Procès de Valérie Bacot : comment interpréter sa condamnation à quatre ans de prison dont trois avec sursis ?

Valérie Bacot a été jugée coupable de l’assassinat de son mari et condamnée à quatre ans de prison dont trois avec sursis, mais elle est ressortie libre du tribunal vendredi 25 juin. Selon ses avocates, c’est un verdict "de clémence" mais aussi "symbolique".  

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Le verdict est tombé. Après cinq jours de procès aux Assises de Chalon-sur-Saône, en Saône-et-Loire, Valérie Bacot a été condamnée à quatre ans d’emprisonnement, dont trois avec sursis. Elle a déjà effectué un an d’emprisonnement préventif entre 2017 et 2018, elle est donc ressortie libre du tribunal vendredi 25 juin. C’est un "verdict de clémence" selon ses avocates, Me Janine Bonaggiunta et Me Nathalie Tomasini.  

"Une peine moins sévère qu’elle ne le pensait"

Valérie Bacot "est condamnée pour assassinat, puisque la préméditation a été retenue", explique Me Janine Bonaggiunta. Mais c’est "une condamnation avec une peine moins sévère qu’elle ne le pensait", avance l’avocate qui raconte que sa cliente avait "préparé son sac" pensant aller en prison vendredi.

Pour l’assassinat de son mari Daniel Polette, Valérie Bacot risquait la prison à perpétuité, assortie d’une peine de sûreté de 30 ans. En amont du procès, les avocates avaient indiqué espérer obtenir une condamnation à dix ans d’emprisonnement. Vendredi, l'avocat général a demandé cinq ans de prison dont quatre avec sursis. Une condamnation sans réincarcération donc, estimant que l’accusée avait aussi été "une victime" de son mari violent.

Sous "emprise"

La notion d’emprise a notamment été au cœur des débats. Dès l'âge de 12 ans, Valérie Bacot est violée par Daniel Polette, qui est à l’époque son beau-père. Il est condamné mais réintègre le domicile familial en 1997. Valérie Bacot s’installe avec lui quand elle tombe enceinte, à 17 ans, après avoir été expulsée par sa mère. Pendant 24 ans, elle est battue, violée et prostituée par son conjoint, qui, expliquait-elle, menaçait de la tuer.  

Les avocates de Valérie Bacot ont soutenu qu’elle était déconnectée du réel au moment de tuer Daniel Polette, car elle était sous l'emprise de son mari, mais aussi victime des syndromes de Stockholm et de la femme battue. Une théorie qui n’a pas été retenue par la cour. "J’ai entendu qu’on ne retenait pas l’abolition du discernement, compte tenu du droit positif existant, je pensais que ce serait le cas", déclare Me Nathalie Tomasini.

"On y est presque"

"Mais tout de même, j’ai entendu madame la présidente évoquer une altération élevée du discernement, l’emprise, le syndrome de la femme battue... C’est tout ce que j’ai plaidé. C’est tout ce que je voulais qu’on retienne justement de ces femmes qui sont fracassées pendant des années dans le huis clos familial. Donc, on n’y est pas encore, mais on y est presque ", rapporte l'avocate.

"L'emprise, c'est quelque chose qui est difficile à appréhender", estimait samedi 26 juin sur franceinfo l'avocate Michelle Dayan, présidente de l’association Lawyers For Women (L4W). "Ce verdict ouvre la porte au législateur pour donner une place plus importante à l'emprise dans la protection des femmes victimes de violences intrafamiliales ou de violences conjugales".

Un procès symbolique

"C’est un nouveau combat, maintenant, pour toutes les autres femmes et toutes les maltraitances", a déclaré Valérie Bacot à la sortie du tribunal. Ce procès a particulièrement résonné dans une actualité marquée par le débat sur la lutte contre les violences conjugales. "Elle est devenue un symbole, il va y avoir une étude de cas dans les facultés, je peux vous le dire", avance Me Janine Bonaggiunta.

Valérie Bacot, surnommée la "nouvelle Jacqueline Sauvage", écope d’une peine plus légère que cette dernière. Jugée coupable du meurtre de son mari violent en 2014, Jacqueline Sauvage avait été condamnée à dix ans de prison avant d’être graciée en 2016 par le président François Hollande.

Les avocates de Valérie Bacot soulignent les différences entre ces deux affaires. "Jacqueline Sauvage était plus âgée que Valérie", analyse Me Janine Bonaggiunta. "Jacqueline a décidé d’épouser son mari. Valérie ne l’a pas choisi. Elle avait 12 ans lorsqu’il a commencé à la violer. Il y a une emprise qui a commencé beaucoup plus tôt", continue l’avocate, qui ajoute : "Il allait de plus en plus loin dans sa domination. La prostitution, c’est une vraie différence".

"La pression de la société civile"

Cette peine plus clémente est-elle également la preuve que les mentalités ont évolué au sujet des violences conjugales ? "Je le pense", répond Me Nathalie Tomasini. "Mais vous savez, une cour d’assises, c’est aussi plusieurs personnalités qui la composent. Nous avions une présidente très humaine, très rigoureuse, et qui a l’intelligence d’essayer de comprendre tous les nouveaux arguments qui peuvent être évoqués et de prendre le pouls de la société".

L’avocate souligne également le rôle qu’a joué "la pression de la société civile". "On a eu une pétition quand même, qui a rassemblé plus de signatures que pour Jacqueline Sauvage. Et puis il y a eu aussi la pression médiatique, qui est nécessaire, pour moi, car elle se fait l’écho de ce qui se passe dans la société", estime l’avocate.

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