Le premier tour des élections législatives de 2024 a lieu ce dimanche 30 juin. Les députés sortants Lionel Vuibert (Agir, pour Ensemble), Pierre Cordier (LR canal historique), et Jean-Luc Warsmann (UDI), issus de la droite et du centre, sont candidats à leur réélection. Les résultats seront particulièrement scrutés à Charleville-Mézières, Sedan, et Givet.
Le premier tour des élections législatives a lieu ce dimanche 30 juin 2024. Elles ont été convoquées par Emmanuel Macron, après sa dissolution surprise de l'Assemblée nationale qui a suivi la défaite du parti présidentiel aux élections européennes. Les précédentes avaient eu lieu tout juste deux ans auparavant. Voici tout ce qu'il faut savoir sur ce premier tour en région Champagne-Ardenne, et comment les médias traditionnels et réseaux sociaux façonnent le vote des électeurs et électrices.
Les Ardennes sont un département à fort enjeu. Cette ancienne terre industrielle était peuplée d'un peu plus de 268 000 personnes en 2021, lesquelles envoient trois député(e)s au palais Bourbon : 18 personnes sont candidates dans le département (71 dans la région Champagne-Ardenne).
Au premier tour des élections législatives de 2022, le taux d'abstention avait atteint 54,12% dans les Ardennes. Cette année, il devrait être inférieur : la participation était en hausse (53.4% à 17h00). Vous pouvez suivre la soirée électorale en direct. Le présent article sera complété au fil de la soirée en fonction des remontées d'informations depuis les préfectures et le plateau de France 3 Champagne-Ardenne.
Ce qu'il faut retenir du premier tour
Boris Ravignon, maire de Charleville-Mézières qui a décidé de quitter Les Républicains après l'alliance d'Éric Ciotti avec le Rassemblement national, a blâmé "l'échec" du président de la République et de son parti. Il relève que la population demande "de l'ordre et la justice".
Tous les députés sortants se retrouvent en difficulté plus ou moins marquée, notamment pour les première et deuxième circonscriptions (Lionel Vuibert, Pierre Cordier), où le Rassemblement national arrive en tête et fait même un très bon score (pour la deuxième). Jean-Luc Warsmann sauve les meubles dans la troisième circonscription, mais sa réélection n'est pas gagnée : c'est la circonscription de Champagne-Ardenne où le Rassemblement national n'est pas arrivé en première position (mais de très peu). Le Front populaire ne s'est qualifié dans aucune des circonscriptions ardennaises.
La première circonscription en détail
Résultats détaillés du premier tour
Flavien Termet (RN, ex-FN) obtient 38,41% des voix et met en difficulté le député, Lionel Vuibert (Renaissance, ex-LREM, pour la coalition présidentielle Ensemble), qui récolte 26,28%. En troisième position, Damien Lerouge (PS pour la coalition de gauche du Front populaire) ne se qualifie pas au second tour, en ne faisant que 17,24% des voix.
Lionel Vuibert, interrogé par notre journaliste Sébastien Valente, prend en compte son score le plaçant au deuxième rang, même s'il estime qu'il s'est amélioré par rapport à 2022. Il se dit "habitué des combats difficiles. Je rappelle être né ici, vis ici, travaille ici. Je connais le territoire : faites le choix d'une candidature ardennaise." Il mise sur le report voix en provenance du Front populaire.
Justement, Damien Lerouge remercie les 8 000 personnes qui ont voté pour lui. "Mes consignes de vote ont toujours été claires : faire barrage au Front national, au Rassemblement national. Mais il faut signaler que c'est à cause d'Emmanuel Macron et de sa politique que nous en sommes là."
Quant à Flavien Termet, "très heureux", dénonce cependant "des manoeuvres et des tentatives de fraudes" de la part de ses adversaires. Il dénonce "la casse sociale" et "la submersion migratoire" qu'ils attribuent à la politique présidentielle. Il souhaite "desserrer l'étau du pouvoir d'achat" et qualifie de "gangrène" la "submersion migratoire". Il décrit Lionel Vuibert comme "le fossoyeur des services publics".
Le politologue Olivier Dupéron rappelle les difficultés posées par le "candidat fantôme", Christian Charvet (RN dissident) se présentant sous les couleurs du Rassemblement national sans avoir été officiellement investi par le parti d'extrême-droite ni avoir fait campagne sur place, semble-t-il. Il a obtenu 9,15% des voix, qui pourraient se reporter en faveur de Flavien Termet. Quant à Sabine Misset (LR canal historique), elle ne fait que 3,85%.
Suivent Arnaud Rennesson (SE) avec 2,17% et Sonia d'Orgeville (Écologie au centre) avec 2,07%. En dernière position, Nadia Octave (LO) fait 0,83%.
Forces en présence
La partie ouest du département comprend comme grandes villes la moitié de la préfecture, Charleville-Mézières, ainsi que Rethel et Signy-l'Abbaye. Le député sortant, Lionel Vuibert (Agir pour la coalition présidentielle Ensemble) se représente. Il a été élu pour la première fois en 2022, Bérangère Poletti (LR) ne se représentant pas. Conseiller départemental, ancien maire du village de Faissault (près de Saulces-Monclin) pendant un peu moins de quinze ans, il est aussi le fils de l'ancien député (et maire de Faissault) Michel Vuibert, ainsi que de Noëlle Vuibert (elle aussi ex-maire de Faissault).
Un débat avait été diffusé sur France 3 Champagne-Ardenne. Toutes les personnes candidatant à l'élection sont :
- Octave Nadia (LO)
- Arnaud Rennesson (SE)
- Flavien Termet (RN, ex-FN)
- Christian Charvet (RN dissident)
- Sonia d'Orgeville (Écologie au centre)
- Sabine Misset (LR canal historique)
- Damien Lerouge (PS pour la coalition de gauche du Front populaire)
- Lionel Vuibert (Agir pour la coalition présidentielle Ensemble)
Damien Lerouge, secrétaire général du PS ardennais, représente l'union des partis de gauche sur une terre traditionnellement acquise à la droite. Laquelle est représentée par Sabine Misset, qui candidate pour la première fois après avoir pris la suite de Guillaume Maréchal, le bien connu conseiller municipal de Charleville-Mézières, qui avait annoncé sa candidature pour ces législatives, avant de se rétracter trois jours plus tard.
L'étiquette politique de Christian Charvet (un nom d'usage) est un peu particulière car il n'a pas été investi par le Rassemblement national... contrairement à ce que peuvent faire penser ses bulletins présentant le sigle du parti d'extrême-droite. Le matin du vote, on a découvert que des affiches de Flavien Termet (le candidat officiel) avaient été recouvertes par celles de Christian Charvet, ce qui est interdit. La confusion était particulièrement prégnante dans les bureaux de vote de Rethel, où les gendarmes ont dû venir faire des constatations après qu'un papier "Attention, usurpation d'identité" a été placé à côté des bulletins de vote de Christian Charvet, supposément par le maire de la ville. Quant à Wasigny, jusqu'en début d'après-midi, les bulletins au nom de Christian Charvet avaient été retournés, ne laissant apparaître que le côté blanc. Ces faits ont été diffusés sur les réseaux sociaux, puis relayés notamment par l'écologiste Marine Tondelier. On pourrait craindre qu'ils entraînent l'invalidation de l'élection, même si ça n'empêchera paradoxalement pas le second tour de se tenir quand même, avant que l'annulation soit proclamée officiellement.
Sonia d'Orgeville représente le parti Écologie au centre. À ne pas confondre avec Juliette de Causans en 2022. Cette dernière, fondatrice d'Europe Égalité Écologie, avait fait parler de son parti en retouchant ses affiches de candidature avec l'intelligence artificielle.
La circonscription est l'une des plus fragiles. Laurent Richard (RN) était arrivé en tête du premier avec 27,40% des voix en 2022, devançant Lionel Vuibert qui avait récolté 20,47% seulement. Suivaient ensuite de très près Guillaume Maréchal et l'écologiste Julien Duruisseau. C'était la seule circonscription des Ardennes où l'extrême-droite était arrivée en tête au premier tour. Monsieur Vuibert l'avait ensuite emporté au second tour.
Deuxième circonscription
Résultats détaillés du premier tour
Pauline Mester (RN, ex-FN) créé la surprise avec ses 40,83%, loin devant le député sortant Pierre Cordier (DVD mais proche de LR canal historique) qui fait 30,32% des voix. On les retrouve en ballotage pour le second tour. Gilles Loyez (LFI pour la coalition de la gauche du Front populaire) a fait 17,97% des voix, ce qui n'est pas assez pour se qualifier.
La défaite est sévère pour le parti d'Emmanuel Macron : Philippe Mathot (Renaissance, ex-LREM, pour la coalition présidentielle Ensemble) ne fait que 9,32% des voix. Suivent Mink Takawe (LO) avec 0,84% et Patrick Benyoucef (Parti des travailleurs) à 0,72%.
Au micro de notre journaliste Sébastien Valente, Pierre Cordier ne "s'attendait pas à un tel écart" face à l'extrême-droite. Le député sortant rappelle son "travail de disponibilité et de terrain". Il espère que les "électeurs vont se resaisir la semaine prochaine". Il appelle au rassemblement derrière lui, avec des idées mises en avant de "justice et aussi de générosité mais sans tomber dans l'assistanat".
Forces en présence
La partie nord du département comprend comme grandes villes la moitié de la préfecture, Charleville-Mézières, ainsi que Givet. C'est près de cette dernière que se trouve la centrale nucléaire de Chooz. Le député sortant, Pierre Cordier (DVD mais proche de LR canal historique), se représente. Il a été élu pour la première fois en 2017, après avoir battu Christophe Léonard (PS). Il est aussi conseiller départemental depuis quasiment 20 ans, et a été maire de Neufmanil (à l'est de Charleville) pendant seize ans. Nous avions parlé récemment de lui quand il avait testé les règles douloureuses à l'aide d'électrodes, dans le cadre de travaux parlementaires sur ce sujet.
Toutes les personnes candidatant à l'élection sont :
- Patrick Benyoucef (Parti des travailleurs)
- Mink Takawe (LO)
- Pauline Mester (RN, ex-FN)
- Philippe Mathot (Renaissance, ex-LREM, pour la coalition présidentielle Ensemble)
- Gilles Loyez (LFI pour la coalition de gauche du Front populaire)
- Pierre Cordier (DVD)
Pierre Cordier avait fait un bon score lors du premier tour en 2022 : 40,98% des voix, suivi de Baptiste Philippo (RN) et ses 21,04% seulement. Une performance qu'il va tenter de réitérer. Gilles Loyez, le troisième homme, avait été proche du ballotage avec ses 19,06%, mais il pourrait pâtir cette année de sa couleur politique décriée par une partie de la classe politique et des médias.
Troisième circonscription
Résultats détaillés du premier tour
Le député sortant Jean-Luc Warsmann (DVC proche de l'UDI), avec 43,56% des voix, s'impose de justesse face à Isabelle Roger (RN, ex-FN) qui en a eu 43,38%. On les retrouvera au second tour. Sophie Perrin (LFI pour la coalition de la gauche du Front populaire) a obtenu 11,74% des voix.
Au micro de notre journaliste Sébastien Valente, Jean-Luc Warsmann se veut positif. "Les Ardennais ont voulu parler très fort. Les Français n'arrivent plus à payer leurs factures. C'est un message très fort envoyé aux gouvernants." Il "remercie" les personnes qui ont voté pour lui et "appelle à la mobilisation dimanche prochain". C'est la seule circonscription en Champagne-Ardenne qui n'ait pas été remportée par le Rassemblement national en première position.
Laure Augier (LO), en quatrième et dernière position, n'obtient que 1,32%.
Forces en présence
La partie est du département comprend comme grandes villes Sedan et Vouziers, deux des sous-préfectures. Le député sortant, Jean-Luc Warsmann (DVC mais proche de l'UDI) a quasiment 30 ans de mandat de député, commencé en 1995 après la mort de Claude Vissac (DVD mais proche du RPR) des suites d'un cancer : il en était le suppléant. Il a dirigé la prestigieuse commission des Lois de l'Assemblée nationale. Il est conseiller régional depuis près de quinze ans, a été auparavant conseiller départemental pendant près de quinze aussi, et a été maire de Duzy (près de Carignan) pendant quasiment 19 ans. Nous avions parlé récemment de lui quand il a été enfariné lors d'une manifestation pour la sauvegarde de la maternité de Sedan.
Toutes les personnes candidatant à l'élection sont :
- Laure Augier (LO)
- Jean-Luc Warsmann (DVC)
- Isabelle Roger (RN, ex-FN)
- Sophie Perrin (LFI pour la coalition de gauche du Front populaire)
Jean-Luc Warsmann est bien établi dans sa circonscription. Il est arrivé en tête du premier tour en 2022, avec 47,69% des voix, suivi de David Lemoine (RN) et ses 22,27% seulement. Déjà candidate, Sophie Perrin était arrivée troisième, mais loin derrière : elle pourrait avoir du mal à rattraper cet écart.
Le second tour des élections législatives de 2024 est prévu le dimanche 07 juillet.