Du champ à l'assiette : quel est le parcours du steak de boeuf que nous mangeons ?

A l'heure où la consommation de viande suscite des débats parfois houleux, nous avons voulu retracer le parcours de ce steak de boeuf que nous consommons régulièrement. Reportage en Haute-Saône. 

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Le contexte est difficile pour les métiers de la viande. La sécheresse est passée par là, la consommation est en baisse, les anti-viandes multiplient les actions. Eleveurs, abatteurs, bouchers, les acteurs de la filière ont accepté de nous montrer les coulisses de leurs métiers si particuliers. Le steak que nous mangeons  nourrit en fait  beaucoup de monde à commencer par les éleveurs de race à viandes.


Les races à viandes : une affaire de familles !


Si la Bourgogne est une célèbre terre d'élevage avec sa race charolaise, en Franche-Comté, c'est en Haute-Saône que l'on trouve le plus d'éleveurs de vaches dites "allaitantes" qui contrairement aux "laitières" ne sont pas soumises à la traite et qui allaitent leurs veaux. Ces vaches  comme la charolaise  mais aussi la blonde d'aquitaine sont destinées à la production de viandes. A  Vauvillers, aux portes des Vosges, Jérôme et Alexandre Rolin sont des spécialistes de la race  charolaise depuis trois générations. Ce sont des éleveurs naisseurs qui revendent leurs bêtes et notamment des taureaux à d'autres éleveurs. "On fait naître 250 veaux par an" précise Jérôme Rolin.

Avec son cousin,  ils sont les premiers  à intervenir dans cette filière viande et  sont donc au début  dans cette étonnante  "chaîne alimentaire". Puis il y a des des "naisseurs engraisseurs"  comme les frères Grelier à Fontenois -lès- Montbozon, là encore une affaire de famille. Benoît et Vincent élèvent des blondes d'aquitaine, une race réputée  pour sa tendreté et son goût, mais aussi plus rentable en terme de viande. Les deux frères qui veulent échapper à la pression d'un marché où les prix sont bas (moins de 5 euros le kilo), vendent leur animaux qui n'ont d'ailleurs jamais de noms, contrairement aux laitières  à un boucher grossiste de Luxeuil -les-Bains Frédéric Coste-Sarguet.

"On connaît le prix de départ et le prix d'arrivée et il n'y a pas de voleur ni de volé ! C'est comme une petite coopérative" ajoute Benoît Grelier.  Mais à chaque visite de Frédéric, c'est la fin du voyage pour une vache de l'élevage  qui est alors emmenée à l'abattoir de Luxeuil-les-Bains.
 


Au coeur de l'abattoir

C'est le lieu  le plus méconnu de la filière viande, celui qui suscite le plus d'interrogations et de polémiques. Il n'est pas simple en ce moment de filmer l'activité d'un abattoir et pourtant Nathalie Galmiche, la directrice de celui de Luxeuil-les-Bains a immédiatement accepté que nous montrions le travail difficile et éprouvant pour le visiteur des opérateurs de l'abattoir.

En France l'abattage traditionnel ou rituel des animaux est très réglementé. En abattage traditionnel, le bovin amené la veille dans l'écurie de l'abattoir, est conduit dans un boxe  puis assommé avec un pistolet d'abattage avant d'être suspendu puis saigné.  "On a 45 minutes pour éviscérer l'animal, pas plus, tout est cadençé" explique la directrice. L'abattoir de Luxeuil est le seul dans le département dédié aux bovins.

Chaque jour une dizaine de personnes s'emploie à tuer puis à découper les bêtes . "Certains ne tiennent pas, notamment  les jeunes qui ne veulent plus faire ce travail " raconte Alain Guyot. Ce chef d'atelier travaille ici depuis 35 ans. Les carcasses  après avoir été inspectées par un représentant des services vétérinaires  sont ensuite entreposées pendant  plusieurs heures.  Leur température doit redescendre à 7 degrés avant d'être livrées aux clients, des bouchers qui peuvent sur place commencer à découper et à "travailler" les pièces de viandes.
 


Le boucher, une denrée rare !

Après l'abattoir, les bouchers comme les Frères Coste-Sarguet à Luxeuil commencent à découper les carcasses et préparer ce steak que nous consommerons au bout de quelques jours ou de quelques semaines.

Ils possèdent une boucherie à Froideconche mais ils sont aussi grossistes et avec leur équipe  ils livrent  d'autres commerçes. " On commence tous les jours  à 3h30 du matin " explique Stéphane Coste-Sarguet en souriant.  Depuis des années , ils défendent le principe des filières courtes en boucherie et des élevages locaux.

Le problème est que le métier de boucher ne fait plus recette, le secteur manque de bras, des milliers d'emplois sont disponibles en France. Au CFA de Haute-Saône, à Vesoul, on forme justement cette denrée rare que sont les bouchers de demain. Des jeunes qui, comme Félicien, espèrent posséder un jour leur propre commerce même si la plupart travailleront en grande surface.  Des jeunes très motivés explique Pascal Colin le responsable du CAP de Boucherie devant ces élèves qui ce jour là s'emploient à  "façonner" gigots et épaules d'agneau. "Certains sont chasseurs, d'autres fils d'agriculteurs.. il y a souvent dans leur famille quelqu'un qui est déjà dans le métier"  précise-t-il avant de conclure : " C'est une formation ou il y a un emploi à la clé !".


Le goût de la viande

Dans le milieu de la viande et donc du steak, Claude Cornu est un personnage incontournable. Il est le délégué régional d'INTERBEV, l'association qui regroupe tous les acteurs de la filière viande bovine (éleveurs, bouchers, abattoirs etc..).

Une  filière qui est aujourd'hui la cible de militants vegan qui ne veulent plus que l'on consomme de viande du tout. Bref sa fonction est loin d'être simple, mais Claude Cornu relativise : "96 % des français consomment de la viande. Nous sommes des omnivores, si on enlève la viande on remet en cause notre équilibre alimentaire et cela pourrait poser des problèmes médicaux" ajoute-il. 

Quant aux amateurs de viande, ils revendiquent aujourd'hui des filières plus courtes, plus bio et des viandes plus tendres. Si les boucheries comme la grande distribution répondent de plus en plus à cette attente, dans les restaurants par exemple c'est loin d'être le cas. A Lure, le restaurateur Jean-Jacques Bayrand et son chef cuisinier Jacky Suire  ne proposent que de la viande locale à leurs clients. "J'aime savoir ce que je mange de l'élevage à l'abattage jusqu'a mon assiette" ajoute le propriétaire du restaurant. "Avec David Courtoy, je sais d'où vient la viande " ajoute-t-il . Le patron du "REX"  travaille en effet avec cet éleveur, un pionnier de la vente directe installé à  Ehuns. Et dans ce  restaurant mieux avoir de l'appétit  si l'on commende la potence de viande de boeuf la grande spécialité de la maison avec le steak.. bien évidemment !

 
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