Affaire Péchier : trois à quatre mois de procès, une salle spéciale pour juger en 2025 l’anesthésiste soupçonné de 30 empoisonnements

Le procès du docteur Frédéric Péchier, renvoyé devant la cour d'assises de Besançon (Doubs), aura lieu de septembre à décembre 2025. Le médecin est poursuivi pour 30 empoisonnements dont 12 mortels. Son procès devrait se tenir dans une salle classée du palais de justice.

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C'est une date qui était attendue depuis des mois. Le docteur Frédéric Péchier devrait être jugé du 15 septembre à la fin du mois de décembre 2025, selon une information de BFMTV. L'ordonnance de mise en accusation, rendue par les deux juges d’instruction en charge du dossier, est désormais définitive. L'ancien anesthésiste est renvoyé devant la cour d'assises de Besançon pour l'empoisonnement de 30 patients, dont 12 se sont avérés mortels, entre 2008 et 2017, à Besançon (Doubs).

7 ans d'instruction

Le renvoi du docteur Péchier devant la cour d'assises était attendu par les nombreuses parties civiles de l'affaire comme par l'ancien anesthésiste lui-même. Après une instruction close en février 2024, le procureur de la République de Besançon avait rendu son réquisitoire définitif au mois de mai. Et c'est en août que Frédéric Péchier avait été renvoyé devant les assises du Doubs, un renvoi qui n'avait pas été contesté par la défense.

Pour rappel, Frédéric Péchier est soupçonné d'avoir pollué, entre 2008 et 2017, les poches de perfusion de patients dans deux cliniques privées de Besançon pour provoquer des arrêts cardiaques. Il avait été mis en examen pour "empoisonnements avec préméditation" en mars 2017. L'enquête, tentaculaire, avait conduit à l'exhumation de corps pour analyses, avant sa mise en examen pour 17 nouveaux cas d'événements indésirables graves (EIG), en 2019.

À lire aussi : 30 empoisonnements présumés, 12 morts : le parquet demande un procès aux assises pour l’anesthésiste de Besançon Frédéric Péchier

L'ancien anesthésiste, "combatif", nie les faits

L'accusé, depuis le début de l'instruction, nie toute implication dans les faits d'empoisonnement. Contacté par France 3 Franche-Comté, son avocat, Randall Schwerdorffer, rappelle la ligne de défense qui sera développée au procès : "Le docteur Péchier conteste toute implication dans l’un des 30 faits qui lui sont reprochés, que ces faits soient accidentels ou volontaires." L'anesthésiste avait admis des erreurs médicales, mais pas de volonté de nuire.

En 2019, Frédéric Péchier avait été interdit de pratiquer son métier, avant de pouvoir de nouveau exercer la médecine, mais sous conditions. Aujourd'hui, son principal avocat le dit "concentré" sur la perspective d'un procès. "Il est temps qu’il arrive. Il attend son procès, il travaille, il reprend tout le dossier. Je trouve qu’il reste combatif, on est sorti de la période très sombre", réagit Randall Schwerdorffer, en référence à la tentative de suicide de son client, en octobre 2021. 

C’est quelqu’un qui ne va pas bien, depuis ces accusations portées contre lui, sa vie a été tellement bouleversée que ça n’a jamais été bien depuis sa mise en examen. 

Randall Schwerdorffer, avocat de Frédéric Péchier

L'avocat de l'ancien anesthésiste ne cache pas qu'il compte bien mettre au jour de nouvelles pièces de l'enquête. "Il y a tout un tas de choses dont on n’a jamais parlé." Des éléments inédits que la défense se garde bien de préciser. "Les enjeux sont tellement lourds qu’on ne va pas communiquer sur le fonds. Je les réserve pour le procès", dévoile Maitre Schwerdorffer. 

La suite d'un long combat pour les parties civiles

Pour les victimes présumées de l'anesthésiste, pour les proches des personnes décédées ou gravement blessées par leur empoisonnement, la perspective que le procès se tienne enfin sonne comme une avancée majeure, après des années et mois d'attente. Mais il sera aussi synonyme de douloureuses réminiscences. "Quatre mois de procès, ça promet une épreuve particulièrement difficile", prévient Maitre Frédéric Berna, avocat d'une cinquantaine de parties civiles.

Pour les parties civiles, ça cristallise le moment qu’elles attendent depuis longtemps. Chaque mois passé est un mois douloureux, le plus tôt on pourra affronter un procès, le mieux ce sera.

Maitre Frédéric Berna, avocat des parties civiles

De plus, la détermination de la défense, qui prévoit de plaider l'acquittement, indique que ce procès ne sera pas le dernier. "C’est qu’une étape, avertit maître Berna. Il y a de fortes chances pour qu’il y en ait un deuxième. C'est la continuité d’un combat difficile."

L'avocat nancéen, qui évoque "une date prévisionnelle du 15 septembre au 15 décembre", pas encore confirmée par la cour d'appel de Besançon, se fait le porte-voix de ses clients, déçus d'une perspective aussi lointaine. "Elles espéraient vraiment mars, avril, donc ça repousse de six mois. Il va falloir se préparer psychologiquement." "Chaque mois passé est un mois douloureux, le plus tôt on pourra affronter un procès, le mieux ce sera." 

Admettant qu'un tel procès "ne doit pas très simple à mettre en œuvre", Maitre Berna attend à tout le moins une justice "à la hauteur de l’enjeu" pour un "procès événement." "Ça avance et c’est le plus important", assure-t-il.

Un procès hors normes

Le procès, qui devrait donc durer entre trois et quatre mois, s'annonce intense pour toutes les parties. "Physiquement, psychologiquement, intellectuellement, ça va être une épreuve très impressionnante", annonce Me Schwerdorffer. "Moi-même, je n’ai jamais connu ça", reconnaît le pénaliste, connu en particulier pour son rôle dans les procès de Jonathann Daval et du Chilien Nicolas Zepeda.

Quand vous êtes dans un procès d’assises, vous êtes dans une sorte de bulle, c’est très prenant. On est toujours concentré. Il n'y a pas de temps mort dans ce type de procès.

Randall Schwerdorffer, avocat de Frédéric Péchier

Le pénaliste bisontin s'attend à une session judiciaire historique à tout point de vue. "C’est énorme en termes de nombre de témoins, en termes de nombre d’experts, de cas à examiner, en termes d’enquêteurs." 

Une centaine de parties civiles, une quarantaine de témoins, 15 000 cotes de procédure, 60 expertises techniques sans compter les expertises psychologiques, "C’est énorme", décrit également Maitre Berna. 

La salle du Parlement, un lieu chargé d'histoire

Un procès historique qui devrait donc se tenir dans un lieu emblématique du palais de justice de Besançon : la salle Nodier, connue aussi sous le nom de salle du Parlement de la cour d'appel, en référence à l'ancien Parlement de la province de Franche-Comté, sis dans l'ancien hôtel de ville de Besançon, édifié en 1582.


Actuellement réservée à des audiences solennelles, la salle du Parlement devra bénéficier d'une importante rénovation pour accueillir ce procès. "C’est une salle impressionnante", témoigne Maitre Schwerdorffer. J'y ai fait mes premières assises en 2001. Elle n'a pas changé depuis, c’est une très belle salle, magnifique d’un point de vue architectural."

Ornée d'une fresque monumentale peinte à 10 mètres de hauteur sur le plafond boisé, la salle devra notamment être sonorisée pour y permettre la logistique des procès actuels qui implique la diffusion d'enregistrements sonores, de vidéos, et de multiples pièces du dossier. Un écrin dédié qui s'annonce être "à la hauteur de l'enjeu".

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