L'agresseur d'un médecin généraliste fin janvier à Audincourt (Doubs) a été reconnu coupable ce mardi 27 février 2024 par le tribunal correctionnel de Montbéliard. Il devra effectuer un stage de citoyenneté. Près d'une vingtaine de praticiens sont venus en blouse banche soutenir leur confrère.
Ils ont enfilé leur blouse blanche devant le tribunal de Montbéliard (Doubs). Tout un symbole. Ils étaient une vingtaine de médecins généralistes à venir soutenir leur confrère, agressé fin janvier dans son cabinet d'Audincourt (Doubs).
Son agresseur, un homme, âgé de 68 ans, originaire du Territoire de Belfort, devait être jugé en comparution immédiate le 8 février dernier. Il avait finalement obtenu un délai pour préparer sa défense. Il a été déclaré coupable ce mardi 27 février à Montbéliard (Doubs) de violence sur personne chargée de service public et condamné à réaliser un stage de citoyenneté. Il a en outre interdiction de se rendre dans ce cabinet médical pendant deux ans. Paul-Edouard Lallois, le procureur de la République, avait, lui, requis quatre mois de prison avec sursis. Il écopera aussi d'une amende qui sera fixée ultérieurement.
L'homme n'avait pas d'antécédents judiciaires. Lors de sa garde à vue, il avait tout contesté et affirmé s'être senti "agressé par le médecin et avoir voulu se défendre" .
Agressé dans son cabinet
Les faits remontent au 30 janvier 2024. Une patiente ce jour-là est en retard. Selon le généraliste, la secrétaire a proposé de reporter le rendez-vous. Le ton est monté. "Il m'a attrapé par le bras, m'a fait tomber sur le sol et il est tombé avec moi", avait précisé le médecin généraliste à France 3 Franche-Comté. "C'est un petit monsieur qui avait l'air plutôt sympathique initialement. Enfin, quand on le voit comme ça dans la rue, on ne se dit pas que c'est un patient qui va venir agresser un médecin." C'est la troisième fois qu'il subit des violences depuis son installation en 2021. Il avait fermé son cabinet plusieurs jours pour dénoncer ces violences injustifiées.
Je pense que j’ai bien fait de porter plainte et d’aller jusqu’au bout parce que malheureusement ce sont des agressions répétitives, vraiment quotidiennes. Il est temps de faire bouger les choses devant ces agressions.
Dr Baris Cecen, médecin généraliste à Audincourt (25).
Ses confrères font le même diagnostic. Mais leurs alertes restent souvent sans réponse comme l'expliquent les praticiens mobilisés ce mardi à ses côtés. "Là, on en arrive à des agressions physiques, des menaces de mort aussi chez certains de nos collègues, déplore Liliana Borges, médecin généraliste à Grandvillars (Territoire de Belfort). On ne peut plus laisser passer, il faut vraiment faire quelque chose. On adore notre métier, on aime bien aider les gens, nos patients, mais pas dans ces conditions-là non plus."
Des médecins qui espèrent aujourd'hui non pas un traitement de choc mais une plus forte réaction judiciaire. "Je pense que les patients qui agressent un médecin doivent rendre des comptes, c'est indispensable, insiste Frédérique Nassoy-Stehlin, présidente de l'Ordre des Médecins du Territoire de Belfort. Parce que les médecins aujourd'hui ne comprennent pas que, malgré le Plan interministériel de lutte contre les violences faites aux professionnels de santé, et toutes les annonces qui ont été faites, sur le terrain, le compte n'y est pas et on en est très loin."
Un contexte qui a pesé lourd en tous les cas lors de cette audience assez particulière. "Il y a des violences au sein des cabinets médicaux, admet Maître Rosa-Salomé Kupper, avocate de la défense, mais mon client ne doit pas servir d’exemple à tout prix."
Agressions en série
Cette agression est en effet loin d'être un cas unique. Jeudi 1er février 2024, un médecin du cabinet SOS Médecins d'Auxerre (Yonne) a été agressé verbalement dans ses locaux, en pleine consultation. L'agresseur a été interpellé par la police. Il s'agissait de la deuxième agression en deux mois dans ce cabinet. Le 15 décembre dernier, un praticien avait en effet déjà été frappé en pleine consultation dans ces mêmes locaux par le conjoint d'une patiente. Les coups reçus lui ont valu dix jours d'arrêt de travail. Il a lui aussi déposé plainte. Cette affaire devait être instruite par le tribunal d’Auxerre lundi 26 février. Mais la justice a décidé de renvoyer le dossier au 29 avril prochain.
Les agressions de médecins sont en hausse partout en France. En 2022, le Conseil national de l’ordre des médecins a recensé au moins 1 244 médecins agressés dans notre pays, soit 23 % d’incidents supplémentaires en un an.
Un observatoire de la sécurité a été créé par le Conseil national de l'Ordre des médecins en 2002. Il publie chaque année depuis une enquête qui recense les violences faites aux médecins à partir des déclarations adressées par les praticiens à leur conseil départemental. 75% des incidents seraient directement liés à l’acte médical. "Ils sont d’abord le fait du patient ou de son entourage, précise l'Ordre. La plupart portent sur le retard dans la consultation ou le rendez-vous, le refus par le médecin de délivrer un document ou un dossier attendu par un patient, le reproche d’un patient quant à la consultation ou l’acte."