L'événement est inédit. Le pape François était en visite à Ajaccio ce 15 décembre, plusieurs milliers de personnes se sont déplacées pour assister à cette journée exceptionnelle. Certains ont préféré suivre l'événement depuis chez eux et ont décidé de ne pas se déplacer dans la cité impériale.
À Bastia, sous le soleil, place Saint-Nicolas, les chaises sont installées face à un écran géant. Si les fidèles catholiques sont nombreux dans les rues d'Ajaccio, la foule commence aussi à se former à Bastia, où se situe en ce moment, le marché de Noël.
Des centaines de Bastiais se sont réunies pour suivre le passage du souverain pontife dans la cité impériale. Pour eux, il était important d'assister à cet événement, même de loin, à près de 250 kilomètres.
Face au grand écran
C'est le cas de Jeannine, ravie que la journée soit retransmise en direct sur la chaîne de France 3 Via Stella. Elle aurait aimé être sur place, mais avait des craintes quant à la foule. "Je craignais de rencontrer des difficultés pour approcher le Pape, je le verrai mieux à la télévision, j'ai regardé son arrivée en Corse depuis chez moi et je suis descendue Place Saint-Nicolas pour suivre le reste de la journée", confie la femme, âgée de 75 ans. "J'admire la ferveur des gens et la gentillesse qu'ils manifestent, c'est agréable et cela fait plaisir de voir cela".
Toute la journée, depuis 9h du matin, le Saint-Père a déambulé dans les rues d'Ajaccio à bord de sa papamobile, il a même effectué des arrêts pour bénir les enfants qu’on lui a mis dans les bras. Après un passage par la place Foch où il a marqué un arrêt devant l'hôtel de ville et la Madonnuccia, le Pape François s'est dirigé vers la cathédrale Santa Maria Assunta, repeinte pour cette exceptionnelle occasion, pour une rencontre avec le diocèse d'Ajaccio et la prière de l'Angelus.
Être ensemble, en connexion
Un moment suivi de très près par Dominique Rovinalti et Emile Cubadda, deux Bastiais, qui auraient rêvé d'y être, mais qui n'ont pas trouvé de solution de transports, à temps, pour atteindre Ajaccio. "Nous n'avons pas trouvé de places, nous avons pourtant essayé de trouver des billets pour monter à bord du Corsica Ferries, mais malheureusement, nous n'en avons pas obtenu", regrette Emile Cubadda. "Tout était plein, tout était complet donc on a préféré voir toute cette visite sur grand écran à Bastia".
Les deux amis de longue date ont d'ailleurs laissé leur "femme chez eux pour la journée, le temps de la visite papale". "Mon épouse le regarde à la télévision à la maison, elle était d'ailleurs en pleurs quand je l'ai appelée tout à l'heure, elle ressentait beaucoup d'émotions, comme c'est une fervente croyante, elle a la foi chevillée aux corps", raconte, Dominique Rovinalti, avec émotions. "De notre vivant, nous ne reverrons plus jamais aucun pape venir en Corse".
"Ne pas manquer une minute de la visite"
Suivre ce moment exceptionnel derrière son écran, c'est le choix qu'a aussi fait Toussaint, âgé de 87 ans. Originaire du village de Pancheraccia (Haute-Corse), lieu de pèlerinage, où la vierge serait apparue au XVIIIème siècle, l'octogénaire s'est levé très tôt ce dimanche pour ne pas manquer un seul instant de cette visite.
Tasse de café à la main, pain au chocolat dans l'autre, il a gardé les yeux rivés sur son poste de télévision toute la journée. Le Pape François avait à peine posé le pied sur le sol corse, Toussaint n'en revenait toujours pas. "Cela me fait bizarre de le voir ainsi, moi je n'ai jamais vu ça de ma vie. C'est un honneur pour la Corse", confie l'homme, la gorge nouée. "J'aurais préféré qu'il y ait ma femme avec moi, mais elle est décédée l'année dernière. Elle le verra de là-haut".
Je suis un peu ému, le voir à Ajaccio, c'est magnifique. C'est très important pour les Corses et les croyants qu'il vienne ici. Quand j'ai appris qu'il allait venir, cela m'a vraiment fait plaisir.
Toussaint, 87 ans, habitant de Pancheraccia
Comme beaucoup de Corses, Toussaint aurait aimé être à Ajaccio ce dimanche. Mais depuis son petit village, perché à 637 mètres d'altitude, la route était trop longue et ambitieuse pour ce monsieur. "Je ne pouvais pas y aller, je préférais rester à la maison, comme ça, je suis tranquille et je le vois bien. Aujourd'hui, je vais passer ma journée sur le canapé, sauf le midi, où je vais manger !"
Une visite historique
Pour les croyants, cette visite est historique. "On ne peut pas faire plus important, moi, j'en ai les larmes aux yeux. C'est fondamental pour nous, pour toute la Corse et pour le monde entier", s'exclame Clothilde, avec sa croix autour du cou.
Elle aussi, habitante de Pancheraccia, a choisi de participer à ce moment, mais à distance, chez elle, devant sa télévision. "Voir tout ce monde, tous ces chants, c'est impressionnant. Qu'est-ce qu'il peut y avoir de plus beau que cela ?", s'interroge Clothilde, les larmes aux yeux.
Ce dimanche, elle a d'ailleurs partagé ce moment d'émotions avec son fils, qui a tenu à être à ses côtés pour vivre ensemble cette journée."C'était important de voir ce moment avec ma maman, pour pas qu'elle ne soit toute seule. Et puis, je n'ai pas de voiture, personne ne pouvait m'amener à Ajaccio. Si quelqu'un m'avait proposé, j'y aurais été volontiers ! J'aurais même essayé de le toucher", lance José, le sourire aux lèvres. "C'est tellement important, je n'y croyais plus à la fin ! Cela m'a fait vraiment plaisir quand il a annoncé officiellement sa venue".
La grande messe retransmise
Un peuple au rendez-vous ce dimanche : plusieurs milliers de personnes sont venues acclamer le souverain pontife. Après une matinée très chargée, le Pape François a présidé une grande messe à 15h30 au Casone devant 10.000 personnes. Il s'agissait de la dernière et l'étape la plus attendue de ce déplacement du Saint-Père dans la cité impériale.
Cette grande messe a été retransmise sur de nombreux écrans, aux quatre coins de l'île, autant dans le Sud que dans le Nord. "J'ai suivi la visite ce matin depuis chez moi, mais pour la messe, j'ai préféré descendre sur la place Saint-Nicolas afin d'être avec la foule. C'était mieux que de rester, seule chez moi", confie Myriam, venue du Cap Corse pour suivre cet événement dans le centre-ville de Bastia.
Un moment de communion
Si environ 1.200 fidèles ont embarqué à bord de la Corsica Ferries samedi soir depuis Bastia pour Ajaccio, des centaines de personnes sont restées à Bastia et ont tenu à vivre ensemble ce moment sur la place Saint-Nicolas pour suivre, entre autres, cette longue messe d'une heure et demie.
"C'est un moment d'émotions et de communion. C'est le principe de la messe, être ensemble, dans une assemblée, c'est pour cela que j'ai souhaité descendre avec ma famille, assister à la messe sur la place, plutôt que chez moi", explique Gilles Guerrini, chercheur et doctorant en Histoire contemporaine à l'Université de Corse. "Tout le monde ne pouvait pas descendre à Ajaccio donc c'est très bien d'avoir permis ce moment de communion, ailleurs qu'à Ajaccio. Car c'est toute la Corse qui attendait le Pape, c'est très bien de faire participer toutes les villes de Corse".
À travers toute l'île, la ferveur de cette visite historique aura renforcé la foi des catholiques de Corse.
Voyez le reportage de Juliette Messa et nos équipes :