17 brebis ont été blessées à Saint-Martin-de-Crau le 12 octobre et certaines ont dû être euthanasiées. Les attaques du loup se multiplient en pays d'Arles et en Camargue depuis quelques années.
Longtemps, on l'a cru cantonné aux Abruzzes italiennes où il ne restait que quelques dizaines d'individus. Et puis le loup a traversé la frontière au début des années 1990. Un premier couple est observé en 1992 dans le Mercantour, puis une meute en 1997 dans les Écrins. Depuis sa présence est étendue sur tout le territoire, en Provence-Alpes-Côte d'Azur, les loups présents représentent 2/3 de la population loup de France.
Le loup en montagne : une fausse idée reçue
De crêtes en vallées, on s'est peu à peu habitués à retrouver Canis Lupus Italicus (le loup gris d'Italie) arpentant nos massifs français, des Alpes aux Cévennes jusqu'aux Pyrénées, territoires que les hommes lui avaient interdits à coups de fusil, de poison, et d'autoroutes.
On avait peut-être oublié qu'au cours des siècles précédents, le loup n'était pas que sur les sommets. Il était partout. Les dernières observations et attaques de loups ne laissent plus de doute. Le Loup est bien présent dans la plaine, entre le littoral, le pays d'Arles et les Alpilles. En 2022, des attaques ont été signalées en Camargue et le secteur a été classé cette année par la préfecture en zone de prédation. Descendu des Alpilles, le loup s'est attaqué ce 12 octobre 2024 à un troupeau de Saint-Martin-de-Crau, à 18 kilomètres au sud-est d'Arles.
Ci-dessous la carte des attaques confirmées dans la métropole d'Aix-Marseille depuis 2021 :
Après son installation en montagne, le loup désormais régulièrement de passage en plaine ? Pas de quoi rassurer Patrick Lévêque. "On peut désormais certifier que des meutes entières sont implantées dans les Bouches-du-Rhône", s’inquiète le président de la Chambre d’agriculture du département. D'Aix-en-Provence aux Alpilles, le loup étend son territoire, particulièrement dans la plaine de la Crau. Et il y rentre en concurrence frontale avec les éleveurs.
Recensement des attaques de loups en 2024. @maploup.fr
Pour le loup, les brebis sont plus faciles à chasser en plaine ; il s'installe là où il y a un garde-manger
Patrick Lévêque, président de la Chambre d'Agriculture des Bouches-du-Rhône
Une affirmation qui fait bondir les défenseurs de la faune sauvage. Président de l'association FERUS, Bertrand Sicard "a du mal à croire" que l'espèce puisse se fixer en plaine.
Le loup a recolonisé les massifs. Mais il a besoin de trop de tranquilité pour s'installer en plaine
Bertrand Sicard, président association FERUS
"Les louves ne trouvent pas de bonnes conditions pour mettre bas dans les zones plus habitées ; il leur faut plusieurs tanières, de l'eau à proximité. Et surtout de la tranquillité." Selon Bertrand Sicard, la plaine restera le terrain de chasse d'individus isolés, capables de parcourir cent kilomètres par nuit avant de retrouver leur protection en montagne.
Une première meute dans les calanques
Le territoire de chasse du loup s'étend Un premier indice percute pourtant les prédictions des naturalistes.
À l’été 2022, les techniciens du Parc national des calanques de Marseille ont attesté de la reproduction d’un couple de loups, donnant naissance à la première meute installée en cœur du Parc. De quoi conforter les éleveurs dans leur croisade pour limiter drastiquement la population de leur prédateur.
En deux ans, nous avons subi 71 attaques attribuées aux loups dans le département, et perdu 342 animaux, surtout des ovins. Ca suffit.
Patrick Lévêque, président de la Chambre d'agriculture des Bouches-du-Rhône
"Les anciens ont éradiqué le loup au siècle dernier. Ce n'est pas par hasard" constate Patrick Lévêque. Selon lui, les mesures de protection, chiens, clôtures ou tirs d'effarouchement, ne suffiront pas. "Les loups s'adaptent rapidement, sautent les clôtures pour entrer dans les bergeries". Insupportable aux yeux des éleveurs.
Quand ils auront proliféré, les loups s'attaqueront aux chats, aux chiens domestiques. Et ce sera la fin de l'acceptation sociale, personne n'y gagnera
Patrick Lévêque
Face aux menaces sur les troupeaux de plaine, le représentant des éleveurs réclame des mesures pour contenir la population des loups, plus radicales que celles figurant dans l'actuel Plan Loup 2024-2029. Adopté récemment dans la douleur, celui-ci maintient la possibilité d'éliminer 19% des prédateurs, soit environ 200 animaux chaque année.
"Une absurdie"
'"L'Etat mise tout sur les tirs ; on nage en pleine abdsurdie!" s'emporte le président de l'association Ferus.
Plus ils en tireront, plus il faudra en tirer. Le biotope français est favorable au développement du loup. Il faut vivre avec
Bertrand Sicard, président association FERUS
Les défenseurs du loup prônent une poursuite des indemnisations systématiques de ses dommages aux élevages. "35 millions d'euros par an, c'est moins que les 50 millions versés aux céréaliers pour les dégâts des sangliers" rappelle Bertrand Sicard. Qui souligne la bonne santé de l'économie ovine dans les zones colonisées par le loup.
Écotourisme et cohabitation
Dans les calanques de Marseille, le Parc national invite à inventer désormais une cohabitation bénéfique entre les hommes et le loup, dont la présence "est une bonne nouvelle pour la biodiversité". Il permet d'assainir la nature "en régulant les populations de renards, lièvres et autres rongeurs".
En région PACA, où se concentrent deux tiers des loups français, le retour du prédateur pourrait aussi permettre de diversifier les activités et revenus touristiques. L'ONG franco-Italienne lifewolfalps met en lumière les nouveaux emplois dans le secteur de l'écotourisme, créés chez nos voisins italiens, espagnols et slovènes, depuis le retour du loup.