La cour d’assises du Doubs juge jusqu'au 20 décembre 2024 trois hommes, dont un absent, toujours en fuite. Ces hommes sont accusés d'avoir assassiné "par erreur" Houcine Hakkar, le 8 mars 2020, à Besançon (Doubs), abattu au volant de sa voiture. Notre journaliste Antoine Comte est présent à l'audience ce mercredi 18 décembre.
Pour suivre l'ordre chronologique de l’audience, nous vous conseillons de descendre en bas de la page.
► Revivez le premier jour du procès dans cet article.
► Les temps forts du deuxième jour du procès dans cet article.
9 h 30 : Nadjib Ziani est un des membres du clan Picardie visé le 6 mars 2020 par des balles tirés par le clan adverse, le clan "de la Tour". Une fusillade jugée comme déclencheur de l'assassinat du 8 mars. Confronté aux messages qu'il avait envoyé le 6 mars, où il écrivait qu'il fallait "faire une dinguerie", M.Ziani annonce "qu'il avait dit ça sous le coup de l'émotion" et que ce n'était pas un appel au meurtre.
9 h 25 : "Vous souvenez-vous d'une conversation que vous avez eu en prison avec Samy Khaldi, le frère de Rabah Khaldi, où vous désignez "Le B" et "Microbe" comme les assassins d'Houcine Hakkar" demande Delphine Thibierge. "Oui je m'en souviens" déclare Ziani.
Melk c'était le conducteur, et Basbas le tireur. Je le sais car j'étais sur la conversation PGP avec eux. Il y avait des messages audios et écrits.
Nadjib Ziani,membre du clan Picardie actuellement incarcéré
9 h 19 : Nadjib Ziani, jugé en mars 2023, est en train de purger une peine de sept ans de prison pour violences aggravées et trafic de stupéfiants. La présidente de la cour d'assises rappelle son rôle au sein du clan Picardie. Nadjib Ziani aurait envoyé des messages sur les mêmes conversations PGP que les deux assassins présumés.
9 h 17 : Ziani est invité à donner sa version. Dans le box des accusées, Elias Basbas le fixe intensément. "J'ai reconnu les faits, c'était Elias le tireur et Bilel [Melk, NDLR] le conducteur" déclare-t-il d'emblée.
9 h 15 : L'audience est reprise alors que les accusés font leur entrée dans leur box. La présidente de la cour d'assises, Delphine Thibierge, commence à interroger via visioconférence Nadjib Ziani, membre du clan Picardie actuellement incarcéré. Il déclare connaître les trois accusés.
9 h 10 : Bonjour à tous et bienvenue pour la 3ᵉ journée du procès de l'assassinat d'Houcine Hakkar, à la cour d'assises du Doubs, à Besançon. Ce mercredi 18 décembre 2024, la salle d'audience a changé. Le procès a désormais lieu dans une salle plus petite en raison de problèmes techniques, mais également de l'ambiance tendue qui a accompagné les débats la veille, mardi 17 décembre. Aujourd'hui, le public est moins nombreux : seule une dizaine de personnes ont été autorisées à entrer.
Le troisième jour du procès des assassins présumés d'Houcine Hakkar doit débuter à 9 h 15.
Il s'agit d'une journée cruciale qui pourrait nous plonger dans l'univers même des clans de narcotrafiquants. En effet, l'un des chefs du clan "de la Tour", Omar Abdou, sera entendu par la cour en visioconférence depuis sa prison, de même que Samy Khaldi, qui appartient lui au clan opposé, le clan Picardie, et qui a refusé de se déplacer à la cour d'assises le 17 décembre.
En plus de ces deux dépositions, d'autres membres du clan Picardie, tous incarcérés, témoigneront. Leur nom est déjà revenu dans plusieurs pièces à conviction de cette affaire. Enfin, un des moments les plus attendus arrivera avec les interrogatoires des deux accusés présents. Pour rappel, si Melk Ghezali a reconnu sa participation dans l'assassinat d'Houcine Hakkar, Elias Basbas, lui, continue de nier.
Que s'est-il passé lors du 2ᵉ jour du procès ?
Mardi 17 décembre 2024 s'est déroulée la deuxième journée de ce procès d'assises. La matinée a débuté par les dépositions de plusieurs experts : le médecin-légiste ayant pratiqué l'autopsie d'Houcine Hakkar et l'examen médical de son ami Rabah Khaldi, une experte chargée de l'étude de différents fichiers sonores et un expert en balistique.
La suite de la journée a vu s'installer une ambiance très pesante dans la salle d'audience. Alors que des problèmes techniques ont émaillé les débats, la cour a entendu les témoignages de plusieurs témoins : élément important, l'un d'entre eux estimait avoir vu Rabah Khaldi quitter la voiture d'Houcine Hakkar avec une arme, ce que Rabah Khaldi, lui aussi interrogé ce mardi, niera en bloc. Celui qui était avec la victime au moment du meurtre a, dans sa prise de parole, retracé les événements du 8 mars 2020 et sa relation avec Houcine, avant d'évoquer des menaces qu'on lui a envoyées pour qu'il retire sa plainte.
Symbole de cette "loi du silence" qui semble régner chez les narcotrafiquants bisontins, la compagne d'un des accusés, Melk Ghezali, a également été entendue et a pu faire état des pressions qu'elle subit depuis de longues semaines. Les avocats de la défense ont aussi pointé du doigt les nombreuses menaces et intimidations qu'auraient reçues leur client.
Comme pour accréditer toutes ces déclarations, un homme, le petit frère de Mohamed Mordjane (le troisième accusé toujours en cavale), qui était présent dans le public, s'est fait exclure de la salle après qu'on lui ait reproché d'avoir fait un signe d'égorgement à l'adresse des accusés. La journée s'est conclue dans la confusion avec le témoignage rempli d'émotions de Zora Hakkar, la mère d'Houcine Hakkar. Juste après, l'audience a été une nouvelle fois suspendue après des disputes dans le public et parmi les parties civiles, montrant des dissensions au sein même de la famille Hakkar.
► (Re)lire le déroulé complet de la deuxième journée du procès.
Que s'est-il passé lors du 1ᵉʳ jour du procès ?
Lundi 16 décembre a débuté à la cour d'assises du Doubs, à Besançon, le procès des assassins présumés d'Houcine Hakkar. Elias Basbas, Melk Ghezali et Mohamed Mordjane (en fuite), membres d'un groupe de trafiquants de drogue, le clan Picardie, sont accusés d'avoir tué par erreur ce mécanicien de 22 ans après une course-poursuite. Ils se seraient trompés de cible.
Lors de l'ouverture de la première journée du procès, Melk Ghezali a reconnu les faits qui lui sont reprochés, tandis qu'Elias Basbas niait en bloc. La cour a ensuite entendu un premier témoin, Patrick Melon, directeur de l'enquête lancée sur cette affaire, qui pendant plusieurs heures a détaillé ses investigations et a répondu aux questions de la présidente de la cour d'assises et des avocats.
Des enregistrements audios et vidéos ont été diffusés pendant le procès, dont l'appel de détresse poignant de Rabah Khaldi aux forces de l'ordre. M.Khaldi, passager de la voiture d'Houcine Hakkar au moment des faits, était avec la victime au moment de sa mort. Il a survécu malgré des blessures par balle. À la fin de journée, les deux sœurs d'Houcine Hakkar, Abir et Wabissa, toutes deux parties civiles, ont été entendues par la cour et ont livré un témoignage poignant.
► (Re)lire le déroulé complet de la première journée du procès.
Qui sont les accusés jugés par la cour d’assises ?
- Mohamed Mordjane : tête du réseau de trafiquants de drogue, dit clan “Picardie", il est toujours en fuite.
- Melk Ghezali : il conduisait le soir du drame la voiture qui a pris en chasse celle d’Houcine Hakkar. Melk Ghezali a été arrêté en Espagne en mai 2021, puis extradé en France.
- Elias Basbas : il est le tireur présumé qui a froidement tiré plusieurs balles sur Houcine Hakkar et tenter d’assassiner également son passager
Ils sont mis en examen pour assassinat, tentative d’assassinat et complicité de tentative d’assassinat.
"Putain monsieur, on va mourir" : on vous résume cette tragique affaire
Au printemps 2020, la guerre des trafiquants de drogue fait rage à Besançon. Deux clans se disputent les points de deal dans le quartier de Planoise, le clan de “de la tour” et le clan “Picardie”. Au fil des semaines, les accrochages entre rivaux se multiplient. 10 blessés. Jusqu’à ce soir-là, celui de la vengeance soigneusement programmée. Les trafiquants mènent l'opération en échangeant sur un réseau crypté.
Une semaine avant le confinement, le 8 mars 2020 vers 21 heures, pensant avoir repéré leur cible, deux hommes prennent en chasse une voiture Mégane bleue sur l’avenue Siffert. Le passager tire de multiples coups de feu. Les occupants de la Megane ont le temps d’alerter les policiers. Les enregistrements sont glaçants : “On est en train de se faire tirer dessus !”, “On est en voiture monsieur, dépêchez-vous, ils sont derrière nous, c’est une Mégane 5 rouge”, “Putain, monsieur, on va mourir, bordel, on va mourir, on va mourir monsieur”.
Quelques instants plus tard, la voiture d’Houcine Hakkar s’encastre contre un feu de signalisation. Les poursuivants achèvent leur sinistre mission. Houcine Hakkar, qui essayait ce soir-là la voiture d’un ami est tué de plusieurs balles dont une en pleine tête. Le véhicule du jeune mécanicien est criblé de 28 impacts de balles. Son passager en réchappe par miracle.
Dans la soirée sur le réseau crypté, les trafiquants vont se rendre compte qu’ils ont abattu la mauvaise personne. Un innocent.
Déjà lourdement condamnés par la justice, les trois hommes jugés lors de ce procès devant les assises du Doubs encourent une peine de réclusion à perpétuité.