Rund Um. Face à la sécheresse, particuliers et collectivités investissent dans des récupérateurs d'eau de pluie depuis le début de l'été. Les professionnels sont débordés.
En Alsace, de nombreux cours d'eau sont à sec compte tenu du manque de précipitations. Des secteurs entiers sont soumis à des restrictions des usages de l’eau depuis le mois de juillet. Une situation vouée à se répéter dans les années à venir, alors depuis le début de l'été, certains cherchent des alternatives et se tournent vers l'eau de pluie.
À Saint-Bernard, dans le Haut-Rhin, Julien Settelen n'arrête pas. Son entreprise, spécialisée dans les cuves de récupération d'eau de pluie, est très sollicitée : "On est à 200% depuis fin juillet. On n’a jamais eu autant de demandes. Les gens commencent à être sensibilisés sur le fait que l'eau de pluie tombe du ciel, qu’elle est gratuite et que c’est dommage de ne pas la récupérer."
Une explosion des ventes, amorcée il y a 5 ans. Elles augmentent de 20% chaque année et 2022 va battre des records. "La société existe depuis plus de 13 ans. Quand j’ai commencé à faire de la récupération d’eau de pluie, on me prenait pour un extraterrestre, confie encore Julien Settelen. Les gens disaient « l’eau du réseau est bien, on en a assez, pourquoi récupérer l’eau de pluie ». Cela a bien changé."
Les petits villages investissent également
Roland Rousseau a installé des tonneaux dans son jardin il y a plusieurs années pour capter l'eau de pluie. Un équipement "fait maison", qu'il vient de compléter par une citerne de 1.500 litres, achetée. Le principe est simple, elle est raccordée à la gouttière de la maison et permet de récupérer l'eau du toit. Avec une cuve, cet habitant d'Ungersheim (Haut-Rhin) peut arroser dix fois son potager.
"L’eau est traitée pour qu’on puisse la boire et s’en servir dans les maisons. Mais pour le jardin, c'est ridicule... pas besoin d'eau traitée", insiste-t-il. Une économie d'eau potable et d'énergie dans le même temps. "C’est une petite goutte d’eau dans l’océan mais si tout le monde joue le jeu, ça finira par payer, ajoute-t-il. En plus, l'eau n'est pas trop froide, c'est meilleur pour les tomates."
Les collectivités elles aussi adoptent cette stratégie. Certaines communes installent des citernes qui peuvent contenir plusieurs centaines de milliers de litres d'eau. Les petits villages prennent des mesures à leur échelle. Le conseil municipal d'Aspach (Haut-Rhin) a décidé d''investir dans deux cuves de 4.000 litres chacune, en 2021. Il a également transformé une ancienne cuve à fioul enterrée en cuve à eau. Coût total : près de 15.000 euros pour 18.000 litres d'eau de pluie valorisée.
Les communes veulent montrer l'exemple
Si la commune a fait le choix de ne plus arroser ses fleurs cet été pour "montrer l'exemple", elle a tout de même pu donner de l'eau aux plantes vivaces et surtout aux haies qu'elle a plantées en bordure du village pour éviter les coulées de boue.
"L'eau de pluie nous a bien aidés. On ne l'a pas l'utilisée n'importe comment : on a arrosé tôt le matin et tard le soir, comme l'imposait un arrêté préfectoral. Même si c'était de l'eau de pluie...", explique le maire Fabien Schoenig, inquiet de voir le cours d'eau qui traverse sa commune régulièrement à sec ces dernières années.
Les citernes peuvent être en plastique et en béton. Ces dernières, enterrées et fabriquées en Belgique, représentent environ 90% des ventes de l'entreprise de Julien Settelen. "Notre best seller, c'est la cuve de 10.000 litres. Il faut compter environ 7.000 euros pour l'acquérir", affirme Romain Rousseau, le commercial.
Un Français consomme 150 litres d'eau par jour
De plus en plus de clients souhaitent des installations permettant également d’utiliser l’eau de pluie pour les toilettes et la machine à laver. Une précieuse économie d'eau potable, alors qu'un Français consommerait en moyenne 150 litres d'eau par jour.
"Faire pipi et caca dans de l'eau potable alors que d'autres n'en ont pas assez pour boire, c'est une hérésie", soupire Julien Settelen. Selon lui, un tel équipement peut faire baisser la facture d'eau de moitié. L'arrosage représentant environ 6% de la consommation, la machine à laver 15% et les toilettes 20%.
Un argument financier mais surtout écologique, car un tel équipement peut coûter jusqu'à 10.000 euros (pour 10.000 litres), travaux de terrassement et branchements compris. L'utilisation de l'eau de pluie à l'intérieur de la maison est très règlementée et nécessite des autorisations.
