La Maison Verte de Besançon (Doubs) fermera ses portes en décembre 2024. Pendant trente ans, enfants et parents en difficulté y ont été accueillis sans rendez-vous pour se libérer par le jeu et le dialogue, selon les préceptes de la psychanalyste Françoise Dolto.
Cela allait faire trente ans que des enfants, seuls ou accompagnés de leurs parents, poussaient la porte de la Maison Verte de Besançon en recherche de soutien.
Il leur faudra bientôt toquer ailleurs : cette grosse bâtisse du quartier Battant fermera définitivement ses portes pendant les vacances de Noël, à la fin de l’année 2024.
Si d’autres structures sauront les accueillir en ville, la fermeture de celle-ci marque la fin d’une méthode d’accueil et de suivi "à la Dolto" qui manquait visiblement d’attractivité pour les professionnels, à Besançon.
Sans rendez-vous
Un adolescent pouvait venir seul et sans rendez-vous à la Maison Verte. Parents et enfants y étaient aussi accueillis sans condition, moyennant une participation financière libre, à la sortie.
“On ne leur donne pas de guidance, ni de marche à suivre”, commente la présidente de l’association bisontine Mireille Sauze. “Certains restent très peu de temps. Ils trouvent ce qu’ils peuvent modifier par eux-mêmes et repartent”.
C’est sur ce modèle que la réputée pédiatre et psychanalyste Françoise Dolto a fondé la première Maison Verte, à Paris, en 1979. D’autres ont par la suite fleuri dans l’Hexagone. En 1995, celle de Besançon voit le jour sous l’impulsion du président du département de l’époque, Claude Jeannerot.
"Un lieu d’échange et d’ouverture"
Depuis six mois, François y amène son fils de cinq ans un vendredi sur deux après l’école. Ce Bisontin cherche à “canaliser” son enfant, devenu “hyperactif et tête de mule depuis la séparation”.
“C’est vraiment un lieu d’échange et d’ouverture” selon ce père de famille “déçu” de la fermeture. À la Maison Verte, son fils “joue”, “construit des parcours” et “s’ouvre aux autres" alors qu’il n’est "pas très causant” le reste du temps. “Il adore”, au point de demander chaque matin à son père “si aujourd’hui est le jour de la Maison Verte”.
Pour François, c’est aussi l’occasion d’échanger avec des professionnels et d’autres parents. De “relativiser”, parfois, sur sa propre situation. Après la fermeture, il compte amener son fils dans le cabinet d’un psychologue qui intervient dans la structure. Mais ce sera moins souvent car “ce n’est pas le même budget”.
Un modèle exigeant pour les professionnels
Ce modèle qui fait la réussite de la Maison Verte est aussi celui qui l'a mise en difficulté. Il demandait en effet aux soignants d'avoir fait une psychanalyse et de suivre une formation continue sur leur temps personnel.
À cela s’ajoutaient des horaires de travail (après l’école et le week-end) peu attractifs pour les professionnels de santé. “Quand ils trouvaient des contrats à temps plein, certains partaient” et “on a eu de plus en plus de mal à recruter”, conclut Mireille Sauze.
Le serpent s’est ainsi mordu la queue : moins de professionnels, moins de temps d’accueil, moins de familles… Entre 2022 et 2024, les plages d'accueil pour les grands enfants sont passées de 6 à 4 par semaine, de 5 à 3 pour les moins de six ans.
D'autres lieux d'accueil à Besançon
Considérant le service délivré à moitié, Mireille Sauze et ses collègues se sont résolus à fermer “la mort dans l’âme”, en février 2024. “Dieu merci” selon l'expression de la présidente de l'association : il existe des Lieux d’accueil parents enfants (LAEP) “presque dans chaque quartier” de Besançon.
Ceux-là répondent davantage à la tendance plus actuelle de l'éducation positive. Mais l’essentiel reste que ces enfants trouvent une oreille attentive, selon Mireille Sauze.
Anciennement psychiatre au centre hospitalier spécialisé de Novillars, elle n’a cessé de se le dire, et continue de le croire “certains auraient pu s'en sortir si on les avait écoutés plus jeunes.”