Il y a 80 ans, en mars 1943, 300 jeunes étaient raflés par la Gestapo à Nancy. René Rhein est le dernier survivant de cet épisode tragique. Atteint de la maladie d'Alzheimer, cet ancien déporté centenaire a aujourd'hui perdu la mémoire. Mais les archives et ses dessins témoignent de son passé de déporté en camp de concentration et de la barbarie nazie. Ses œuvres poignantes sont exposées du 1er au 9 mars 2023, à l’hôtel de ville de Nancy.

C’est un éclairage artistique et historique d’une grande richesse, inédit, organisé par l’amicale des anciens déportés d’Oranienburg-Sachsenhausen et la Ville de Nancy (Meurthe-et-Moselle). L'exposition "René Rhein, dernier survivant des rafles de Nancy de mars 1943: témoignage sur la déportation à Sachsenhausen" est à retrouver à compter du 1er mars jusqu'au 9 mars 2023, à la salle des pas perdus de la mairie de Nancy. Découvrez les œuvres de ce témoin des barbaries commises durant la Seconde Guerre mondiale.

300 déportés entre les 2 et 5 mars 1943 à Nancy

C’était il y a 80 ans, presque jour pour jour. Ils n’étaient ni Juifs, ni résistants, ni réfractaires au service du travail obligatoire (STO). Pourtant, entre le 2 et le 5 mars 1943, près de 300 hommes, en âge de travailler, sont raflés à Nancy. Ils pensent d’abord être convoqués par la mairie de Nancy, en vue d'un recensement. En réalité, il s’agit d'un STO déguisé, afin de répondre aux besoins en main-d’œuvre de l’Allemagne nazie. La plupart sera déportée dans les camps de concentration de Mauthausen (Autriche) et de Sachsenhausen (Allemagne).

Ils étaient insouciants, on leur avait fait croire à une soi-disant visite médicale

Jean-Pierre Pesson, fils de résistant déporté et président de l’UNADIF de Meurthe-et-Moselle

Seuls 88 d'entre eux en reviendront vivants. “Ils étaient insouciants, on leur avait fait croire à une soi-disant visite médicale. Ces jeunes se sont alors rassemblés dans diverses brasseries du centre-ville mais la Gestapo les a encerclés et conduits à la maison d'arrêt Charles III. Dans les jours qui ont suivi, ils sont conduits dans les camps d'Ecrouves (Meurthe-et-Moselle) puis de Compiègne-Royallieu (Oise), avant d’être envoyés vers les camps de la mort”, explique le président de la délégation départementale de l’Union nationale des associations de déportés et internés de la Résistance et des familles de disparus.

René Rhein, dernier survivant, 101 ans le 1er juillet prochain

Né le 1er juillet 1922, René Rhein, 100 ans, est le dernier survivant des rafles de Nancy. Atteint de la maladie d'Alzheimer depuis trois ans, ce veuf sans enfants vit aujourd’hui dans une maison de retraite de Laxou (Meurthe-et-Moselle). Cet artiste centenaire, ancien déporté du camp de Sachsenhausen (Allemagne) ne se souvient aujourd'hui plus de rien. Pourtant, ses dessins parlent toujours pour lui. Ils témoignent, mieux que les mots, d’un pan sombre et douloureux de sa vie et de l’Histoire. En 2018, peu avant qu’il perde la mémoire, nous avions rencontré cet homme exceptionnel, humble et passionnant. Un artiste complet, qui rénovait aussi des vitraux et faisait de la sculpture sur bois.

Un officier allemand nous a dit: si un jour vous avez la chance de vivre, de rentrer chez vous, vous pourrez raconter ce que vous avez vu mais même vos parents ne vous croiront pas. Et c’était vrai

René Rhein, ancien déporté et dernier rescapé des rafles de 1943 à Nancy (en 2018)

René n’a que 20 ans lorsqu'il est arrêté par la Gestapo, le 2 mars 1943, à Nancy. C’est alors un long voyage en enfer qui débute. Celui du camp de concentration de Sachsenhausen (situé à Oranienbourg, à 30 kilomètres de Berlin, en Allemagne), où il devra effectuer son service de travail obligatoire (STO), jusqu’à la Libération, en 1945. “Un officier allemand nous a dit: si un jour vous avez la chance de vivre, de rentrer chez vous, vous pourrez raconter ce que vous avez vu mais même vos parents ne vous croiront pas. Et c’était vrai”, confiait René Rhein, en 2018, au micro de France 3 Lorraine.

Aujourd'hui René, qui aura 101 ans en juillet, ne se rappelle plus de rien mais ses dessins parlent toujours pour lui et son histoire ne doit pas tomber dans l’oubli

Jean-Pierre Pesson, fils de résistant déporté et président de l’UNADIF de Meurthe-et-Moselle

Jean-Pierre Pesson connaît René Rhein depuis 2013 et lui rend régulièrement visite. Il est, lui-même, fils de résistant déporté et président de la délégation départementale de l’UNADIF (Union nationale des associations de déportés et internés de la Résistance et des familles de disparus). “René Rhein a réalisé de nombreux dessins qui témoignent des horreurs de la guerre, des scènes de vie au camp de Sachsenhausen et des tableaux, surtout des portraits de déportés. Nous les conservons à la Maison du Combattant, à Nancy. Aujourd'hui René, qui aura 101 ans en juillet, ne se rappelle plus de rien mais ses dessins parlent toujours pour lui et son histoire ne doit pas tomber dans l’oubli”, insiste, ému, Jean-Pierre Pesson.

Dans un ouvrage écrit et illustré par ses soins, qu’il nous présentait en 2018, René Rhein raconte sa vie, son arrestation, son emprisonnement, sa déportation et les conditions de vie et de travail dans le camp de concentration de Sachsenhausen. Aujourd’hui, impossible de remettre la main sur ce livre, personne ne sait où il se trouve. Heureusement, tout a été numérisé aux archives départementales et certains de ses dessins originaux sont toujours conservés par des associations d’anciens combattants.

À l’occasion du 80e anniversaire des rafles de la Gestapo du 2 et 5 mars 1943, plusieurs autres commémorations et événements sont organisés à Nancy, en ce début du mois de mars, en hommage aux victimes du nazisme.

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