Anesthésiste soupçonné d’une série d’empoisonnements à Besançon : pourquoi l’instruction est-elle aussi longue ?

L’affaire du Dr Frédéric Péchier se terminera-t-elle par un renvoi du médecin vers la cour d’assises du Doubs ? Depuis mars 2017 et la mise en examen du Dr Péchier, l’instruction est toujours en cours. La défense s’impatiente. Le parquet aussi.

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Bientôt cinq ans que l’affaire Péchier comme on l’appelle a éclaté. 24 empoisonnements ont-ils été commis dans deux cliniques privées de Besançon ? Pour le savoir, l’instruction a ordonné expertises médicales, psychiatriques et psychologiques … puis contre-expertises, et encore contre-expertises. Tout cela prend du temps.

“Cette instruction est longue, trop longue et je le regrette profondément” explique Etienne Manteaux, procureur de la République de Besançon.Cette longueur est essentiellement liée à une première contre-expertise où l’expert n’a pas analysé sérieusement les pièces, ses conclusions ne sont nullement probantes” déplore le procureur. Il espère que fin 2022, les derniers contre-experts auront livré leurs conclusions, étudiant chaque cas. “Nous attendons des conclusions claires des contre-experts" dit-il pour établir s’il y a une certitude d’empoisonnements” résume Etienne Manteaux. “Ce sera à la justice d’établir qui en est l’auteur”.

Une demande de démise en examen partielle déposée

Le procureur de la République s'est dit opposé à la demande récente de la défense du Docteur Péchier d’une démise en examen sur trois des 24 cas présumés d’empoisonnement. “Cette demande est un droit de la défense” concède-t-il. “Je constate qu’il n’y a pas d’éléments nouveaux qui viennent jeter le trouble ou un doute quant à la participation de Monsieur Péchier à ces faits” estime quant à lui le procureur.

3 cas à la Polyclinique de Franche-Comté ?

Sur les 24 faits reprochés au médecin, la plupart concerne la clinique Saint-Vincent à Besançon. Les trois autres se seraient déroulés à la Polyclinique de Franche-Comté. Pour la défense du Docteur Péchier, ces trois cas supposés d’empoisonnement ne reposent pas sur des éléments solides. “A la Polyclinique pour le premier cas, le docteur Péchier était présent, pour le second, il était en congés, pour le troisième, cela faisait plusieurs semaines qu’il avait quitté l’établissement” argumente l’avocat Randall Schwerdorffer. Si la défense demande l’abandon de ces trois cas précis, c’est pour casser la dynamique du « dénominateur commun », là où travaille le Dr Péchier, il y aurait des empoisonnements. Il rappelle aussi l’absence de toute preuve matérielle contre son client, et des expertises favorables dont celle du psychiatre Daniel Zagury pour qui l'anesthésiste Frédéric Péchier n’a pas le profil d’un tueur en série. La requête de démise en examen a été rejetée par le juge d’instruction après avis du procureur.

Fin 2022 ?

Le procureur de Besançon espère obtenir les conclusions des contre-experts d’ici la fin de l’année 2022. “Pour le parquet, à la lumière de l’ensemble des éléments que l’on a déjà, et même s’il faut abandonner des éléments à la lumière des contre-experts, 10 à 15 dossiers seront suffisants, je pense à requérir le renvoi du Dr Péchier devant la cour d'assises du Doubs” estime Etienne Manteaux.

Cinq ans d’instruction voire plus, un temps qui paraît long aux parties civiles, comme au médecin. “Le Dr Péchier vit en grande souffrance” confie son avocat. Il a perdu son travail. L’homme a tenté de suicider au cours de l’automne 2020. La défense attend elle aussi les conclusions des contre-experts, et un procès qui pourrait avoir lieu en 2023 voire 2024. “Dès le départ, on a dit attention, plutôt que de parler d’un dossier d’empoisonnements, il est possible qu’on ait un dossier d’erreurs médicales, d'erreurs d'anesthésie, et Dieu sait qu’il y en a en France des erreurs d’anesthésie. Et cette hypothèse-là pour l’instant a été validée par les premiers contre-experts” rappelle Randall Schwerdorffer.

La chronologie de l’affaire Péchier

  • En mars 2017, Frédéric Péchier médecin anesthésiste, est mis en examen pour empoisonnement avec préméditation sur sept patients. Deux d’entre sont morts sur la table d’opération alors qu’ils subissaient des interventions bénignes.L’enquête révèle la présence d’anesthésiques locaux en surdose ou de potassium dans les poches de perfusion utilisées au cours des opérations entraînant des arrêts cardiaques. Frédéric Péchier est placé sous contrôle judiciaire avec interdiction totale d’exercer son métier. Il clame son innocence.
  • En mai 2019, 17 nouveaux cas d’empoisonnements dont 7 mortels sont versés au dossier. Le docteur Péchier est désormais suspecté d’avoir commis 24 empoisonnements sur personnes vulnérables dont neuf mortels. Il est mis en examen pour la seconde fois et reste libre sous contrôle judiciaire avec interdiction de paraître à Besançon, son secteur de résidence.
  • La justice évoque dans un premier temps la thèse d’un « pompier-pyromane », celle d’un médecin qui provoquerait volontairement des arrêts cardiaques pour pouvoir réanimer les patients ensuite tel un sauveur. Après 30 mois d’enquête, c’est la thèse de la vengeance qui est privilégiée par le parquet : le docteur Péchier aurait empoisonné les patients de ses collègues pour leur nuire, ce que conteste la défense.

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