Bruno Le Maire, le ministre de l'Économie et des Finances, estime pouvoir récupérer près de 10 milliards d'euros en partie en limitant les dépenses de santé liées aux arrêts de travail. Un médecin de Côte-d'Or dépeint la situation des patients qui ont recours aux arrêts maladie.
Ces dernières années, les arrêts de travail n'ont fait que se multiplier. Les chiffres annuels sont passés de 6,4 millions en 2012 à 8,8 millions en 2022. Face à ce constat, Bruno Le Maire, ministre de l'Économie et des Finances y voit une opportunité de récupérer des fonds.
"Est-ce que quelque chose justifie que les arrêts maladies aient augmenté de 30 % au cours des dernières années ? Ça représente une dépense totale de 16 milliards d’euros par an", expliquait-il par exemple ce lundi 19 juin.
Réelle possibilité ou nouvelle occasion de voir l'opposition se dresser face au gouvernement ? En tous cas, rien n'est encore acté, mais Aurélien Vaillant, médecin généraliste à Seurre (Côte-d'Or) et vice-président du syndicat de Bourgogne-France-Comté de Médécin Généraliste France (MG France), nous décrit son quotidien et la situation liée aux arrêts maladie.
Les problèmes psychologiques et leur impact
Le nombre d'arrêts de travail a été inévitablement impacté par la crise Covid. Aurélien Vaillant en voit encore les traces aujourd'hui : "Certains ont du mal à reprendre la dynamique et le rythme de vie du travail. Il y a eu aussi beaucoup de réorientations et ça ne se passe pas toujours bien pour ces personnes dans leurs nouvelles activités. Enfin, il y a les postes vacants et ce sont ceux qui restent et doivent compenser qui souffrent de la situation."
"Plusieurs patients par jour viennent nous voir pour des problèmes psychologiques. On fait notre maximum pour les aider, mais ensuite on leur fait bien comprendre que ce n'est pas toujours un problème de santé."
Aurélien Vaillantmédecin généraliste et vice-président de MG France BFC
De nombreuses raisons peuvent pousser à consulter dans le but de se voir accorder un arrêt de travail. Pathologies classiques évidemment, mais aussi maladies chroniques en tête de proue... Pourtant les problèmes psychologiques remportent la palme, selon le vice-président de MG France Bourgogne-Franche-Comté.
"Quand il y a un problème avec l'environnement professionnel, comme un souci avec les ressources humaines, avec son patron ou le poste occupé, les patients viennent vite nous consulter", assure-t-il. "Depuis le Covid, il y a de plus en plus de cas de dépressions et d'anxiété."
"Ce n'est que le début"
Plus qu'un épisode porté par l'après-Covid, pour le médecin seurrois, c'est un problème de société et même un facteur générationnel.
"On a une génération Z qui a été sur les écrans depuis sa naissance", contextualise-t-il. "Je n'en fais pas une généralité, mais une partie d'entre eux ne sont pas habitués à avoir un cadre comme celui d'une entreprise, il y a d'ailleurs des managers spécialement formés pour eux. Et ça ne se passe pas toujours bien, c'est difficile pour eux et tout de suite on se retrouve avec de la souffrance psychologique qui amène vers l'arrêt de travail."
"Pour la génération actuelle il est déjà presque trop tard. En revanche, il faut agir auprès des plus jeunes pour améliorer la situation."
Aurélien Vaillantmédecin généraliste et vice-président de MG France BFC
Si le problème tend à se généraliser avec les plus jeunes, le nombre d'arrêts maladies augmenterait encore. "Ce n'est que le début", assure Aurélien Vaillant qui voit de plus en plus de nouveaux cas. En revanche, l'annonce de Bruno Le Maire du 19 juin, pourrait à elle seule permettre de diminuer légèrement les demandes d'arrêt de travail.
"On l'a vu avec François Fillon qui voulait mettre un jour de carence sur les arrêts maladie en 2011, on avait eu une baisse des arrêts", reconnaît le médecin généraliste. Pour l'heure, rien n'est effectif et la proposition sera soumise à débats. Affaire à suivre donc.