Témoignage. Infirmier libéral, Thierry raconte son quotidien : "La pénibilité de notre métier n'est pas du tout reconnue"

Publié le Écrit par Myriam Libert et Sylvie Callier
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Les infirmiers se mobilisent partout en France, ce jeudi 4 avril 2024, pour dénoncer la pénibilité de leur travail, et demander une revalorisation de leurs revenus. Nous avons suivi l'un d'entre eux dans l'agglomération rouennaise, un soignant qui aime son métier malgré des conditions d'exercice pas toujours faciles.

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Thierry Laurent est infirmier libéral à Darnétal, dans l'agglomération rouennaise. Ce jeudi matin, nous l'avons suivi dans quelques-unes de ses activités quotidiennes, car la journée d'un soignant est un empilement d'actes médicaux.

Son patient de la mi-journée est un homme d'une quarantaine d'années, qui a vécu longtemps dans la rue. Il y a quelques semaines, sa vie précaire a eu raison de sa santé. L'homme a dû subir l'amputation des orteils de son pied gauche.

Une blessure qui nécessite aujourd'hui des soins quotidiens."C'est un pansement complexe qui nécessite du temps, qui nécessite qu'on fasse attention car ça peut être douloureux pour le patient, et puis il y a la relation de confiance qui s'installe forcément, au fur et à mesure de nos passages", explique l'infirmier.

Assurer la continuité des soins

Thierry Laurent vient tous les jours chez ce patient, samedi et dimanche compris. L'infirmier partage un cabinet avec trois autres personnes, deux femmes et un homme, qui assurent la continuité des soins, 7 jours sur 7, et 24 heures sur 24 pour les cas les plus graves.

Pour un pansement complexe comme celui de cette blessure au pied, le prix de l'acte est de 15,60 euros brut, dont il faudra déduire les charges. "La nomenclature est très complexe, on s'y perd. La notion de temps passé avec le patient n'est pas nécessairement considérée. Pour les gens dépendants, on a des forfaits journaliers qui s'appliquent et qui mériteraient d'être revalorisés. Actuellement on a trois forfaits différents selon l'importance de la prise en soins, mais ce sont des tarifs relativement bas. Et c'est un forfait journalier même si vous devez vous déplacer trois fois dans la journée", commente Thierry Laurent, qui occupe aussi les fonctions de président du SNIlL 76, le Syndicat National des Infirmières et Infirmiers Libéraux

Vers la revalorisation des actes médicaux

Les infirmiers mobilisés aujourd'hui demandent la revalorisation de leurs actes de base, c’est-à-dire de l'AMI ou acte médical infirmier qui est la clé de base de leur rémunération. La dernière revalorisation a eu lieu en 2009.

"En 15 ans, l'inflation est passée par là. Même chose sur les indemnités de déplacement, on est à 2,75 du déplacement, on aimerait bien passer à trois euros", précise Thierry Laurent. 

Des conditions de travail parfois difficiles

En sortant de l'appartement où réside l'homme amputé, Thierry Laurent nous rappelle comme les conditions d'exercice de son métier peuvent être laborieuses.

"Là, vous avez vu on travaille dans des conditions qui ne sont pas faciles, le lit n’est pas adapté, l'environnement, l'appartement n’est pas adapté à des soins. On a aussi des gens en fin de vie qui peuvent nous appeler la nuit s'il y a un problème sur la ligne de perfusion. Le lendemain matin, il faut qu'on soit d'attaque pour travailler. Et tout ça plus l'amplitude horaire d'une journée, effectivement c'est éprouvant."

C'est un métier très fatigant. Il y a beaucoup de satisfactions dans ce métier, moi je le fais, je l'aime, je viens tous les matins avec plaisir, mais par contre on y laisse un peu de nous tous les jours. Il y a des situations qui sont difficiles, mais il faut être présent. La pénibilité de notre métier n'est pas du tout reconnue pour l'instant.

Thierry Laurent, infirmier libéral à Darnétal, et président du SNIIL 76

Thierry Laurent réalisera plusieurs dizaines d'actes de soins dans sa journée de travail. S'il tient à rappeler qu'il aime toujours autant son métier malgré le rythme soutenu, il n'oublie pas non plus d'évoquer sa pénibilité, et ses conséquences sur leur propre santé. "L'espérance de vie des infirmiers est sept ans inférieure à la moyenne nationale. Pour des personnels soignants, ça pose question non ?"

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