Crise de l'immobilier : pourquoi est-ce si difficile de trouver un logement à Dijon ?

Dans son 28e rapport annuel, la fédération de l'Abbé Pierre estime qu'en 2023, "le parc locatif privé apparaît inaccessible dans de nombreuses métropoles". Dans le même temps, "les perspectives sont nulles ou presque" pour les ménages modestes voulant acheter. Quelles sont les raisons de cette crise du logement ? Prenons exemple sur Dijon.

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"Le parc locatif privé apparaît inaccessible dans de nombreuses métropoles." "En ce qui concerne l'accession à la propriété pour les ménages modestes, les perspectives sont nulles ou presque." Le 28e rapport annuel de la fondation Abbé Pierre sur l'état du mal-logement en France dresse un sombre tableau de l'état actuel du parc immobilier français.

Moins 60 % de biens à louer en cinq ans

En effet, la France subit une crise des transactions locatives : selon un rapport de la Fédération nationale de l'immobilier, les offres de locations ont diminué de 59 % en cinq ans.  Et cela se ressent aussi dans notre région. Nous sommes allés voir les biens disponibles sur Le Bon Coin et SeLoger.com, à Dijon.

120 offres sont proposées si vous cherchez un studio avec un budget maximum de 450 €. Mais si vous cherchez un logement meublé... d'une centaine d'offres, vous passez à 43. Si vous tentez d'avoir un T2, les disponibilités s'amenuisent de nouveau : 17 logements à louer à Dijon. 

Sur Le Bon Coin, même phénomène : peu de biens, et 10 fois moins d'offres si l'on recherche un appartement T2. Et beaucoup de ces offres n'incluent pas les charges. Il faut alors rajouter au loyer l'électricité, le gaz, le fioul... Au 1er février, les prix de l'électricité ont augmenté de près de 10 %. Mais pourquoi aussi peu d'offres locatives ?

En location, un problème d'offre et de la demande

Pour Catherine Vandriesse, présidente de la FNAIM 21 (fédération nationale de l'immobilier) basée à Dijon, tout part du pouvoir d'achat des primo-accédants, ceux qui souhaitent acheter pour la première fois un bien immobilier. En deux ans, il a baissé de 15 %.

"Nous avons simulé la possibilité d'emprunt, en 2022 et en 2024, pour quelqu'un qui est capable de mettre 1 000 € par mois de côté. En 2022, il était capable d'obtenir 216 000€ avec un taux à 1 %. En novembre 2023, il peut emprunter 162 000 € avec un taux de remboursement à 4,22 %. Il y a donc une baisse de 54 000 € de la capacité d'achat."

"Cela impacte le marché de la location, car le profil simulé est celui des primo-accédants qui étaient auparavant locataires. Ils ne vont pas pouvoir acheter le logement dont ils ont besoin, donc ils ne libèrent pas leurs appartements. Les gens ne bougent pas, donc, il n'y a plus rien à louer," ajoute Catherine Vandriesse. 

Une pénurie qui risque de s'accentuer dès 2025

Cette tendance risque de s'accentuer dès l'année prochaine, à cause de la loi sur les diagnostics de performance énergétique. Le DPE mesure la performance climatique d'un logement, et, à terme, son impact en termes d'émission de gaz à effet de serre. En 2025, les appartements et les maisons classés G (passoires thermiques, la plus mauvaise note) ne pourront plus être mis sur le marché locatif.

"Là, on pourra parler de vraie crise", estime David Demey, le président de la CLCV 21, l'antenne côte-d'orienne de l'association de défense des consommateurs et des usagers. Et pour cause : selon les estimations de la FNAIM, 7,3% des 95 000 logements dijonnais ont une performance énergétique qui sera considérée comme indécente en 2025. Soit... 7 000 logements.

"Risque de création d'un marché noir"

Ces quelque 7 000 logements ne pourront plus être loués à partir de l'année prochaine. "Dijon reste une ville attractive et les gens chercheront toujours à se loger. Il y a donc un risque de création d'un marché noir, et ce sont les plus modestes qui vont galérer le plus", ajoute Jean Perrin, président de l'Union nationale de la propriété immobilière (Unpi) de Côte-d'Or.

La CLCV lance qu'elle est "plutôt en faveur de la réhabilitation des habitats. Mais, collectivement, nous devons nous demander la manière de faire pour pouvoir aider les propriétaires."

En achat, un problème sur le neuf

Pour ce qui concerne l'accession à la propriété, deux tendances s'affrontent : l'ancien et le neuf. Baptiste Poulain, gérant de l'agence Royal Immobilier de Dijon, estime "qu'en 2023, nous avons fait une bonne année, et en 2024 nous sommes aussi dans les clous".

Son agence ne vend que des biens anciens, des logements qui ont été construits il y a plus de cinq ans. Selon lui, "les investisseurs sont toujours présents. Je n'ai pas vu de changements dans le type de public voulant acheter un bien. La primo-accession reste toujours le rêve de beaucoup de familles."

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En revanche, pour les promoteurs immobiliers, l'avenir immédiat semble plus sombre. L'augmentation du coût des matières premières, et la baisse du pouvoir d'achat immobilier les empêchent d'atteindre le quota de 30 % de réservations qui est pourtant nécessaire pour qu'ils puissent lancer leurs constructions. "Avec cette gestion, les promoteurs ont de plus en plus de mal à survivre", constate Baptiste Poulain.

Quelles solutions ?

On se retrouve donc dans un cercle vicieux, où les primo-accédants ont du mal à acheter le bien qu'ils veulent. Ils ne libèrent pas leurs locations et les promoteurs ne construisent pas assez de biens. Donc, les loyers augmentent.

Sur cinq ans, les loyers dijonnais ont augmenté de 4,7 %, un peu en-dessous du niveau départemental. En revanche, sur la même période, à Chalon-sur-Saône, les prix ont bondi, en moyenne de 14,5%. "Le marché trouve toujours un moyen de compenser naturellement," lance Catherine Vandriesse.

Pour pouvoir résoudre ce problème, de nombreuses solutions sont mises sur la table par tous les partis. L'UNPI de Côte-d'Or, l'union des propriétaires insiste sur les modalités de rénovation énergétique pour les passoires thermiques :

Il faut que MaPrimeRénov soit plus simple d'accès et qu'il soit plus facile de trouver des artisans et des matériaux pour faire sa rénovation énergétique

Jean Perrin, président de l'UNPI 21

Des mesures également demandées par la FNAIM, qui souhaite également que les politiques mettent en place la possibilité de défiscaliser, pendant 10 ans, les revenus locatifs.

De son côté, la CLCV demande à ce que "tous les acteurs de la politique du logement se mettent autour d'une table pour discuter, et pour réaliser une véritable enquête sur les raisons de cette crise". Ce 30 janvier, le Premier ministre Gabriel Attal a dévoilé son plan pour rendre le logement social accessible aux classes moyennes. Le gouvernement souhaite notamment revoir la loi SRU, qui prévoit que les communes doivent atteindre 20 ou 25 % de logements sociaux. Gabriel Attal promet également de "simplifier massivement les normes" sur les DPE, l'accès à MaPrimeRénov' et les délais de procédures.

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