Un an après le drame qui a coûté la vie à 10 personnes au 12 chemin des barques, rien n'a changé, aux dires des habitants du quartier. Trafic de drogue et sentiment d'abandon, sont le lot quotidien. Les habitants semblent résignés, les sinistrés tout aussi désemparés.
À Vaulx-en-Velin, au 12 chemin des barques, des sinistrés avaient rendez-vous cette semaine avec des experts en assurance. Leur appartement a été détruit par les flammes dans la nuit du 15 au 16 décembre 2022. Un an après l'incendie meurtrier, les travaux de réfection continuent pour faire disparaître les stigmates de cette nuit dramatique.
10 morts, dont 4 mineurs
L'incendie a causé la mort de dix personnes, dont quatre enfants. Vingt-quatre autres personnes avaient été blessées, dont quatre grièvement. Le feu s'était déclaré peu après 3 heures du matin dans une copropriété de sept étages. Les occupants ont été piégés dans leur sommeil. Certains ont sauté par les fenêtres, d'autres ont péri, intoxiqués par les fumées. Cette nuit d'horreur a aussi fortement marqué les pompiers.
Très rapidement, les soupçons se sont portés sur un feu d'origine humaine, parti du hall de l'immeuble. Des habitants racontent qu'il était régulièrement squatté par des dealers. Des chauffages et branchements électriques sauvages pourraient avoir déclenché un début d'incendie qui se serait propagé dans l'immeuble.
Un an après le drame, la vie semble suivre son cours "comme avant" dans le quartier, au grand dam des habitants.
Des sinistrés désemparés
Si les rescapés ont été relogés après le tragique incendie, le retour dans le quartier est aujourd'hui loin d'être une évidence pour eux. À quelques mètres à peine de leur immeuble sinistré, le trafic de drogue se poursuit. Aux dires des riverains, il n'a même jamais cessé. "Dans le quartier, beaucoup de gens se plaignent. On se demande si ça changera un jour", explique une femme.
Chemin des barques, la régie a fait condamner des accès pour éviter les squats des halls d'immeubles. Des digicodes sont apparus sur certaines entrées. Mais à l'avant et à l'arrière des bâtiments, guetteurs et vendeurs se relaient et assurent leur business comme si de rien n'était devant les riverains.
"Il y a du gardiennage, des travaux, les portes ont été sécurisées. Mais on ne sait pas si dans quelque temps, ces portes seront toujours sécurisées. Je connais des gens qui vivent là. Il y a des alertes.", ajoute-t-elle. "Nous sommes perdus. On aurait bien voulu revenir, mais après le drame, c'est difficile". Et cette propriétaire se pose beaucoup de questions : "on est censé récupérer notre appartement. Mais que fait-on ? On le récupère et on habite dedans ? On le vend ? On le vend à perte ? On est perdu".
Trafic de drogue : un sentiment d'abandon
Chemin des barques, les points de vente de drogue sont connus de tous, le business est décomplexé, les guetteurs imperturbables. Certains habitants affirment se sentir épiés par les dealers. D'autres évoquent des menaces ou des intimidations. Rares sont ceux qui acceptent de témoigner face caméra. Dans le quartier, les habitants semblent partagés entre résignation et fatalisme.
"Ils sont là. Nous, on ne peut rien faire. C'est le travail de la police", explique un habitant. "Ils ne font pas le bordel, mais ils sont là... au coin. C'est toujours le même trafic de drogue. Que voulez-vous que je vous dise : on ne se plaint pas, mais il y a eu dix morts et ils sont toujours là", avance un autre Vaudais.
"On a passé un été épouvantable. Ils étaient sur la promenade. C'était sans arrêt. Ils mettaient des chaises. Les motos passaient. Il faut de la police", affirme une autre riveraine. "Ils sont là, mais ils ne nous embêtent pas plus que ça. Ils font leurs affaires, on fait les nôtres. On a une vie, on a des enfants. On ne s'en occupe pas, ils ne s'occupent pas de nous", assure un homme avec un apparent détachement.
Chemin des barques, la colère a cédé la place à la lassitude. Mais le sentiment d'abandon est bien présent.