Au quatrième jour du procès de Guerric Jehanno devant les assises d'Albi où il est accusé de l'enlèvement, du viol et du meurtre d'Amandine Estrabaud, en juin 2013, à Roquecourbe, dans le Tarn, la parole a été donnée à la famille de la disparue.
Après quatre jours de procès, la parole a été donnée aux parents d'Amandine Estrabaud, ce mardi 13 octobre 2020. Au terme d'une journée marquée par les témoignages des anciens co-détenus de Guerric Jehanno, qui ont relaté, parfois en détail, les dernières heures de leur fille, telles que l'accusé les leur auraient racontées, ils sont venus dire à la barre leur longue attente, depuis la disparition de leur fille, le 18 juin 2013.
L'émotion d'un père
Comme voûté par le chagrin, Pierre Estrabaud s'avance dans la salle d'audience. "J'ai fait des erreurs par le passé et je les regrette" commence-t-il "mais je les ai payées. J'aimais ma fille et elle m'aimait."Il poursuit : "je suis persuadé qu'elle n'est pas partie de son fait. Elle voulait vivre, elle avait des projets. Elle ne nous aurait pas fait cette peine, elle ne serait pas partie sans nous le dire."
Pierre Estrabaud pleure à la barre. "Je supplie l'accusé de dire où est Amandine." Il s'étrangle : "tuer ma fille à coups de pelle. Violer ma fille et l'enterrer comme une bête, c'est pas possible."Je voudrais simplement que l'accusé nous dise où il a enterré notre fille pour qu'on puisse faire son deuil, dignement. Il ne sait pas combien on souffre, 7 ans de malheur... Entendre ces choses horribles, c'est pas possible.
Le chagrin d'une mère
"Je voulais parler d'elle" commence la mère d'Amandine quand elle s'exprime à son tour. Aux jurés, elle explique les "7 ans de calvaire" que vit sa famille depuis la disparition de sa fille. Elle raconte les projets d'Amandine, sa toute récente rupture avec son dernier compagnon, sa décision de "reprendre sa vie en main".Monique Sire raconte surtout son chagrin de mère : "devant son bourreau, elle était toute seule. Je n'ai rien pu faire pour elle. Elle était toute seule et il faut vivre avec ça tous les jours."Je suis certaine de la culpabilité de Guerric car je suis sûre qu'elle ne serait pas montée en voiture avec quelqu'un qu'elle ne connaissait pas. J'imagine la suite des évvènements, elle a dû tout lui raconter parce qu'elle était à l'aise avec quelqu'un du village. J'imagine les premiers gestes quand il a dû essayer de l'embrasser, tout ce qu'il a pu faire, les coups, tout ce qu'on a entendu. Est-ce que vous vous rendez compte de ce qu'on ressent quand on entend ça ?
Après ça, il faut bien vivre. mais nous, on regarde les gens vivre. Moi, j'ai des collègues qui marient leur fille, qui vont être grand-mères ou qui le sont déjà. Moi, je ne marierai jamais ma fille. Je ne la verrai jamais enceinte.
Un accusé qui clame son innocence
Invité à s'exprimer une dernière fois, Guerric Jehanno a dit avoir "ressenti de l'émotion" en écoutant la maman d'Amandine. Mais il continue de clamer son innocence : "si j'avais fait quelque chose, je l'aurais dit aux gendarmes. J'aurais avoué avoir commis quelque chose de grave.""J'ai fait des erreurs, je les regrette" a-t-il aussi dit, après le témoignage, accablant, de ces anciens co-détenus sur les confessions qu'il leur aurait fait en détention. "Je regrette d'avoir fait ces plans, ça a fait de la peine à la maman d'Amandine. J'ai inventé une histoire et ça me fait de la peine. C'est là où toutes les investigations sur moi sont parties pour le viol et le meurtre."
Mais un coupable que tout désigne pour l'avocat des parties civiles
Au terme de cette très longue journée d'audience, l'avocat des parents d'Amandine, de ses oncles et tantes et de ses cousins a pris la parole au nom de toutes les parties civiles."On va vous parler de la jurisprudence Viguier, une affaire plaidée dans cette même salle il y a dix ans" dit Pierre Debuisson aux jurés "et vous dire que sans corps, on est nécessairement acquitté. Ce n'est écrit nulle part dans le droit français."
"On va vous faire croire que c'est un déséquilibré mais toutes les expertises, tous les experts psychiatres ont dit le contraire."
Dans sa plaidoirie, Pierre Debuisson souligne "l'ambivalence permanente" de Guerric Jehanno, aussi bien devant les enquêteurs, les juges que devant cette cour d'assises où il comparaît depuis 4 jours. Et il appuie :
Il en appelle à l'intime conviction des jurés. "Vous savez qu'il est coupable. pensez à la mère et au père d'Amandine qui ont été formidables. Tous comptent sur moi et sur vous pour faire éclater la vérité judiciaire de cette affaire. Pour rendre justice. C'est ce que je vous demande."Ceux qui viennent le dénoncer, c'est sa mère, ses meilleurs amis et lui-même, à travers ses confidences. Tout converge vers la culpabilité, qui est avérée de Guerric Jehanno. Le mobile, nous l'avons : il était attiré par Amandine. Il a une totale absence d'alibi : personne n'est venu prouver qu'il était sur le chantier. Tout converge, les témoignages de sa mère, de ses meilleurs amis, de la voisine, les siens.
Le verdict des jurés est attendu mercredi, après le réquisitoire de l'avocat général et les plaidoiries de la défense.