Depuis une dizaine d'années, on observe la présence de plus en plus nombreuse, de barracudas dans les eaux marseillaises. Sa présence démontre que les écosystèmes sont en bonne santé. Mais faut-il s'inquiéter pour nos mollets cet été ?
En début d'année, le Parc national des Calanques avait signalé la présence de barracudas au large de Marseille. Et leur présence tend à se renforcer en raison du réchauffement climatique. Il existe deux types de barracudas. La bécune, présente chez nous, et le grand barracuda, dans les tropiques. À ne pas confondre.
Bien différent de son cousin des tropiques
Ce grand poisson serait-il brûlant comme une méduse ? Ou gourmand de baigneurs comme un requin ? Pas du tout. Il est inoffensif et nous ne l'intéressons pas. Son cousin des tropiques évolue dans une autre catégorie. "Avec 2m50 de long pour un mètre maximum ici, le barracuda devient beaucoup plus dangereux, rien à voir avec notre barracuda de Méditerranée", relève Thierre Thibaut, professeur d'écologie marine à l'université d'Aix-Marseille. Ce chercheur souligne qu'il ne voit pas d'augmentation de cette espèce.
"J'ai plus d'appétit qu'un barracuda", chantait Claude François. Certes, le poisson mange ses congénères. En plus, il a des dents, mais nous aussi. Si l'on veut vraiment le rendre inquiétant, on peut dire qu'il fait partie des "super-prédateurs", comme un loup, comme un lion, il est au sommet de la chaîne alimentaire.
Le barracuda se régale de petits poissons, pas de touristes marseillais, du moins, une telle agression n'a jamais été signalée au monde scientifique. Sous leurs airs inoffensifs, le loup (poisson), la sériole et le denti font également partie des super-prédateurs.
"Ils sont de plus en plus nombreux"
"Avant, l'eau était trop froide à Marseille pour cette espèce. En 2010, les barracudas avaient déjà été vus au large de la plage des Catalans. La température de la mer augmente, ils sont de plus en plus nombreux" s'inquiète Didier Réault, président du Parc national des Calanques. Ces nouvelles espèces risquent de nuire aux espèces locales. Nous devons préserver leur habitat, veiller sur la qualité de l'eau et mieux gérer les zones de pêche". Des raies apparaissent dans la baie de Marseille, des plantes et des algues également, lorsque la chaleur est très élevée.
Des énormes bancs de barracudas ont été aperçues dans les calanques marseillaises. Normalement présents dans les eaux chaudes, leur arrivée dans les eaux de la cité phocéenne est dû au réchauffement climatique. pic.twitter.com/V5jymX2BI9
— Au coeur des animaux (@AuCoeurAnimaux) February 23, 2024
Sa présence est un bon signe
La mauvaise réputation du barracuda étant écartée, nous pouvons dire que sa présence dans le Golfe de Gênes a été établie il y a plus de 100 ans. Sa présence est un bon signe. Elle signifie que le milieu environnant et les écosystèmes sont en bonne santé. Une expression dit "Quand le mérou va, tout va". "Cette expression peut tout à fait être appliquée au barracuda," selon Eric Charbonnel, coordinateur scientifique du Parc marin de la côte Bleue.
Le barracuda bouge beaucoup, il aime nager côté Cassis comme côté Côte bleue. "Ce poisson est présent de 0 à 100 mètres de profondeur. Il est indifférent à l'homme sauf s'il porte quelque chose de métallique sur lui. Le barracuda aime ce qui brille, il peut faire des cercles autour de nous si l'on porte une montre, par exemple, ou un détendeur de plongée."
Eric Charbonnel se qualifie de "poissonnier", ou plutôt scientifique poissonnier. Il insiste sur le côté inoffensif de ce poisson tout en longueur : "Il est joli, très spectaculaire, avec des reflets métalliques qui lui servent à se confondre avec le soleil. Il passe inaperçu pour les autres poissons". Le barracuda chasse en pleine eau, au large.
"On observe des petits et des gros (entre 60 centimètres et un mètre de long)", mais on ne sait pas où sont les moyens. Dans les ports, on voit parfois des petits juvéniles. Ils ressemblent à des stylos Bic, c'est très beau".
Nous ne donnerons aucune recette ici mais "vous pouvez le manger", nous assure l'universitaire Thierry Thibaut, c'est bon, et même très bon. Les pêcheurs professionnels le savent bien. Une fois de plus, le discours diffère pour le cousin géant des tropiques. Selon la taille du poisson et son lieu de pêche, une toxine, la ciguatera, peut provoquer des intoxications alimentaires.
Première publication février 2024