Après avoir demandé hier à ses avocats de le représenter de nouveau à l’audience, Jacques Mariani a fait son retour dans le box ce mardi 28 mai. Il est désormais le seul des accusés détenus à assister aux débats.
"Je suis là pour montrer que je suis innocent et je ne pouvais pas me permettre de passer à côté de ça. Ce qui m’importe, c’est d’être jugé équitablement."
Entouré de cinq agents pénitentiaires, Jacques Mariani fait son apparition, mardi 28 mai, dans le box vitré de la cour d’assises des Bouches-du-Rhône. "Je ne bougerai plus d’ici", lâche-t-il pour confirmer qu’il assistera à la suite du procès du double assassinat d'Antoine Quilichini et Jean-Luc Codaccioni. Une procédure dans laquelle l’homme de 58 ans - dont 38 passés en prison - est poursuivi pour "récidive de participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d’un crime".
Derrière ses éternelles lunettes de vue, le quinquagénaire s’assoit, seul, dans le box. Comme les jours précédents, les huit autres coaccusés qui comparaissent détenus ont de nouveau refusé de se rendre dans la salle d’audience.
Transférés le matin vers le palais Monclar, ils restent dans les geôles du tribunal d’Aix-en-Provence. Après avoir récusé leurs conseils la semaine dernière, ils continuent d’exprimer leur désaccord avec le non-renvoi du procès, ainsi qu'avec le planning des auditions des enquêteurs devant la cour.
Jacques Mariani, lui, a choisi de revenir dans la salle, dans laquelle sa compagne a pris place sur les bancs - clairsemés - réservés au public. La veille, il avait refusé d’être extrait de sa cellule des Baumettes. Le président Martorano avait alors lu un courrier, daté du 27 mai, dans lequel l’accusé - qui avait lui aussi récusé ses avocats - demandait à ses défenseurs de le représenter de nouveau à l’audience. Ce mardi matin, ses trois conseils sont donc tous présents, assis devant lui. Seule la vitre du box les sépare de leur client.
"Il est difficile pour moi d’être là devant vous aujourd’hui, explique Jacques Mariani à la cour. Au début le procès se passait bien ; après, il y a eu l’histoire du planning, je ne l’accepte pas non plus."
L’un de ses avocats, Maître Yassine Maharsi, s’approche du micro et s’adresse au président Martorano :
"Il est toujours bon de se parler : les juges et les avocats sont deux entités différentes et nous ne sommes pas contraints d’être dans le duel mais aussi dans le duo. Je vais vous parler librement : je n’ai pas envie d’être là mais j’ai pour objectif de venir exercer les droits de la défense. Nous avons compris qu’avec ou sans nous ce procès se tiendra. Je n’avais pas envie d’être là car ce box était vide, plus maintenant."
Se tournant vers son client, le pénaliste parisien déclare : "Monsieur Mariani, ce box est trop grand pour vous sauf si nous arrivons à convaincre de votre innocence."
Son confrère bastiais, Maître Jean-Sébastien de Casalta, lui succède au micro : "Si nous sommes présents à cette barre et si je suis ici dans cette salle d’audience, et je me réjouis de l’être sans la moindre réserve, ce n’est pas pour alimenter davantage la chronique des péripéties de ce procès mais parce qu’un homme, du fond de sa cellule, nous a demandé de le défendre. Nous entendrons le faire dans la plénitude des prérogatives qui sont les nôtres et dans la nécessaire sérénité qui sied à l’œuvre de la justice."
Je n’ai jamais fait de courrier la semaine dernière. Le seul que j’ai fait, c’est aujourd’hui.
Jacques Mariani
Les mains appuyées sur le box, Jacques Mariani, veste beige et tee-shirt blanc, écoute attentivement avant de demander la parole. Le président Martorano la lui donne.
"Je voudrais m’adresser à certains journalistes, prévient l’accusé, d’un ton posé, le regard tourné vers le président, à qui il dit : Je ne vous ai jamais fait une lettre la semaine dernière. C’était un mot que j’ai passé à l’huissier concernant les numéros de téléphone de mes avocats. En bas, dans les geôles, même si je connais ces garçons depuis longtemps, ils me reprochent d’avoir fait des choses dans leur dos. Après, je m’énerve et ce n’est pas le but. Je demande donc aux journalistes d’arrêter de dire certaines choses. Je n’ai jamais fait de courrier la semaine dernière. Le seul que j’ai fait, c’est aujourd’hui." Référence à celui que le président a lu devant la cour et dans lequel Jacques Mariani demandait à ses avocats de revenir le représenter à l'audience. Ce qu’ils ont tous fait ce mardi 28 mai, où le reste de la journée a de nouveau été consacré à l’audition des témoins du double assassinat du 5 décembre 2017.
L'ex-repenti auditionné ce mercredi
En plus des témoins, deux experts - l'un en "résidus de tirs", l'autre en "incendie" - se sont succédé à la barre dans l'après-midi.
Leurs deux dépositions - chacune très technique et détaillée - n'ont suscité aucune question des six avocats de la défense présents dans la salle. La seule interrogation est intervenue en toute fin d'audience.
Émanant de la défense de Jacques Mariani, elle concerne la journée de ce mercredi où un ex-repenti, dont les déclarations mettent en cause leur client dans le dossier Poretta, est appelé à témoigner. Yassine Maharsi, l'un des trois conseils de Jacques Mariani, demande alors au président Martorano si l'ex-repenti sera présent à la barre.
"Il a changé d'avis et a demandé à comparaître en visioconférence", répond le magistrat.
Le pénaliste parisien insiste : "Il s'agit d'un témoin capital pour la défense. Nous préférerions qu’il soit présent. C'est la clé de voûte de l’accusation de notre client, c’est capital." Et la robe noire de prévenir : "Il faut prévoir entre 8 et 12 heures d'audition. À Paris (lors d'un procès en septembre 2023, ndlr), on a fait 3 jours. Là on a réduit et on a ciblé nos questions."
"Il est démoniaque Monsieur le président. Vous avez le pouvoir de le faire venir et c’est très important, s’il vous plaît", implore Jacques Mariani, debout, depuis le box. "Par respect pour tout le monde, pour ma défense, faites le venir s'il vous plaît."
Pour l'instant, l'audition de l'ex-repenti est prévue en visioconférence ce mercredi en début d'après-midi.
Les précisions de Marie-Françoise Stefani et Marion Fiamma :