Coronavirus : polémique autour des stocks de masques que possède Airbus, alors que les soignants sont en pénurie

Médiapart publie une enquête à propos de la pénurie de masques de protection en pleine crise sanitaire liée au Coronavirus en France. Elle dénonce notamment un traitement de faveur envers Airbus, qui aurait continué à consommer des masques "pour des raisons économiques". Explications.

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Le 20 mars dernier, l'Agence Régionale de Santé d'Occitanie lance un appel au don de masques de protection. Une demande réitérée une semaine plus tard. Dans la région comme dans le reste de la France, de nombreux personnels de santé "en première ligne" dénoncent le manque de masques au quotidien. 
 
Dans le même temps, Airbus consommerait des millions de masques, bénéficiant d'un traitement de faveur de la part du gouvernement français. C'est ce que révèle une enquête de Médiapart intitulée : "Masques : les preuves d'un mensonge d'Etat". 


Airbus privilégié par le gouvernement 


Médiapart rappelle qu'en 2013, la ministre de la santé, Marisol Touraine, avait supprimé les stocks stratégiques de l'Etat pour transférer cette compétence aux employeurs. Les entreprises privées et publiques sont chargées de se constituer elles-même des stocks de masques pour protéger leur personnel. 
 
Depuis le début de la crise sanitaire liée au Coronavirus, le gouvernement aurait réduit l'approvisionnement des entreprises en masques pour privilégier les soignants. Réduit, mais pas stoppé, pour préserver l'activité économique, d'après Médiapart. Le gouvernement aurait même créé une cellule chargée d'aider les entreprises à importer des masques. 

A la crise sanitaire actuelle s’ajoute une crise économique, et nous avons à ce titre une responsabilité et des engagements envers l’ensemble de la filière aéronautique : clients, fournisseurs, partenaires, sous-traitants... Déclaration du service de communication d'Airbus.


Et le géant de l'aéronautique aurait été privilégié. Le fabriquant de masques 3M disposerait d'une liste de secteurs à livrer en priorité, sur la base de "consignes données par le gouvernement", explique le directeur commercial lors d'une conférence téléphonique en interne, révélée par Médiapart. Dans cette liste, Airbus aurait été placé en priorité 2 sur 3 jusqu'au 25 mars, au même titre que l'alimentaire ou l'énergie, alors que la majorité des avions ne peuvent pas voler en raison de la fermeture des frontières. 

"Sur certains postes de travail ne permettant pas de conserver une distance suffisante entre nos employés, le port de masques a été rendu obligatoire" précise la communication d'Airbus. Et d'ajouter : 

Airbus limite sa consommation en masques au strict nécessaire afin d’assurer la sécurité de ses employés, dans le respect des recommandations émises par l’OMS. Communication d'Airbus.


Pour rappel, le constructeur aéronautique avait repris son activité le 23 mars après seulement 4 jours de fermeture, engendrant la colère des syndicats. "On est contre la reprise de la production, sauf activités vitales. La fabrication d'avion n'a rien de vital aujourd'hui. C'est irresponsable dans ces conditions.", avait réagi Michel Molesin, coordinateur CGT chez Airbus Group.
 


Pour autant, le constructeur aéronautique précise l'utilité du maintien de son activité : 

Aujourd’hui, ce sont les appareils qu’Airbus fabrique qui transportent malades et soignants. L’A330 MRTT, les hélicoptères des forces armées et de la Sécurité Civile, l’A400M, les avions d’essais Airbus qui reviennent de Chine avec des masques, les A380 qui ont rapatriés les Français expatriés - tous ces moyens, utilisés quotidiennement par les autorités, sont produits et soutenus par Airbus. 


Les masques les plus protecteurs pour les employés d'Airbus


Le 23 mars, sur son compte Twitter, le PDG d'Airbus Guillaume Faury se réjouit de l'atterrissage d'un avion Airbus chargé de 2 millions de masques en provenance de la Chine, et dont "la majorité sera donnée aux gouvernements" précise-t-il. 
 
"La majorité", donc. Le reste des masques est destinée à alimenter Airbus pour "assurer la sécurité des personnels qui travaillent sur nos sites" affirme le PDG à Médiapart. Le média dénonce l'utilisation d'un convoi humanitaire pour se fournir "discrètement". Et de pas n'importe quels masques. 

Sous couvert d'anonymat, un employé d'Airbus nous raconte pourquoi il dispose d'une dizaine de masques FFP2, faisant partie des plus protecteurs qui existent : 

Je les ai eus il y a deux ans, quand j'allais dans un pays très pollué, le service médical m'a fourni une boite de 10 masques FFP2, que je n'ai pas utilisés.

Médiapart publie dans son enquête, un extrait des consignes d'Airbus, indiquant que le "port d'un masque FFP3" (encore plus performant et plus chers que les FFP2), est obligatoire "si exposition aux poussières / brouillard d'huile". Changés toutes les 4 heures, plusieurs milliers de masques de ce type seraient utilisés par Airbus chaque jour. Sur les réseaux sociaux, les internautes s'indignent : 
 
Les masques FFP2 et FFP3 sont les seuls qui protègent leur porteur contre le Coronavirus. Pour autant le personnel soignant, lui, a du mal à s'en procurer, ne disposant parfois que de masques chirurgicaux, qui permettent seulement de ne pas contaminer les autres, mais ne protègent pas contre les contaminations. Et dans les pires des cas, ils n'ont pas de masques du tout.
 
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