28 000 litres de lait siphonnés, les agriculteurs de Haute-Saône s'en prennent à un camion de Lactalis

À quelques heures du Salon de l’Agriculture, les agriculteurs maintiennent la pression et leurs revendications face à l'industriel du lait. Dans la nuit du mardi 20 au mercredi 21 février, une trentaine de producteurs a vidé un camion-citerne transportant 28 000 litres de lait, près d'un site de collecte à Vallerois-le-Bois, en Haute-Saône.

Le rendez-vous avait été fixé par la FDSEA de Haute-Saône, à 21h45 à l’intersection de la D76/D26 et Vallerois-le-Bois. Un endroit stratégique qui est emprunté chaque soir par les citernes de lait de l’industriel qui possède un site de collecte à Loulans-Verchamps. Une trentaine d'agriculteurs a pris part au rassemblement.

 

Un camion transportant près de 28 000 litres de lait a été stoppé. Il était destiné à la fabrication de cancoillotte. Une partie du liquide a été déversé dans un champ, le reste a été redistribué aux éleveurs des environs pour nourrir les veaux. "Ce n'est pas un plaisir de voir notre lait jeté comme ça. On préférerait être chez nous, mais c'est le seul moyen de se faire entendre", assure Antoine Di San Tantonio, producteur de lait.

On le reprend. Ils ne sont pas capables de nous le payer au juste prix, donc on va le garder.

Louis Wicky

Producteur de lait

Michael Mulhmatter était également présent. Pour le président de la fédération des producteurs de lait de Haute-Saône, c'est une action justifiée tant la filiale litière est en danger. "On exprime notre désarroi face à un groupe qui refuse de payer le lait au juste prix. On veut des vraies négociations, que toutes les lois soient réellement appliquées, avec des vrais contrôles et des pénalités. Aujourd’hui, on est contrôlés tous les jours dans nos fermes. On ne comprend pas pourquoi de grands groupes ne sont pas contrôlés."

Malgré ces différents, il est difficile pour les producteurs de lait de mettre fin à leur collaboration avec le géant Lactalis. "Aujourd’hui, il est associé aux plus grandes marques françaises. C’est un acteur incontournable, on ne peut pas s’en passer. Quelques-uns ont quitté le groupe Lactalis, mais la majorité n’a pas le choix. Certains se posent sérieusement la question de quitter ces entreprises qui refusent de payer le lait à juste prix. On réclame 450 euros les 1000 litres au minimum."

Un prix rémunérateur pour le lait et les paysans


Les producteurs de lait en contrat avec Lactalis réclament un véritable prix de leurs traites pour une rémunération décente des producteurs. La colère est nationale. Mi-janvier, avant que les mobilisations nationales d'agriculteurs ne réclament entre autres de meilleurs revenus, des producteurs de lait avaient déjà manifesté devant plusieurs sites Lactalis de l'Ouest de la France pour dénoncer le prix de 405 euros pour 1.000 litres (soit 40 centimes le litre), fixé selon eux unilatéralement par le groupe et qui "ne tient pas compte du tout de la loi Egalim" qui prévoit "de la négociation et de l'intégration des coûts de production du lait sorti de nos fermes".

Le géant du lait a proposé une hausse de 15 euros les 1000 litres dès le mois de janvier et pour le mois de février. L'Union nationale des éleveurs livreurs Lactalis (Unell) qui fédère 11 organisations de producteurs et 5.200 éleveurs, a refusé indiquant qu'elle "ne peut pas accepter un tel niveau de prix alors qu'elle a proposé un compromis avec la reconduction du prix moyen 2023 sur le premier trimestre 2024 (soit 429EUR /1000L) pour rétablir un climat de confiance".

“Lactalis bafoue la loi Egalim”

Pour calmer la colère des agriculteurs, le Premier ministre Gabriel Attal a promis un "renforcement" de la loi Egalim, avec des "contrôles massifs" sur les industriels et les distributeurs, ainsi que des sanctions contre ceux qui ne respecteraient pas cette loi.

En Haute-Saône, la FDSEA estime que le groupe Lactalis “bafoue la loi Egalim”. Le syndicat exige  “que les enquêtes de la répression des fraudes (DGCCRF) sur les pratiques de Lactalis et des distributeurs soient rendues publiques et que les sanctions tombent. Depuis deux ans alors que les ¾ des contrôles (rapport « flash » de la Cour des Comptes) sur les négociations commerciales ont montré des infractions à la loi, aucune sanction n’a été prise” dénonce la FDSEA de Haute-Saône. 

Comment les producteurs peuvent comprendre cela, eux qui subissent toute l’année des contrôles avec à chaque erreur des retenues financières.

FDSEA de Haute-Saône

Lactalis, un empire mondial


Le groupe Lactalis, depuis l'acquisition en 2011 de l'italien Parmalat est le premier groupe laitier mondial. Avec plus de 28 milliards d'euros de chiffre d'affaires en 2022, Lactalis a détrôné un autre mastodonte, Danone.

Son chiffre d'affaires a quintuplé depuis 2000, année où Emmanuel Besnier, troisième génération à la tête de l'entreprise, en a pris les commandes.

Le groupe dont le siège est basé en Mayenne compte 270 sites de production dans 51 pays et 85.000 employés. Ses produits, dont les emballages ne portent aucune mention Lactalis, sont commercialisés dans 150 pays. Le groupe a fait l’objet mardi 6 février de perquisitions dans le cadre d'une enquête du parquet national financier (PNF) pour fraude fiscale aggravée et blanchiment de fraude fiscale aggravée, portant sur les années 2009-2020.

Avec AFP

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