Jugé devant la cour d'assises du Tarn, à Albi, Guerric Jehanno a été condamné à 30 ans de prison pour l'enlèvement, la séquestration, le viol et le meurtre d'Amandine Estrabaud, disparue en 2013 à Roquecourbe et dont le corps n'a jamais été retrouvé.
Ses silences, ses dénégations et ses déclarations d'innocence répétées au cours de son procès n'ont pas convaincu les jurés. Guerric Jehanno vient d'être condamné à 30 années de réclusion criminelle par la cour d'assises du Tarn.
Au terme de 4 heures de délibéré, les jurés l'ont déclaré coupable de tous les faits qui lui étaient reprochés : l'enlèvement, la séquestration, le viol et le meurtre d'Amandine Estrabaud, le 18 juin 2013 à Roquecourbe. Ils ont suivi les réquisitions du procureur qui avait demandé mercredi matin une peine de 30 ans de réclusion criminelle, sans retenir la préméditation, parlant d'un crime "d'opportunité".
La mère d'Amandine Estrabaud a fondu en larmes à l'énoncé du verdict, tout comme le reste de sa famille. Guerric Jehanno, lui, n'a rien laissé paraître.
Le soulagement de la famille Estrabaud
"Enfin justice lui est rendue" a dit la mère d'Amandine."C'est le triomphe d'une vérité judiciaire" a estimé pour sa part, l'avocat de la famille, Pierre Debuisson."C'est d'abord une pensée pour la famille et pour la maman d'Amandine qui se bat depuis des années pour que la vérité triomphe.
" Nous avons maintenant l'espoir que celui-ci aille jusqu'au bout et reconnaisse enfin les faits et dise où il a enterré le corps." a-t-il poursuivi.La justice vient de reconnaître officiellement la culpabilité de Guerric Jehanno alors qu'il n'y avait pas de corps, selon ses avocats, pas de témoin direct, pas d'aveu auprès des juges. Et c'est une décision en ce sens exceptionnelle puisque ça balaie la jurisprudence Viguier et surtout cela consacre le principe fondamental de l'intime conviction.
A ses côtés, Rémy Estrabaud, le frère d'Amandine, qui ne s'est jamais exprimé sur la disparition de sa soeur est très ému. "Je suis très heureux, avec toute ma famille, que la culpabilité de Jehanno soit reconnue. Maintenant, j'attends de savoir où est Amandine."
Il poursuit en larmes : "pour moi, son frère, c'est très important de savoir où elle est pour qu'on puisse se recueillir dignement, que quand j'ai besoin d'elle, je puisse me recueillir sur sa tombe comme tout un chacun devrait avoir la possibilité de le faire.
Pour moi, c'est primordial, au-delà de cette culpabilité qui a été reconnue qu'il nous dise où il a mis le corps, pour qu'on puisse enfin avoir la paix qu'on a tant méritée.
Un "simulacre de justice" pour la défense
Après le verdict, Marie-Hélène Pibouleau a pour sa part exprimé "un sentiment de consternation".Si on condamne Guerric Jehanno avec les éléments qui sont au dossier, alors dans quel cas on acquitte ?
"Je suis un peu désespérée par le fonctionnement de notre justice, je ne la comprends plus" a-t-elle dit. "Nous avons désormais la preuve qu'on peut condamner un homme à 30 ans de réclusion avec rien. C'est un simulacre de justice".
Elle a annoncé son intention de faire appel "immédiatement".
Une disparition inquiétante en 2013
Amandine Estrabaud, 30 ans, a disparu le 18 juin 2013. Ce jour-là, elle a quitté son travail au lycée Anne Veaute de Castres un peu après 13h15 et est rentrée, en partie en stop, à son domicile de Roquecourbe, dans le Tarn.Sa mère, inquiète de ne pas avoir de ses nouvelles, donne l'alerte le lendemain. Sur place, les gendarmes découvrent la porte laissée ouverte. Un peu plus loin, ils repèrent des traces de véhicule et trouvent les chaussures de la jeune femme ainsi que ses boucles d'oreilles. La dernière personne à avoir vu Amandine Estrabaud vivante, c'est sa voisine. Elle la voit arriver chez elle à bord d'un fourgon blanc, accompagnée d’un homme, qu'elle ne distingue que de dos. Il est à peine plus grand qu’Amandine, d’un gabarit charpenté, les cheveux châtain clair et porte un pantalon de chantier avec une bande orange. Amandine lui paraît décontractée quand elle la voit ouvrir la porte de sa maison. Elle ne donnera ensuite plus jamais signe de vie.
Rapidement, la piste de l'enlèvement est privilégiée par les gendarmes, une enquête pour disparition inquiétante est ouverte.
Guerric Jehanno, "le suspect vers qui tout converge"
Un an plus tard, le 17 juin 2017, Guerric Jehanno, un maçon du village est placé en garde à vue. C'est sa propre mère qui a alerté les gendarmes, leur expliquant que son fils tient des propos incohérents, qu'il répète qu'il n'est pas un assassin, que si on trouve du sang dans sa voiture, c'est celui des truites, qu'il sent une odeur de charogne et a vu un homme avec une pelle là où il va à la pêche...Mais il a un alibi pour le jour de la disparition d'Amandine : il travaillait sur un chantier à Castres, selon son patron.
Finalement, l'enquête démontrera que son patron s'est trompé, qu'il travaillait sur un chantier à proximité de la maison de la jeune femme, le jour de sa disparition. Il est de nouveau placé en garde à vue en avril 2016. Quelques jours plus tard, il est mis en examen et écroué pour enlèvement et séquestration.
En juin de la même année, il sera aussi mis en examen pour viol et meurtre après s'être confié à son codétenu, au sujet de la disparition de la jeune femme.
Des confessions qu'il répètera à plusieurs autres co-détenus au cours de sa détention à la maison d'arrêt de Seysses. Et dont il dira au cours de son procès "qu'il a tout inventé".Au cours de leurs plaidoiries, les deux avocats de Guerric Jehanno avaient souligné "l'absence de preuves et d'éléments matériels" dans ce dossier et demandé que le bénéfice du doute et la présomption d'innocence l'emportent.