Distillation, arrachage de vignes, quelles sont les solutions pour un marché du vin en tension ? Le 6 février 2023, l'état a annoncé un plan d'aide de financement pour la filière viti-vinicole.
Un millier de vignerons avaient manifesté à Bordeaux le 6 décembre 2022 pour demander l'aide de l'État, nécessaire, selon eux, à la survie de la filière. Le jeudi 26 janvier, une partie d'entre eux s'étaient à nouveau réunis en soutien aux représentants nationaux de la filière qui étaient reçus par le ministre de l'Agriculture Marc Fresneau.
La filière viti-vinicole est majeure pour l'économie française : tant dans l'aspect commercial du pays que dans l'aspect économique de ses départements. Depuis 2019, la filière a essuyé de nombreuses crises.
Un marché en tension
Guilhem Vigroux, secrétaire général de la chambre d'agriculture de l'Hérault décrit les trois chocs qui ont frappé l'économie de manière générale et donc celle du vin :
- En 2019, la mise en place de la taxe Trump sur quelques symboles français dont le vin a rendu l'accès au marché américain très compliqué. Cette taxe est désormais suspendue sur le vin pendant cinq ans.
- Les circonstances de la crise du Covid
- La guerre en Ukraine a augmenté l'inflation et réduit le pouvoir d'achat.
Ces bouleversements de consommation entraînent des difficultés structurelles et conjoncturelles :
- Structurelles : cela signifie que le vin sur le marché n'est plus adapté aux désirs du consommateur. C'est notamment le cas de certains vins de Bordeaux, des Côtes du Rhône et du Languedoc. Ici, la solution aux difficultés économiques serait plutôt l'arrachage des vignes.
- Conjoncturelles : cela signifie qu'un marché a été perdu et qu'il faut le retrouve ou le compenser. C'est notamment le cas dans l'Hérault. Ici, la solution aux difficultés économiques serait plutôt la distillation (le fait distiller le vin en bioéthanol, parfums ou gel hydroalcoolique).
Le 6 février 2023, le Ministère de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire a donc annoncé un plan financier d'aide pour la filière viti-vinicole.
200 millions d'euros levés pour la distillation
Une enveloppe de 160 millions d'euros est prévue au niveau national pour soutenir le processus de distillation de crise.
Des fonds d'urgence ont aussi été demandés au Conseil des ministres de l'Union européenne : 40 millions d'euros sont en attente de validation.
Mais la démarche de distillation n'est pas courante. Utilisée en 2020 pour écouler les excédents de vin et aider les viticulteurs français : si cette solution soulage le marché, elle n'est pas évidente.
Le vin, c'est le fruit de notre travail. On travaille toute l'année et on le détruit. 5 ou 10% de notre vin distillé, ça fait mal au ventre. C'est perturbant mais c'est un moindre mal.
Guilhem Vigroux, secrétaire général de la chambre d'agriculture de l'Hérault
Distiller 65 à 70 hectolitres de sa production, ce n'est pas rémunérateur explique Guilhem Vigroux. "On perd un peu d'argent mais parfois il vaut mieux faire un sacrifice sur une petite partie de sa récolte plutôt que de perdre de la valeur sur toute sa récolte : c'est une question de bonne gestion."
Hérault : distillation ou arrachage ?
Dans l'Hérault, selon les chiffres du département, la viticulture représente 80 % de l’agriculture héraultaise. 84 900 hectares, soit près de 45% de l'espace agricole est consacré à la viticulture.
La situation économique de la filière viti-vinicole est très hétérogène. D'après Guilhem Vigroux, il a notamment un problème d'évacuation du vin BIO, à cause de la baisse du pouvoir d'achat des Héraultais.
Si quelques zones viticole devront envisager l'arrachage des vignes comme solution, le département est plus enclin à envisager la distillation.
"On a bon espoir que les professionnels du vin fassent leurs demandes de dossier de distillation au niveau national mais on espère vraiment que tout le monde va y aller pour soulager le marché en tension".
Pour le moment l'économie est perturbée mais le viticulteur, optimiste, espère un rapide retour à la normale.