Un décret paru fin juin souligne que la canicule fait désormais partie des intempéries reconnues en France comme motif du chômage technique pour les ouvriers du bâtiment. On vous explique.
Victoire pour les organisations syndicales du BTP : elles viennent d’obtenir l’ajout de la canicule aux motifs de chômage technique pour les salariés qui travaillent sur des chantiers en extérieur. Le droit du travail est modifié depuis le 28 juin dernier, date de parution d’un décret gouvernemental mentionnant la canicule en plus de la neige, du gel et des vents forts dans la liste des intempéries reconnues en France comme motif de ce "chômage technique" pour les ouvriers du bâtiment.
"Cela fait au moins dix ans que nous travaillons sur ce sujet, c'est vraiment une satisfaction d'obtenir ce décret", se félicite Patrick Blanchard, secrétaire national à la CFDT Construction et bois, joint en début d’après-midi par téléphone.
Indemnisations
Les entreprises du BTP ont interdiction de faire travailler leurs salariés en cas d’alerte orange ou rouge à la canicule annoncée par Météo France ou d’une alerte fortes chaleurs émise par la préfecture. Les salariés reçoivent une indemnisation à partir de deux jours chômés. L'indemnisation est versée par une "caisse nationale de surcompensation" abondée par des "cotisations intempéries" versées par les entreprises du BTP. Cette caisse avait été créée après la Seconde Guerre mondiale, lorsque le secteur avait besoin de recruter massivement pour réaliser de nombreuses reconstructions. Il s’agit d’un régime particulier réservé aux salariés du BTP.
"Cet ajout du motif de la canicule est vraiment une satisfaction, il ne faut pas oublier que de nos jours en France, il y a encore des morts sur les chantiers", rappelle Patrick Blanchard, de la CFDT. Uniquement dans le secteur du BTP, l’Assurance maladie a en effet répertorié 126 décès survenus en 2021 et 168 accidents mortels en 2022. À Labège, près de Toulouse, un homme est décédé le 4 mars dernier alors qu'il travaillait sur le chantier Tisséo du prolongement de la ligne B du métro toulousain.
"Facteur aggravant"
"Les causes sont rarement connues, on sait que les fortes chaleurs sont un facteur aggravant des accidents sur les chantiers. Souvent les chutes sont liées à des évanouissements, ou à un manque de vigilance à cause de la chaleur ambiante. De même, une déshydratation peut entraîner une perte de contrôle d’un engin, ce qui peut s’avérer dangereux pour les autres salariés présents", explique Patrick Blanchard.
Mais pour le syndicaliste, la parution de ce décret n'est qu'un "premier pas". Il souligne que l’indemnisation n’intervient que dans le cas d’épisodes caniculaires de plusieurs jours, et que les salariés ne sont indemnisés qu’à partir du deuxième jour d’arrêt forcé de travail. La CFDT entend continuer à négocier avec les organisations patronales afin de faire évoluer ces points. "Nous souhaitons également négocier pour la mise en place d’aménagement d’horaires automatiques en cas de fortes chaleurs", ajoute Patrick Blanchard.
Selon lui, durant des années, les organisations patronales ont été réticentes à la reconnaissance de la canicule comme motif valable, craignant de devoir cotiser davantage d’argent auprès de la caisse nationale de surcompensation du secteur. Mais d’après la CFDT, il ne sera pas nécessaire de cotiser plus, puisque les arrêts de travail en hiver, pour cause de tempête de neige ou de gel, sont moins fréquents qu’auparavant, conséquence du changement climatique.