Sa fille va avoir trois ans, lundi 30 septembre 2024. Un anniversaire qui sonne la fin de la prise en charge de l'hébergement d'une mère isolée avec deux enfants scolarisés dans le centre-ville de Toulouse. Une réelle angoisse pour cette petite famille qui risque de se retrouver à la rue dans les heures qui viennent. Témoignage.
Lundi 30 septembre, c'est l'anniversaire de la petite dernière : trois ans tout rond. Un âge qui va mettre un terme à la prise en charge d'une mère isolée et de ses deux filles, jusqu'ici hébergées dans un hôtel social de Toulouse, dans le cadre de la politique d'accompagnement du conseil départemental de Haute-Garonne. Lundi matin, F* va emmener ses deux petites, âgées de six et trois ans, à l'école. "Après, je verrai", nous dit-elle sans savoir où aller et où dormir la nuit suivante.
"Les nuits sont longues de pleurs"
À trois jours de se retrouver sans solution d'hébergement d'urgence, un seul mot résume l'état d'esprit de cette maman de 29 ans. Inquiétude. Pour ne pas dire la peur. "Actuellement, les nuits sont longues de pleurs", nous confie F.
Je vois l'inquiétude dans les yeux de mes enfants. Je n'ai pas de réponse à leur question de savoir où elles vont dormir lundi.
Les deux filles de F sont scolarisées dans le centre-ville de Toulouse à l'école Sermet. L'aînée est en CP tandis que la petite dernière vient d'entrer en petite section de maternelle. Déjà confrontés à une situation similaire l'an dernier, des parents d'élèves ont créé un collectif pour venir en aide aux plus démunis comme F.
"Il y a un an, une famille de notre école s'est retrouvée en danger de mise à la rue. Les parents d'élèves se sont alors rassemblés et mobilisés, nous explique Jessica du collectif Sermet. Cette mobilisation avait contribué, en support des travailleurs sociaux, à ce que les droits de cette famille, et en premier lieu celui d'avoir un toit pour les protéger, soient respectés."
DAHO : le droit à l'hébergement opposable
Jessica nous explique que l'an dernier, lorsqu'une autre mère isolée a failli se retrouver à la rue le jour des trois ans de son enfant, les parents d'élèves ont eu l'idée d'une cagnotte "pour pouvoir payer des nuits d'hôtel. Parce qu'on était vraiment dans le stress qu'elle n'est vraiment rien. On a eu de la chance. L'État est intervenu la veille de la fin de la prise en charge du conseil départemental."
Mais cette fois-ci, le collectif de parents d'élèves a déjà envoyé deux courriers pour alerter les services de la préfecture afin qu'ils prennent le relais afin de trouver une solution d'hébergement pour F et ses enfants. Jusqu'ici pas de réponse, affirme le collectif. Dans ce genre de situation, seul recours : le DAHO, le droit à l'hébergement opposable.
Droit au logement ou à l’hébergement opposables : une légère baisse des recours
— ASH (@ashredaction) April 14, 2023
En 2022, un total de 112 020 recours au titre du droit au logement opposable (Dalo) ou à l'hébergement opposable (Daho) ont été recensés, contre 113 588 l’année précédente.https://t.co/pXeITav48j pic.twitter.com/JkvpIvJao5
"Le recours Daho s’inspire du principe de l’accès inconditionnel à un hébergement (L345-2-2 CASF). À ce titre, il est ouvert à toute personne, quelle que soit sa situation administrative", peut-on lire sur le site du gouvernement. Demande doit être déposée auprès d'une commission de médiation qui a ensuite six semaines pour se prononcer. Mais, en attendant ? "Je ne sais pas quoi faire, où aller", nous répond F.
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"J'ai peur de ce qui peut se passer"
F angoisse à l'idée de se retrouver à la rue avec ses deux filles. "J'ai peur de ce qui peut se passer", confie-t-elle. À trois jours de la date fatidique, cette maman est désormais habitée par un énorme sentiment d'insécurité. Pour ses filles et pour elle-même en tant que femme.
De son côté, le collectif de parents de l'école Sermet continue d'essayer de faire bouger les choses. "Dans cette école, des enfants vont dormir dehors" peut-on lire sur des pancartes qui ont été posées à l'entrée de l'établissement, située à deux pas de la place du Capitole. L'histoire va-t-elle se répéter comme l'an dernier avec l'intervention de l'État la veille de la mise à la rue ? "Souvent, la décision est prise la veille, le jour même ou à J +1" fait remarquer un directeur d'hôtel social à Toulouse. Un infime espoir pour F et ses enfants.
*Par souci d'anonymat de la famille, F est un prénom d'emprunt.