Les deux suspects arrêtés jeudi près de la frontière espagnole ont été présentés au tribunal judiciaire ce lundi 4 décembre. De même que quatre autres personnes que le parquet soupçonne d'être impliquées dans cette affaire qui a fait un mort fin novembre, quartier Stalingrad à Dijon.
Ce ne sont pas deux, mais finalement six personnes qui ont été présentées à la justice ce lundi 4 décembre, huit jours après les coups de feu qui ont causé la mort d'un homme dans un immeuble du quartier Stalingrad à Dijon.
La "base arrière" des tireurs identifiée
Le procureur de la République de Dijon, Olivier Caracotch, a donné des précisions lors d'une conférence de presse ce lundi après-midi. Les six mis en cause sont :
- les deux hommes arrêtés jeudi 30 novembre au matin, alors qu'ils s'apprêtaient à passer la frontière avec l'Espagne à bord d'une Volkswagen Polo
- le propriétaire de la Polo
- un quatrième homme "ayant utilisé la Polo pour des achats de vêtements avant les faits", notamment des gants qui ont peut-être servi lors des tirs
- l'habitant d'un appartement où la police a saisi plus de 20 000 euros en espèces - "les enquêteurs supposent que ce logement a pu servir de base arrière aux auteurs des faits", précise le procureur
- un mineur, qui a reconnu avoir volé la voiture utilisée lors des tirs - il a été confondu par une trace retrouvée sur l'extérieur de la voiture.
Les gardes à vue des deux hommes arrêtés près de l'Espagne ont duré près de 96 heures. Ils nient leur implication dans les faits : concernant leur supposée fuite en Espagne, ils invoquent "un voyage d'agrément", indique le procureur.
Pour l'heure, aucun des autres mis en cause ne reconnaît son implication : seul le mineur "a reconnu le vol de la voiture, mais en expliquant qu'il ne savait pas que ce véhicule allait servir pour un acte criminel". Cette voiture (dont le modèle n'a pas été précisé) avait effectivement été déclarée volée avant le soir des tirs.
"On n'est pas sur des profils de délinquants très chevronnés"
Concernant le profil des suspects, ils sont "assez similaires" selon Olivier Caracotch : "On est face à des individus très peu, voire pas connus des services judiciaires. Ceux qui le sont, c'est en lien avec les stups, mais la plupart ont des casiers vierges. En tout cas, on n'est pas sur des profils de délinquants récidivistes et très chevronnés." Ils sont tous assez jeunes, le plus âgé est né au début des années 2000.
Les suspects étaient, cet après-midi, en cours d'audition par deux juges d'instruction qui décideront de leur sort. Le procureur, lui, a requis le placement en détention provisoire de quatre des six mis en cause. L'information judiciaire ouverte ce 4 décembre concerne de nombreux chefs d'accusation :
- meurtre en bande organisée
- association de malfaiteurs
- recel de malfaiteurs
- recel en bande organisée de vol
- vol
- infractions à la législation sur les stupéfiants
- non-justification de ressources
- refus de fourniture de codes de déverrouillage.
Un indice retrouvé dans la voiture volée
En conférence de presse, Olivier Caracoch a salué le travail "très rapide et très efficace" de la BAC de Dijon qui a réussi à pister le véhicule utilisé le soir des tirs. "Ce travail a permis de retrouver le véhicule indemne, sans dégradation, et l'exploitation qui en a été faite a permis de mettre à jour un certain nombre d'éléments".
En effet, c'est grâce à "un objet" trouvé dans ce véhicule volé que les enquêteurs sont remontés jusqu'à la deuxième voiture, la Polo "qui a tout de suite été mise sous surveillance" jusqu'à l'arrestation des deux premiers suspects jeudi matin à la frontière espagnole.
"Six gardes à vue, huit jours après les faits, on peut féliciter les services de la PJ"
Olivier Caracotchprocureur de la République de Dijon
Le directeur territorial de la PJ Philippe Dassonville, également présent à la conférence de presse, indique que "quasiment tout le service a travaillé sur cette affaire". Police scientifique, brigade de recherches et d'intervention : une cinquantaine de policiers ont été mobilisés, ainsi que les BRI de Marseille, Montpellier et Perpignan.
En revanche, les armes utilisées le soir des tirs n'ont pas été retrouvées. Ce que l'on sait, c'est que "plusieurs calibres" ont servi à tirer sur la façade de l'immeuble, note le procureur Olivier Caracotch.
Retour sur les faits
Dans la nuit du samedi 25 au dimanche 26 novembre vers minuit, la façade d'un immeuble de la rue Auguste-Blanqui essuie plusieurs tirs d'arme à feu. C'est là qu'un père de famille de 55 ans, dans sa chambre au premier étage, est mortellement touché par balle.
L'épouse, le fils et la fille de la victime sont dans d'autres pièces de l'appartement au moment des tirs. Lorsqu'ils découvrent la victime, il est trop tard. Sa fille témoigne dans la nuit, encore sous le choc : "On a entendu des coups de feu, ça a duré deux minutes et ça a repris. Tout le monde était couché par terre."
Mon frère est rentré dans la chambre et a crié “papa, papa”. J’ai su à ce moment-là qu’il était mort.
Fille de la victime
Les autres riverains témoignent tous de la même scène de chaos. "J’étais en train de dormir et j’ai entendu des tirs. On a vu une voiture partir. Il y a eu plusieurs passages, ils sont venus deux fois", raconte une habitante à France 3 Bourgogne.
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Rapidement, il apparaît que le quinquagénaire est une victime collatérale, visiblement touché par une balle perdue. Le quartier, lui, est connu pour être un point de deal : "Il y a déjà eu des incidents autour de ce lieu", déclare le procureur Olivier Caracotch le lendemain des faits.
En réponse, une unité spécialisée, la CRS 8, est dépêchée sur place dès le soir du dimanche 26 novembre. 100 policiers quadrillent le quartier pour "casser les trafics", indique le préfet de Côte-d'Or Franck Robine. "Les renforts nationaux nous permettent d'amplifier le fait de 'taper les points de deal". Il faut en permanence les gêner : grâce aux renforts, nous allons casser leur extension, et puis ensuite, de façon permanente, les effectifs locaux continueront le combat."
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La voiture incriminée retrouvée lundi
Dans l'après-midi du lundi 27 novembre, la voiture supposément utilisée le soir des tirs est retrouvée dans un box au cours de perquisitions menées dans le quartier Stalingrad et aux Grésilles. En parallèle, une vingtaine d'autres opérations anti-drogue sont menées dans l'agglo dijonnaise, notamment à la Fontaine-d'Ouche.
Les deux premiers suspects, eux, sont arrêtés trois jours plus tard au poste-frontière du Boulou, alors qu'ils s'apprêtaient à passer en Espagne.