Les parapluies de Donzy ne s'ouvriront plus : retour sur 100 ans de savoir-faire dans la Nièvre

L'usine historique de parapluies de Donzy, dans la Nièvre, ferme ses portes. La marque va perdurer, délocalisée dans le Jura et en Saône-et-Loire.

Depuis plus d'un siècle, elle faisait la fierté locale. L'usine de parapluies Guy de Jean, implantée à Donzy depuis 1920 (!) n'a pas résisté à 2023. Elle a fermé ses portes ce mardi 12 décembre, licenciant ses salariés. La marque, elle, perdure mais la production est délocalisée à Autun et Saint-Claude. C'est la fin d'une longue histoire familiale, toute une page de l'histoire de Donzy (Nièvre)  qui se tourne. France 3 s'était rendu sur place à plusieurs reprises. 

2000 : au beau fixe

Il y a 23 ans, le contexte économique était autrement plus favorable. En mai 2000, une équipe de France 3 Bourgogne pousse les portes de la fabrique de Donzy. Les dirigeants de l'entreprise familiale, Pierre et Catherine de Jean, peuvent avoir le sourire : les parapluitiers (oui, c'est le bon terme) de la Nièvre sont parmi les leaders français du secteur avec 11 millions de francs de chiffre d'affaires annuel. 

Un quart de leur chiffre est réalisé à l'export : Russie, Angleterre, Espagne, Japon... La marque Guy de Jean travaille aussi avec de grands couturiers, comme Jean-Paul Gauthier et Chanthal Thomass. Au moment de notre reportage, Chantal Thomass doit d'ailleurs se rendre sur place dans les jours qui viennent. 

"Ce qui me plaît, c'est de faire avec les couturiers une gamme de parapluies qui correspondent à leur ressenti de la mode", explique alors Pierre de Jean à nos caméras. "C'est une collaboration. Je sais faire un parapluie, je sais comment je le "sens"... et à partir de là, on arrive à faire des choses qui tiennent bien la route, je crois."

► Un reportage de Régis Guillon et Jean-Philippe Pazzani.

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ARCHIVES : reportage France 3 Bourgogne (mai 2000) ©Régis Guillon / Jean-Philippe Pazzini / Chantal Mathieu / FTV

2015 : légères perturbations

En 2015, Guy de Jean fait parler de ses parapluies avec un joli coup médiatique : l'entreprise offre un pépin made in France à François Hollande, alors président de la République, après son discours prononcé sous des trombes d'eau à l'île de Sein.

"On a reçu une lettre de remerciement", indique Pierre De Jean à nos caméras. Un encouragement bienvenu, car le contexte est légèrement moins favorable désormais. En 2015, l'usine nivernaise fabrique entre 40 000 et 60 000 parapluies chaque année, dont la moitié part à l'export. Mais depuis les années 2000, Guy de Jean a vu ses effectifs diminuer d'une dizaine de salariés.

Interrogé par France 3 Bourgogne, Pierre de Jean, qui incarne la troisième génération de dirigeants, explique qu'avec la crise, il aurait pu délocaliser mais qu'il a choisi de croire encore à l'excellence française. "La question, c'est : combien peut-on mettre pour un parapluie véritablement fabriqué en France ? Peut-on mettre 80 euros ? Sachant que la durée de vie sera plus longue, que les matières sont plus nobles et qu'on peut le retraiter facilement par rapport à un parapluie qui vaut 5 euros, que l'on jette et qui est une horreur à retraiter", argumente Pierre de Jean.

Mais combien de temps ce made in France peut-il encore durer ? C'est la question sous-jacente que pose notre journaliste dans la conclusion de son sujet. "Si Guy de Jean tire encore son épingle du jeu, l'industrie française du parapluie disparaît peu à peu. Et c'est aussi ce qu'a voulu dire le Nivernais, en adressant cet été un pépin de plus au président français..."

► Un reportage de Régis Guillon et Cécile Claveaux.

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ARCHIVES. Les parapluies de Donzy : chez Guy de Jean, mai 2015 ©Régis Guillon / Cécile Claveaux / FTV

2023 : la tempête

Deux décennies après notre premier reportage, c'est la fin de l'aventure à Donzy. En 2021, Pierre de Jean vend l'entreprise après 40 ans passés à sa tête. Il reste alors une douzaine de salariés. Le repreneur, Michaël Renaud, possède déjà une usine de parapluies à Autun, Neyrat. Après Guy de Jean, il rachète Vaux, à Saint-Claude dans le Jura.

Pierre de Jean accompagne la vente de son usine de Donzy pendant plus d'un an, persuadé que l'activité perdurera sur le site nivernais. Lorsqu'il apprend finalement sa fermeture, c'est la douche froide. "Je sais bien que rien n'est éternel en ce bas monde, mais ce n'est pas ce qui était prévu. Au contraire, Donzy devait être le site moteur", regrette le désormais retraité, joint par France 3 Bourgogne ce 12 décembre.

Depuis la Bretagne où il vit aujourd'hui, il déplore : "À Donzy, il y avait un vrai savoir-faire. Ce n'est pas un beau cadeau de Noël." L'ex-patron était de passage dans la Nièvre la semaine dernière. Vendredi, il est allé saluer le personnel de la fabrique de Donzy, toujours dévoué même à l'approche du licenciement. "Ils étaient tous à leur poste de travail", raconte Pierre de Jean. La poignée de salariés restante a définitivement quitté le site ce 12 décembre.

Le repreneur, Michaël Renaud, a déclaré au Journal du Centre"Depuis plusieurs années, le secteur du parapluie est sinistré. Guy de Jean représente un grand savoir-faire. Mais en moins de 10 ans, le chiffre d’affaires a été divisé par trois. Nous avons réfléchi à toutes les possibilités… La seule option était de fermer le site de Donzy."

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