Un médecin généraliste a été agressé mardi 30 janvier 2024 dans son cabinet à Audincourt (Doubs). C'est la troisième fois qu'il subit des violences depuis son installation en 2021. Il dénonce l'agressivité grandissante des patients quand il leur refuse des prescriptions ou des arrêts de travail.
Son cabinet est fermé jusqu'à nouvel ordre. Installé depuis 2021 dans le quartier des Forges à Audincourt (Doubs), le Dr Baris Cecen a été violemment agressé mardi 30 janvier 2024. Ce jour-là, une jeune femme se présente en retard à un rendez-vous. Elle est accompagnée de son beau-père. La secrétaire médicale propose de décaler la consultation afin de ne pas pénaliser les autres patients. Le ton monte. Alerté par le bruit, le jeune médecin s’interpose.
"C'est là qu'il m'a attrapé par le bras, qu'il m'a fait tomber sur le sol et qu'il est tombé avec moi, raconte le médecin généraliste à France 3 Franche-Comté. C'est un petit monsieur qui avait l'air plutôt sympathique initialement. Enfin, quand on le voit comme ça dans la rue, on ne se dit pas que c'est un patient qui va venir agresser un médecin."
Blessé à la hanche et au genou
Les policiers arrivent peu après et parviennent à calmer l’assaillant âgé de 68 ans. Résultat : une blessure à la hanche, une autre au genou et neuf jours d’Interruption temporaire de travail (ITT) pour le praticien. Depuis un an et demi qu'il a posé sa plaque ici, ce médecin a subi deux autres agressions. La première, de la part d'un patient qui était à la recherche d’un substitut narcotique. La seconde de la part d'une personne qui se trouvait dans l'incapacité de régler la consultation.
Le fait qu'il y ait de moins en moins de généralistes installés, que cela devient compliqué d'obtenir un rendez-vous le jour même pour une urgence, que cela devient compliqué tout simplement de trouver un médecin traitant, je pense que tout ça fait que les tensions augmentent un peu et que les gens n'acceptent pas qu'on leur refuse des choses.
Baris Cecen, médecin généraliste à Audincourt (Doubs).
Choqué, Baris Cecen s'interroge aujourd'hui sur son avenir. Diplômé en médecine esthétique et en pédiatrie, le praticien réfléchit à se spécialiser pour ne plus être confronté au grand public. "Se lever le matin avec la boule au ventre parce qu'on va au boulot, après toutes les études qu'on a faites, après tout ce qu'on a donné, confie-t-il, c'est vrai que ça fait se poser des questions quand même."
Son cas n'est pas isolé. Ce jeudi 1er février dans l'après-midi, un médecin du cabinet SOS Médecins d'Auxerre (Yonne) a été agressé verbalement dans ses locaux, en pleine consultation. L'agresseur a été interpellé par la police. Il s'agit de la deuxième agression en deux mois dans ce cabinet. Le 15 décembre dernier, un praticien avait déjà été frappé en pleine consultation dans ces mêmes locaux par le conjoint d'une patiente. Les coups reçus lui ont valu dix jours d'arrêt de travail. Il a déposé plainte
Explosion des violences contre les médecins
Il y a quelques mois, l’Ordre national des médecins s’alarmait d’une hausse très importante du nombre d’agressions à l’encontre des praticiens, +23% en l’espace d’un an. La région et le département du Doubs ne sont pas épargnés, comme le confirme Gilles Robert, le président de l'Ordre des médecins du Doubs.
Ces agressions sont de plus en plus fréquentes., c'est vrai. Ce même mardi 30 janvier, c'est la secrétaire médicale d'un ophtalmologue de Besançon qui a été agressée verbalement et menacée. Un autre praticien bisontin a même fait appel à un agent de sécurité pour se protéger.
Gilles Robert, président du Conseil de l'ordre des médecins du Doubs.
Des violences qui concernent tous les personnels soignants, médecins, kinésithérapeutes, infirmières ou sages-femmes. "Et même dans le cadre hospitalier", précise Gilles Robert.
Un observatoire de la sécurité a été créé par le Conseil national de l'Ordre des médecins en 2002. Il publie chaque année depuis une enquête qui recense les violences faites aux médecins à partir des déclarations adressées par les médecins à leur conseil départemental. 75% des incidents seraient directement liés à l’acte médical. "Ils sont d’abord le fait du patient ou de son entourage, précise l'Ordre. La plupart portent sur le retard dans la consultation ou le rendez-vous, le refus par le médecin de délivrer un document ou un dossier attendu par un patient, le reproche d’un patient quant à la consultation ou l’acte."
Pour mémoire, les violences physiques et verbales à l'encontre du personnel soignant sont aujourd'hui punies de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende.