Féminicide dans l'Yonne : le parcours d'Angélique Clere, tuée par son ex-compagnon deux ans après sa première plainte

Mère de deux enfants en bas âges, Angélique Clere a été tuée par son ancien conjoint à Monéteau (Yonne) le 11 juin dernier. Originaire de la Nièvre, la jeune femme de 32 ans avait fait remonter plusieurs actes de violences conjugales à la gendarmerie.

Le vendredi 11 juin dernier, Angélique Clere était assassinée en pleine rue par son ex-conjoint à Monéteau (Yonne). Depuis le début de l’année, 55 femmes ont été tuées par leur partenaire ou leur ex-compagnon selon les chiffres du collectif Nous Toutes. Agée de 32 ans, la victime de ce nouveau féminicide était mère de 2 enfants et travaillait dans le milieu de la petite enfance.

"C’était quelqu’un de très sympa. Elle était douce, gentille, tout se passait bien avec elle", se souvient une employée du centre social de Montsauche-les-Settons (Nièvre). Angélique Clere y a travaillé en tant qu’animatrice pendant près de 3 ans, entre octobre 2011 et 2014.

Un bon contact avec les enfants

La jeune femme née en 1989 grandit dans la Nièvre. Une fois son baccalauréat professionnel obtenu, elle suit une formation de secrétaire à Nevers avant de s’orienter vers l’encadrement des plus jeunes. Elle passe alors son Brevet d’Aptitude d’Assistant Animateur Technicien (BAPAAT) et intègre dans la foulée le centre social de Montsauche-les-Settons grâce à un contrat aidé.

Son ancienne collègue se souvient d’une personnalité discrète mais qui appréciait le contact avec les plus jeunes. "Elle s’entendait très bien avec eux. Elle avait à cœur de travailler avec les enfants. Elle appréciait ça".

En 2014, Angélique Clere quitte son emploi pour déménager dans l’Yonne, aux Archies, un lieu-dit rattaché à la commune de Monéteau. "Elle est partie pour suivre son copain qui avait trouvé un travail. Elle, elle avait obtenu un travail dans une crèche", se rappelle sa collègue à l’époque.  

Angélique Clere donne naissance à ses deux enfants puis quitte son conjoint

C’est aux Archies que se construit sa vie de famille avec Kevin B. Le couple donne naissance à ses deux enfants, aujourd’hui âgés de 5 ans et 18 mois. Le conjoint de la jeune femme se présente comme un commercial. Aux forces de l’ordre, il a expliqué alterner les phases de chômage et de travail dans le commerce.

Si le couple est discret aux yeux du voisinage, dans le privé, Kevin B. se montre violent. En 2019, Angélique Clere quitte son conjoint et s’installe dans le centre-ville de Monéteau. Durant l’été de la même année, elle signale les violences de son ex-partenaire à la gendarmerie. "Cela avait donné lieu à une alternative au poursuite. Il avait reçu l’obligatoin de réaliser un stage de sensibilisation aux violences conjugales", rapporte Hugues de Phily, le procureur de la République d'Auxerre.

De plus, Kevin B. est sanctionné par une interdiction de fréquenter son ancienne conjointe pendant six mois et doit lui verser des dommages et intérêts. "Il a rempli scrupuleusement ces obligations", mentionne le procureur.

De nouveaux épisodes de violences

Pour subvenir aux besoins de ses enfants, la jeune femme prend en 2020 un deuxième travail. Elle lance son activité de vendeuse à domicile. Angélique Clere continue de fréquenter Kevin B. lorsqu'il vient récupérer sa fille et son fils un week-end sur deux.

Un jour d’avril 2020, le père de famille s’en prend à nouveau à son ancienne partenaire. Alors qu’il lui ramène une tondeuse, il lui crache dessus au moment où elle tente de lui fermer la fenêtre au nez. "Compte tenu du contexte, un rappel à la loi avait été ordonné", précise Hugues de Phily.

Dernièrement, Angélique Clere avait rapporté des menaces proférées par Kevin B. à son égard. Mais les faits qui remonteraient à février 2021 n’ont pu être prouvés par les forces de l’ordre, faute de témoins.

La société et la justice fautives ?

Malgré ces épisodes de violence, la jeune femme affirme aux gendarmes ne pas se sentir menacée. Lors de sa dernière plainte au début de l’année, elle refuse même l’aide des services sociaux de la gendarmerie. "La victime n’a jamais été laissée seule. Lors de sa dernière audition en février, elle indique qu’elle n’a pas besoin d’être accompagnée et qu’elle ne se sent pas particulièrement en danger", assure le procureur de la République.

Par ailleurs, Angélique Clere est en contact depuis l’été 2019 avec une association d’aide aux victimes de violences conjugales locales, l’Adavirs. Contactée par France 3 Bourgogne, l’association n’a pas souhaité nous livrer d’éléments sur la jeune femme, attendant l’évolution de l’enquête pour communiquer.

Mais par la voix de son président Pierre Monnoir, l’Adavirs affirme que faire le procès de la société dans le cas de cet assassinat serait une erreur. "Il ne faut pas se tromper de cible. Le vrai responsable dans un féminicide, c’est quand même l’auteur. Mais s’il y a eu des failles, je souhaite qu’on le dise pour faire avancer les choses".

Quant à l’enquête en cours, le procureur de la République d’Auxerre explique qu’elle devrait être particulièrement longue. Kevin B. est pour l’heure mis en examen et placé en détention provisoire. Il est poursuivi pour "assassinat". Le juge d’instruction estime que l’homme de 33 ans a prémédité son geste.

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