Les incendies de la mi-août ont mis au jour la vulnérabilité des forêts du département du Jura, jusqu'ici épargnées par les flammes.
Leur horizon est en cendre. Depuis un mois, les habitants du hameau de Menouille (Jura) se réveillent avec l'odeur âcre du bois brûlé. "On dirait un désert", déplore Emmanuel, un riverain. "Aujourd'hui, on se demande combien de temps il faudra pour retrouver une végétation."
En cette rentrée, experts et syndicats forestiers se rendent sur place pour juger des dégâts et envisager l'avenir. "La forêt a été décimée sur des surfaces considérables", observe Florent Dubosclard, directeur de l'Office national des forêts du Jura (ONF). "Il va maintenant falloir identifier les zones qui ont une résilience naturelle, où la forêt va pouvoir renaître, et celles qui sont totalement sinistrées".
"On n'était pas préparé"
Par endroits, "il va falloir aider la forêt, voire entièrement la replanter", raconte Christian Bulle, président du syndicat des propriétaires de forêts privées Fransylva de Franche-Comté. "Beaucoup de ces sols sont pauvres. A tel point que nous ne retrouverons pas la forêt que nous avons connue avant des dizaines, voire des centaines d'années."
Un mois après la catastrophe, le responsable syndical lâche, amer : "On n'était pas préparé. Il y a eu un incendie en 2018 mais, depuis, rien."
Les feux de cet été caniculaire laissent un paysage en ruine et de nombreuses questions en suspens. Qui replantera ? Où ? Quelles essences utiliser pour rendre la forêt plus résistante aux incendies ? Et, surtout, qui paiera ?
Christian Bulle a fait ses comptes : "80% des hectares brûlés ne sont pas des forêts communales et ne dépendent pas de l'Etat. Il s'agit de forêts privées avec des propriétaires qui, pour la plupart, ne sont pas assurés contre le risque incendie." Fransylva a lancé, au niveau national, un appel aux dons avec la Fondation du patrimoine pour "sauver les forêts françaises". Mais, note Christian Bulle au delà de la question financière, "nous n'avons pas l'expertise dans la région".
Quels arbres replanter ?
Des experts de la défense de la forêt contre les incendies venus du Sud-Est vont tenter d'éclairer la lanterne des Francs-Comtois. "Mais, on ne va pas pouvoir appliquer les mêmes solutions partout", prévient Christian Bulle. "Les essences d'arbres du pourtour méditerranéen sont certes résistantes aux feux - avec une écorce plus épaisse par exemple -, mais elles ne sont pas adaptées aux hivers froids et aux gelées précoces."
Quels arbres sauront à la fois résister aux incendies, s'adapter aux caprices du climat de 2022 et aux catastrophes annoncées par les scientifiques pour les décennies à venir ? "Il y a des propriétaires qui se grattent la tête", souffle le président du syndicat Fransylva.