À cause de fortes pluies qui tombent depuis octobre 2023, l'herbe a poussé en quantité dans les champs de blé de Franche-Comté. Résultat : une grande partie de la récolte des exploitants est perdue.
“C’est pas bien beau”, souffle Eric Morel, 56 ans, exploitant agricole de Pouilley-Francais (Doubs). Cette année, les agriculteurs qui cultivent le blé font grise mine. Leur céréale est envahie d’herbe. En cause : de la pluie quasiment tous les jours depuis la mi-octobre. “Ça fait 30 ans que je suis installé, c’est la première année aussi pluvieuse”, précise l’exploitant.
L’excès d’eau a fait repousser l’herbe au niveau des blés et a engendré un blé de moins bonne qualité.
Eric Morel, 56 ans, exploitant agricole et syndiqué à la FDSEA du Doubs
En tant normal, 90 à 95 % de son blé est utilisé en boulangerie. Là, une grande partie de sa récolte ira à la fabrication de nourriture pour animaux. Pour l’instant, l’agriculteur ne sait pas encore quelle proportion, parce qu’il ne vient que de commencer la moisson. Mais le quinquagénaire l’assure : “Sur le blé, on perd bien 60 % du chiffre d’affaires d’une année normale”. En plus, l’agriculteur est assuré sur la grêle, mais pas sur la récolte.
Un blé plein d'impuretés
Généralement, quand arrive le printemps, il fait plutôt chaud et sec. C’est dans ces conditions que le blé arrive à pousser et pas l’herbe. Cette année, cela n’a pas été le cas. Les rendements ont donc baissé en quantité et en qualité.
Ce phénomène ne se limite pas au département du Doubs. À Saint-Aubin, dans le Jura, Denis Bachut a aussi été touché. “Sur les parcelles humides, le ray grass [une espèce d’herbe] va pousser plus que le blé. Les herbicides qu’on a mis à l’automne ont mal marché et on se retrouve au printemps avec des herbes trop développées”, explique l’agriculteur. Résultat : une perte de rendement allant jusqu’à 30 %.
Le blé récolté sera plein d’impuretés. “Dans ce qu’on va livrer, il y aura des problèmes d’humidité”, souligne le Jurassien. Pour s’en sortir, l’agriculteur va devoir changer de céréales sur ces parcelles. “Je ne peux pas remettre du blé tout de suite, je vais mettre du maïs pour essayer de nettoyer les sols”, précise-t-il. Semer du maïs permettra de nettoyer les sols de l'herbe implantée.
Il perd entre 30 à 50 % de sa récolte
Michel Bouffaut, exploitant agricole dans le Jura, à Chemin, est également impacté. “On a jamais vu ça”, constate-t-il. Selon lui, les désherbages ont été inefficaces “parce que la pluie a tout lavé”. L’agriculteur regrette un dosage réglementaire des intrants trop léger : “On est obligé de les dépasser, il faut doubler la dose pour avoir une efficacité”.
Le sexagénaire finit bientôt sa moisson. Il assure avoir perdu entre 30 et 50 % de sa récolte et, selon lui, “les assurances récoltes couvrent très mal les risques”.
Des pluies aussi abondantes qu'en 1959
"En ce qui concerne la France, la période de 12 mois juillet 2023 - juin 2024 est la plus arrosée à l'échelle nationale depuis 2000/2001, soit depuis 23 ans", a écrit sur X (anciennement Twitter), François Jobard, météorologue originaire de Besançon (Doubs).
📊 Bilan climatique juin 2024
— Météo-France (@meteofrance) July 2, 2024
🌡️ Températures en moyenne conformes aux valeurs de saison.
🌧️ Pluviométrie excédentaire de +20% mais hétérogène selon les régions. Certains orages ont provoqué des inondations.
☀️ Ensoleillement déficitaire de -15%.
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Selon Météo France, depuis octobre 2023, la France a été soumise à des épisodes de précipitations abondantes. Entre le 1ᵉʳ octobre 2023 et le 11 mars 2024, les cumuls des pluies sont parmi les plus élevés sur la même période, depuis 1959 en Bourgogne-Franche-Comté.