UTMB 2023 : rescapé du Bataclan, Gaëtan Honoré court pour "se réapproprier sa vie"

Gaëtan Honoré, Nivernais survivant des attentats du 13 novembre 2015, participe le 1er septembre à l'Ultra-trail du Mont-Blanc, la reine des courses de trail. Une façon pour lui de "conjurer le sort", et d'aller "au-delà de ce qu'on pense possible".

171 kilomètres, 10 000 mètres de dénivelé positif. Le tour du massif du Mont-Blanc en passant par la France, l'Italie et la Suisse. Des heures de course, presque sans s'arrêter. Les plus rapides mettent 19 heures à passer l'arche d'arrivée à Chamonix, le maximum autorisé est de 46 heures 30.

L'Ultra-trail du Mont-Blanc, des milliers de traileurs en rêvent et le préparent chaque année. Ce 1er septembre, pour la première fois, Gaëtan Honoré fera partie des privilégiés qui ont obtenu leur dossard. Au-delà du mythe de cette course reconnue dans le monde entier, le défi a quelque chose de très particulier pour le Nivernais, rescapé des attentats du Bataclan en 2015.

"Ce n'est pas juste courir"

"Depuis le Bataclan, j'ai l'idée de donner du sens à cette vie, de vivre à fond", explique Gaëtan Honoré, joint par téléphone. "Avant le Bataclan, je courais déjà beaucoup, mais ça a pris une dimension vraiment différente. Ce n'est pas juste courir, ça va bien au-delà. C'est un cheminement personnel."

"Vous êtes seul face à votre destin, malgré les conditions physiques difficiles, le mental qui peut flancher. Courir de longues distances, c'est : être seul et trouver la solution. C'est comme pour le Bataclan, j'ai toujours considéré que la solution était en moi et pas en allant voir des groupes de soutien."

Gaëtan Honoré

Pour ce directeur d'école, le trail est une véritable thérapie, "une catharsis" : "c'est essayer de conjurer le sort, de se réapproprier sa vie, de reprendre le fil de son existence et d'aller au-delà de ce qu'on pense possible". La production d'endorphines pendant l'effort joue aussi.

"Pour moi, le corps n'a quasiment pas de limite. La seule limite, c'est le mental", affirme le quadragénaire, qui voit dans l'UTMB "quelque chose de l'ordre de l'expérience" mais également "une histoire d'émerveillement, la nature qui nous offre des paysages magnifiques". En effet, le trail sur les balcons du Mont-Blanc donne à voir la montagne dans son plus bel écrin.

La souffrance, aussi, fait partie de l'expérience. "Il y a le fait de ressentir physiquement les choses, d'avoir physiquement mal."

"Sentir son corps, c'est un mouvement de vie. Ça peut paraître bizarre, mais quand je rentre chez moi, le corps tout haché par une longue course, je me sens vivant."

Gaëtan Honoré

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Dix ans de préparation

Gaëtan Honoré songeait à l'UTMB bien avant la nuit du 13 novembre 2015. "Ça fait bien une dizaine d'années que je me dis : un jour, je le ferai." Pour être retenus, les candidats doivent courir un certain nombre de trails officiels pour accumuler des points, puis ils sont sélectionnés sur tirage au sort. Gaëtan tente sa chance depuis cinq ans et n'avait encore jamais été retenu. "Cette année, je n'y croyais vraiment pas du tout !"

Chamonix, Gaëtan Honoré y est allé pour un "petit séjour" il y a quelques années. Dans son quotidien loin des montagnes des Alpes, il s'entraîne dans les paysages vallonnés du Morvan. Deux ou trois fois par semaine, pas plus. Ce n'est pas un drogué du sport : il doit aussi composer avec sa vie de famille et son travail de directeur d'école, très prenant. 

"Quand j'hallucine, je vois des tortues"

En courant, "je pense à plein de choses. Je n'écoute pas de musique. Je réfléchis à ma vie professionnelle, à ma vie personnelle..." Le Nivernais n'a jamais couru aussi longtemps que les 171 km de l'UTMB, mais il est habitué aux longues distances (il a notamment couru 140 km autour d'Annecy en 2022). Surtout, il sait s'écouter. 

"Je sais que j'aurai des hallucinations à un moment donné. Quand je divague, je vois des tortues ! Des tortues de mer au milieu de la route. C'est un marqueur. Quand je commencerai à les voir, je saurai qu'il faut que je fasse une pause."

Gaëtan Honoré

Le Nivernais voit arriver l'UTMB avec "un peu d'appréhension", mais surtout beaucoup d'excitation. "C'est une formidable opportunité." Il pourra compter sur son épouse, sa soeur et son beau-frère, qui seront sur place pour l'accompagner. Gaëtan Honoré espère aussi apercevoir Killian Jornet, le Catalan superstar de la discipline.

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