Le combat pour le nom des couteaux Laguiole continue, la justice autorise la vente de produits dérivés en Autriche, en Italie et au Maroc

Un récent arrêt de la Cour de cassation opère un revirement, remettant en cause la protection de la marque Laguiole obtenue par la commune en 2019. Les juges estiment que la juridiction française n'était pas compétente sur plusieurs marchés étrangers.

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Et c'est reparti pour un tour... Au terme de l'arrêt de la Cour de cassation rendu la semaine dernière, la commune de Laguiole se voit dépossédée d'une partie de la protection de la marque, obtenue de haute lutte dans les dernières années.

Arrêt de la Cour de cassation by France 3 Tarn

Juridiction incompétente

Les juges ont estimé que la juridiction française n'était pas compétente à régler un litige de propriété industrielle sur certains territoires étrangers. Le fondateur de la "marque Laguiole", l'homme d'affaires Gilbert Szajner, retrouve donc la possibilité de vendre ses produits dérivés en Autriche, en Italie et au Maroc. 

Une belle histoire, un long roman judiciaire

Fruit d'un savoir-faire ancestral de l'Aveyron puis dans le Puy-de-Dôme, le couteau Laguiole a fait l'objet d'une marque déposée en 1993 devant l'Institut National de la Propriété Industrielle (INPI), par l'homme d'affaires Gilbert Szajner. 

Un dépôt contesté en justice depuis plus de 30 ans. D'abord par le Tribunal de Grande Instance de Paris en 1997, qui condamne l'industriel pour contrefaçon. Mais le jugement est infirmé en 1999, la Cour d'Appel considère que le "Laguiole" est devenu un nom générique. 

En 2012, la commune de Laguiole s'en mêle, s'estimant atteinte dans sa renommée, et privée d'un potentiel de développement économique. Les habitants révoltés débaptisent leur village pour dénoncer la "privatisation de son nom". Mais la municipalité n'obtient pas non plus gain de cause, le jugement qui lui est défavorable est validé deux ans plus tard par la Cour d'Appel de Paris. 

2014 : La protection obtenue par la loi

Pour les habitants de Laguiole, le salut arrive en 2014 : la loi Hamon du 17 mars crée en France les "indications géographiques" (IG), qui protègent les produits industriels et artisanaux. Le texte permet aux collectivités de s'opposer aux dépôts de marques qui porteraient atteinte à leur nom.

À voir aussi : Le patrimoine de Laguiole : des couteaux et un nom dérobé

C'est le point de départ de plusieurs victoires judiciaires pour la commune de Laguiole : le dernier jugement de 2014, favorable à Gilbert Szajner, est cassé en 2016. L'année suivante, la Cour de Justice de l'Union européenne annule le dépôt de la marque Laguiole pour les couteaux. Puis en 2019, L'homme d'affaires perd l'usage de plusieurs des marques "Laguiole" appliquées à d'autres produits, tels que stylos, montres, vêtements ou encore linge de maison. La Cour d'Appel de Paris juge qu'il a "porté atteinte aux activités de la commune".

C'est cette dernière interdiction qui est donc remise en cause par la Cour de Cassation, en Autriche, Italie et Maroc. Les juges estiment que la juridiction française n'est pas compétente sur ces territoires, et que chaque pays doit faire l'objet d'un recours différent. 

À Laguiole, on reste serein

Pas de quoi inquiéter néanmoins le maire de Laguiole Vincent Alezard. Même si la commune a été condamnée à verser trois mille euros à Gilbert Szajner et sa femme, selon lui ça ne remet pas en cause la récupération d'une quarantaine de marques déjà obtenue lors des procédures précédentes.

À lire aussi : Couteau Laguiole : pourquoi ils ne seront plus fabriqués à Thiers, dans le Puy-de-Dôme

D'autant que dans l'autre joute judiciaire, celle qui l'oppose à la ville de Thiers, Laguiole a remporté  il y a deux mois une bataille décisive : selon la Cour d'Appel d'Aix en Provence, l'indication géographique offre bien aux fabricants aveyronnais l'exclusivité de la production des célèbres couteaux, au détriment des couteliers du bassin thiernois où l'activité est également implantée. 

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