Depuis dimanche 31 mars, de nombreux cours d'eau sont en crue en Bourgogne. Les dégâts sont considérables dans certains secteurs, notamment les bassins de l'Armançon et de l'Arroux, au point que l'on parle d'inondations historiques. On vous explique.
La décrue est engagée par endroits et laisse, derrière elle, d'importants dégâts. C'est le cas dans l'Yonne et en Côte-d'Or, notamment le long de l'Armançon, ainsi qu'en Saône-et-Loire, dans le bassin de l'Arroux. Au point que les sinistrés ou les élus des communes touchées évoquent des inondations "jamais vues" depuis des décennies... mais est-ce vraiment le cas ?
En se plongeant dans les archives de France 3 Bourgogne, on retrouve d'emblée des dizaines et des dizaines de références à des reportages tournés au fil des ans sur les inondations. Et pour cause : la région est traversée par de nombreux fleuves et rivières, parmi lesquels certains ont une propension certaine à sortir de leur lit. Coup d'œil sur les crues importantes des dernières décennies.
Janvier 2018 et juin 2016 : importantes crues de l'Armançon
L'Armançon fait justement partie de ces rivières capricieuses. Affluent de l'Yonne, dans le bassin de la Seine, elle traverse à la fois l'Yonne et la Côte-d'Or. Au cours de la décennie passée, elle a débordé plusieurs fois de façon catastrophique, notamment en janvier 2018 et en juin 2016.
Selon les informations de Vigicrues, on constate que, dans certaines communes, des records de crue ont été établis au cours de ces épisodes. C'est le cas, par exemple, à Brienon-sur-Armançon (Yonne), où la station a relevé un niveau d'eau de 4,49 mètres le 24 janvier 2018. Le 4 juin 2016, la rivière avait également grimpé jusqu'à 4,18 mètres. Mais ces chiffres sont désormais dépassés : dans la commune, l'Armançon a atteint 4,57 mètres de haut ce mercredi 3 avril.
Novembre 2016 : le bassin de l'Arroux sous l'eau
En 2016, quelques mois après l'Armançon, c'est au tour de l'Arroux de sortir de son lit. Les stations dissiminées tout au long de la rivière font état de niveaux d'eau particulièrement élevés par rapport à la moyenne le 23 novembre : 3,44 mètres à Digoin (Saône-et-Loire), 3,19 mètres à Étang-sur-Arroux, 1,74 mètres à Rigny-sur-Arroux.
► À LIRE AUSSI - Inondations en Bourgogne : "tu te dis que tout est foutu !", la détresse des victimes des crues à répétition
"Cette crue a été assez exceptionnelle pour l'époque", souligne François Lequeu, chef technicien au centre Météo France de Dijon. "En comparaison avec celle d'avril 2024, elle est cependant moins importante. Quand on voit les niveaux atteints, celle que l'on vit actuellement est absolument historique."
À titre de comparaison, sur les mêmes stations, l'Arroux est monté respectivement à 4,19 mètres, 4,15 mètres et 2,41 mètres. Des niveaux particulièrement élevés qui sont dus aux précipitations tout aussi importantes qu'a connues le territoire ces derniers jours. "En 24h ce week-end, il est tombé entre 40 et 50 millimètres", indique le météorologue. "C'est ce qu'il doit d'ordinaire tomber en un mois !"
2013 : la Bourgogne vit l'un de ses pires épisodes
Toujours dans les crues récentes, on se souvient de celles de 2013 qui ont émaillé le territoire bourguignon. En janvier et en mai, la plupart des cours d'eau de la région ont successivement débordé - l'Armançon et l'Arroux, évidemment, qui ont là encore atteint certains de leurs niveaux les plus élevés (3,83 mètres à Digoin ; 4,47 mètres à Brienon-sur-Armançon), mais aussi d'autres rivières d'ordinaire plus calmes, comme l'Ouche.
À l'époque, Dijon elle-même avait fait face à des inondations. Plusieurs quartiers de la ville s'étaient subitement transformés en rivière. Une situation qui se reproduit dans une moindre mesure en ce début d'avril 2024 : dans le quartier du port du Canal, les habitants se sont une nouvelle fois réveillés les pieds dans l'eau.
1982, 1970, 1965 : fortes pluies entraînent fortes inondations
Le siècle dernier fourmille lui aussi d'événements du même genre. Sur l'Arroux, certains des épisodes les plus impressionnants se sont produits entre le milieu des années 1960 et le début des années 1982, détaille François Lequeu. "1982 a par exemple marqué la crue la plus importante à Étang, avant celle d'avril 2024", ajoute le prévisionniste.
L'hiver 1969-1970 a quant à lui entraîné des débordements sur l'ensemble des rivières de la région, conséquence de plusieurs mois d'abord neigeux, puis particulièrement pluvieux. Pluie qui a également marqué le mois de septembre 1965, causant des crues importantes le 1er octobre.
Au demeurant, si la Bourgogne est habituée des inondations, la situation de ce début de mois est tout à fait exceptionnelle. "On remarque que les fortes pluies qui ont causé ces épisodes remontent de la Méditerranée, ce qui est inédit à cette époque de l'année.", explique François Lequeu. "D'habitude, c'est plutôt à la fin du printemps ou en automne."
Reste désormais à savoir si de tels événements pourraient être amenés à se reproduire régulièrement. Pour rappel, d'importantes crues ont déjà eu lieu en Bourgogne début mars 2024. Mais pour l'heure, "on ne dispose tout simplement pas d'assez de recul pour dire si cela va se reproduire régulièrement."