Témoignage. Victime sans doute d'un lanceur LBD, un Jurassien a saisi l'inspection générale de la police nationale

Publié le Mis à jour le Écrit par Sophie Courageot

Alain Hoffmann se bat pour faire reconnaître une blessure par un lanceur de balles de défense (LBD). Cet ancien militaire du Jura a entamé plusieurs procédures et confie son traumatisme de victime lors d'une manifestation des gilets jaunes à Paris le 1er décembre 2018.

Sa voix est calme. Le ton posé. Le traumatisme encore palpable. Alain Hoffmann, 53 ans a bien failli perdre la vie le 1er décembre 2018 à Paris sous l'Arc de Triomphe.  "Depuis ma blessure à la gorge, j'ai du mal à dormir, il n'y a pas une nuit où je ne rêve pas du brouillard des gaz lacrymogènes. Je suis suivi par un psychiatre et une psychologue" confie cet habitant de Morbier dans le Haut-Jura. 

Ce samedi là, il était monté à la capitale avec une quarantaine de gilets jaunes du Jura. "J'étais monté pour faire des photos pour les gilets jaunes de Champagnole" dit-il. "Près de la place de l'Etoile, on s'est retrouvés dans un brouillard de gaz lacrymogènes. Le groupe que nous étions s'est dispersé avec le bruit et le monde. Je me suis retrouvé seul sous l'Arc de Triomphe là. Avec un journaliste on s'est même mis à l'abri derrrière un poteau, ça pétait de partout" raconte-t-il. Peu avant 10 heures, Alain explique qu'il était en train de régler son appareil photo. Atteint par un projectile, il s'effondre brutalement. "J'ai ressenti un choc au cou, mon cerveau s'est arrêté, la douleur était immense, je me suis mis en boule sur un banc" se souvient-il.

Pris en charge très vite par un autre gilet jaune et par les street-medics, puis par les pompiers de Paris, Alain Hoffmann est transporté à l'hôpital Lariboisière. Il avoue avoir eu beaucoup de chance. "J'ai passé un scanner. Le chirurgien m'a dit qu'à 2 millimètres, ma carotide était atteinte et que je me serais vidé de mon sang".  Bilan, 9 points du suture, et une blessure encore en soin près de deux mois après.
 


Une plainte à la gendarmerie et auprès de l'IGPN


Revenu dans le Jura, Alain Hoffmann a déposé plainte auprès de la gendarmerie de Morez pour blessure par un flashball. Depuis, le Jurassien pense avoir été touché par un lanceur de balle de défense (LBD 40) tiré par des CRS. Il a déposé une requête à l'IGPN, l'inspection générale de la police nationale. Recontacté il y a quelques jours par ce service, il nous explique qu'il doit être prochainement auditionné à Paris ou dans le Jura. 
 

"En aucun cas je ne faisais partie des affrontements ce jour là... Certains vont chercher la violence, mais moi ce n'était pas le cas" assure-t-il. Il était monté à Paris avec un drapeau Made in Jura et un casque de ski et des lunettes pour se protéger. Cet ancien militaire dit attendre peu de choses des procédures lancées. Il n'a pas d'avocat pour le moment, pour des raisons financières et pense demander l'aide juridictionnelle pour se faire épauler. "Je suis juste en colère contre ceux qui ont donné l'ordre de tirer. On ne doit pas tirer les gens comme des lapins.... je me suis battu pour la France dans les années 80 au Tchad, là c'est la France qui m'a tirée dessus" dit-il amer alors que de nombreuses voix s'élèvent pour dénoncer l'utilisation des armes sub-létales.
 

"Savoir qui a tiré, ce n'est pas mon souci... on ne doit pas utiliser ces armes là. Un lanceur de LBD c'est un projectile qui peut atteindre 330 km/h" décrit le Jurassien.


"J'ai eu la trouille, je suis guéri de Paris"


Engagé dans le mouvement des gilets jaunes depuis les débuts, Alain Hoffmann ne veut plus monter à Paris. "Je suis guéri de Paris, j'ai été blessé, j'ai été placé en garde à vue deux semaines plus tard... j'ai la trouille. Mais j'ai continué à manifester à Besançon, Lyon, Dijon" dit-il toujours solidaire avec le mouvement des gilets jaunes. 
 

Bléssé et sous le choc, Alain Hoffmann n'a pas pu mettre la main sur la cartouche du probable lanceur de LBD qui l'a atteint et qui se trouvait dans son col de manteau. "J'ai eu de la chance de ne pas être défiguré, comme d'autres". L'ancien militaire qui s'occupe dans sa vie professionnelle d'enfants autistes, a aussi une passion, le dessin. "Je n'ai plus l'inspiration" confie-t-il. Il n'a toujours pas repris le travail. 

Comme Alain Hoffmann, d'autres dénoncent le traumatisme de ces balles de défense qui ont bouleversé leurs vies. Au 29 janvier, 51 personnes se sont manifestées par le biais d'un appel lancé par franceinfo pour retrouver des victimes de tirs de lanceurs de balle de défense. Parmi eux, Maxime, Cédric, Yann, et Vanessa ont accepté de témoigner.
 




 
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