Assassinat de la grotte sanglante à Sète : "des tirs à bout portant, une crémation longue et intense" selon le légiste

Au procès de l'assassinat de Patrick Isoird dans la "grotte sanglante" de Sète, les experts ont précisé à la Cour d'Assises de l'Hérault que la victime aurait été abattue à bout portant et carbonisée dans la cavité, à une date imprécise. Une crémation très longue nécessitant un produit accélérant.

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Au procès de Rémi Chesne et Audrey Louvet devant la Cour d'Assises de l'Hérault, un pan du mystère autour des circonstances de la mort de Patrick Isoird en juin 2014 dans la "grotte sanglante" de Sète a été levé ce 20 janvier par plusieurs experts, dont le médecin légiste Laurent Boismenu.
C'est lui qui a effectué les premières constatations sur la scène de crime, lors de la découverte du corps de la victime, ligoté avec de l'adhésif et carbonisé, en juillet 2014.

Un magma liquéfié et putréfié

Selon l'hypothèse de l'expert, c'est bien dans cette grotte des flancs du Mont Saint-Clair que Patrick Isoird aurait été tué d'un premier tir de fusil de chasse au niveau du thorax, suivi d'un second au niveau de la face, tous deux réalisés à courte distance.
Des coups tirés avec des balles contenant des plombs de chasse de numérotation 4 et de calibre 12 "qualité cirée" de marque thcèque vendus par différents distributeurs. On en a retrouvé 39 rien que dans le thorax. L'expert en balistique Alain Artuso précise : "Cela confirme que la victime a éclaté en deux coups de feu".

Le légiste précise avoir décelé "un traumatisme crânio-facial majeur au niveau droit, avec un éclatement débordant du côté gauche et une projection de matière cérébrale. Au sein de ce magma liquéfié et putréfié, nous avons découvert des plombs, leur jupe (enveloppe de la balle contenant les plombs, NDLR). La paroi rocheuse était aussi criblée de petits plombs".

Un traumatisme crânio-facial majeur au niveau droit, avec un éclatement débordant du côté gauche et une projection de matière cérébrale. Au sein de ce magma liquéfié et putréfié, nous avons découvert des plombs, leur jupe (enveloppe de la balle contenant les plombs, NDLR). La paroi rocheuse était aussi criblée de petits plombs.

Laurent Boismenu, médecin légiste.

Lors de la reconstitution, seul le tir au niveau de la face a pu être reconstitué selon les éléments relevés sur la scène de crime. Cela a permis d'établir que Patrick Isoird était allongé au sol et qu'il avait la tête appuyée contre la paroi lorsque le coup est parti, tiré à 47 centimètres à peine, le tireur se trouvant au-desssus de sa victime.


Une analyse que ne peut pas confirmer l'anatomopatholgiste Marie-Dominique Piercecchi-Marti, car les tissus qu'elle a eu la tâche d'examnier étaient trop abîmés par la crémation et la putréfaction pour en tirer de telles conclusions. Elle peut affirmer en revanche que cette crémation a eu lieu post-mortem. 
Il n'a pas pu être vérifié non plus que Patrick Isoird avait le visage recouvert d'un sac plastique, comme l'a affirmé Audrey Louvet lors de ses aveux en 2017.

Les analyses toxicologiques réalisées post-mortem ont également révélé une exposition récente de la victime au cannabis et à la Folcodine (un médicament à base d'opiacées) ayant pu occasionner sa sédation ou au moins troubler sa vigilance.

Crémation dans la grotte

C'est aussi dans la grotte qu'aurait eu lieu la crémation, une fois le corps au sol, témoins les suies relevées autour des parois et la peau retrouvée sur son dos.
Des faits que le médecin légiste estiment avoir été perpétrés au moins 20 jours avant la découverte du cadavre, soit autour du jour de la disparition de la victime, à la fin du mois de juin 2014.

Un brasier à très haute température entretenu pendant plusieurs heures

A ce propos, Laurent Boismenu note une destruction très importante avec disparition quasi totale de l'abdomen, et une colonne vertébrale "totalement explosée : il ne restait quasiment rien du corps".

Pour arriver à ce résultat, il faut entretenir un feu de grande intensité, et que le corps subisse une exposition prolongée aux flammes : "J'ai relevé un état de carbonisation majeur au dernier stade, avec disparition des doigts : il faut un accélérant pour obtenir ces brûlures. L'action du feu, c'est le pire moyen, c'est très difficile, il faut une chaleur de 700 à 1000 degrés pendant plusieurs heures. Cela veut dire qu'il faut alimenter continuellement le brasier, soit en restant sur place, soit en revenant plusieurs fois sur les lieux". 

J'ai relevé un état de carbonisation majeur au dernier stade, avec disparition des doigts : il faut un accélérant pour obtenir ces brûlures. 

Laurent Boismenu, médecin légiste

De fait, des traces de supercarburant (essence pour véhicule) et de paraffine ont été relevées sur et autour du corps de la victime. Seuls les lambeaux de peau, de vêtements et un tatouage du buste de Jim Morrison sur l'épaule droite permettront d'identifier un individu masculin de type caucasien correspondant à Patrick Isoird.

Les experts se sont révélés incapables de dater précisément le jour de sa mort, située selon eux entre le 26 et le 28 juin, avec une marge d'erreur de plusieurs jours avant ou après (Patrick Isoird a disparu le 23, un décès le jour même est "plausible" mais non démontrable). Cette approximation est due à l'impossibilité de relever la température réelle de la grotte.
Le professeur Jacques Antoine précise : "J'avais demandé à ce qu'une station météo soit installée dans la grotte pendant au moins un mois, ce qui m'aurait permis d'affiner mon analyse. Cela se fait dans tous les pays d'Europe ayant une police scientifique digne de ce nom. A Sète, on m'a dit que cela n'était pas possible".

- Maître Jean-Marc Darrigade, avocat de la partie civile : "Peut-on en déduire que les tirs étaient volontaires et qu'il n'a pas été transporté là ?"
- Laurent Boismenu, médecin légiste : "Il ne m'appartient pas de le dire. Après, il y a quand même le bon sens qui joue : il était ligoté au niveau des membres supérieurs et des chevilles, ce qui rend compliqué le fait qu'il soit entré dans la grotte en étant déjà entravé. Et le corps était allongé par terre, le flux de sang relevé permet d'affirmer qu'il n'a pas été tué debout. Enfin les tirs ont eu lieu à bout portant".

A peine l'expert concède-t-il que ces éléments "pragmatiques" peuvent toujours prêter à discussion.

En fin d'audience, l'expertise autour du ruban adhésif enserrant le corps de Patrick Isoird permet à Maître Franck Berton, avocat de Rémi Chesne, d'instiller le doute sur la culpabilité de son client (qui a toujours nié) : "On est peut-être là à un tournant du procès".
Car ce ruban est très particulier : c'est un produit armé d'un tissage de renfort et enduit d'une colle en caoutchouc synthétique utilisée par les métiers du bâtiment et vendu uniquement dans les magasins réservés aux professionnels, pas dans les boutiques de bricolage grand public. Or Rémi Chesne, lui, est coiffeur. 

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