursuit-il, alors que le parti de Marine Le Pen a porté 89 députés au palais Bourbon. 

Erreur de casting

Dans la 5e circonscription de la Gironde, le Médocain Grégoire de Fournas, viticulteur et fin connaisseur de son territoire, a également bénéficié d'un contexte favorable. Le député sortant, Benoît Simian, élu en 2017 sous l'étiquette LaREM mais non réinvesti pour ce scrutin, a été largement battu dès le premier tour.
Face au RN, c'est un candidat LFI - Nupes Olivier Maneiro qui s'est qualifié pour le second tour. La socialiste Pascale Got, députée de cette même circonscription entre 2012 et 2017, s'était portée candidate dans un premier temps, avant que ne soit scellé l'accord sur l'union des gauches. "LFI a privilégié un de ses candidats, c'est une erreur stratégique, avance Jean Petaux. Sans doute que Pascale Got aurait pu renverser la tendance".

Absence de consigne de vote

D'autant plus que la candidate Horizons-Ensemble, Karine Nouette-Gaulain, elle aussi battue dès le premier tour, s'était refusée à donner une consigne de vote. "A titre personnel, au vu du choix proposé dans le Médoc, je voterai blanc", avait-elle annoncé sur Twitter. Là aussi, ces mots ont leur importance alors que 3 200 voix séparent Grégoire de Fournas et Olivier Maneiro. "Au vu de cet écart, si Karine Nouette-Gaulain avait donné des consignes anti RN, elle aurait pu mobiliser quelques électeurs sur Olivier Maneiro".
Une consigne, qui, selon le politologue n'aurait, à l'inverse, eu aucun effet dans la 3e circonscription du Lot-et-Garonne, où le député sortant et battu au premier tour Olivier Damaizin s'est également abstenu. L'écart de voix entre Annick Cousin, (RN) et Xavier Czapla (Nupes - LFI) étant trop important. 

"Recycler" la colère des Gilets jaunes

Au delà des contextes politiques propres à chaque circonscription, le Rassemblement national prospère avant tout dans des territoires ruraux et populaires .  "Depuis trente ans, le Lot-et-Garonne a toujours donné des scores important au Rassemblement national", rappelle  Ludovic Renard, politologue à Sciences Po. En 2002 déjà, le département avait voté majoritairement pour Jean-Marie Le Pen au premier tour de l'élection présidentielle. 


Marmande et ses ronds-points, situés en plein cœur du couloir de la pauvreté en Aquitaine, ont par ailleurs constitué des places fortes du mouvement des Gilets jaunes. Ici, la hausse du prix de l'essence, dans un territoire où la voiture est indispensable, ou encore le délabrement des services publics ont laissé des traces : "Nombre de leurs sympathisants se sont donnés rendez-vous pour éliminer Emmanuel Macron, poursuit Ludovic Renard. 

Or, la gauche radicale, qui ne défend pas certaines traditions comme la chasse ou la pêche ne correspondait pas aux aspirations de la ruralité.

Ludovic Renard, politologue Sciences Po Bordeaux

Source : France 3 Aquitaine

Des valeurs, a contrario, largement soutenues par le parti de Marine Le Pen. 

"Certes, le Rassemblement national a su recycler la colère des Gilets jaunes, reconnaît de son côté Jean Petaux. Et c'est le jeu de la démocratie : quand elle fonctionne, elle transforme et intègre les colères en message politiques. Il n'y a rien de plus dangereux que des oppositions qui ne trouvent pas de traduction dans le message politique". 

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