Mardi 13 février, la Commission européenne a adopté une exemption aux obligations de jachères sur les terres agricoles. Bonne nouvelle pour certains, mesure accessoire pour d'autres... la décision divise au sein de la profession. Illustration en Côte-d'Or.
Il s'agissait de l'une des revendications-clés des syndicats lors des mobilisations d'agriculteurs. Mardi 13 février, la Commission européenne a finalement tranché : la profession va bénéficier d'une exemption partielle aux obligations de jachères, codifiées par la Politique agricole commune (PAC).
Jusqu'à présent, les agriculteurs devaient en effet laisser une certaine proportion de leurs terres à l'état naturel pour toucher les règles européennes. Proportion qui, à la suite de la décision de l'Europe, correspondra à 4% desdites terres... qui pourront désormais être utilisées pour des cultures intermédiaires ou fixatrices d'azote (comme les lentilles, par exemple).
"Nos revenus vont augmenter"
Une mesure qui satisfait largement Philippe Fouailly, exploitant céréalier à Beaune (Côte-d'Or) rencontré par France 3 Bourgogne. "Les jachères, il faut quand même les entretenir même si on ne fait rien pousser dessus. C'est du temps et du gazole dépensés en plus, qui ne rapportent rien. Un gros manque à gagner."
Je trouve inadmissible de faire des jachères alors que des millions de personnes meurent de faim, pour ensuite aller chercher du blé ou du maïs à l'autre bout de la planète.
Philippe Fouailly,céréalier à Beaune (Côte-d'Or)
Lui dispose actuellement d'une parcelle d'un hectare qui n'accueille aucune culture. Il envisage désormais de s'en servir, dès le printemps, pour produire du soja ou du colza. "Les jachères, c'est une perte de revenus ! Si on augmente la surface travaillée, on va pouvoir vendre plus et donc nos revenus vont de fait augmenter."
Un "mauvais signal"
Tous ne sont cependant pas aussi satisfaits. Car les terres laissées en jachère sont parfois peu fertiles et ne sont pas toujours adaptées aux cultures. "Quand on parle de jachères, ça peut être n'importe quelle structure 'agro-écologique', c'est-à-dire des haies, des mares, des prairies...", explique Jérôme Gaujard, agriculteur à Chemin-d'Aisey (Côte-d'Or), à notre journaliste Gabriel Talon.
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Pour l'exploitant, qui est également membre de la Confédération paysanne, cette exemption est à la fois "un mauvais signal" et une "mesure accessoire". "La biodiversité est en train de s'effondrer : il faut absolument qu'on lui donne un espace pour s'épanouir, parce qu'elle rend un immense service à l'agriculture. L'agriculture doit se faire en harmonie avec la nature."
À noter que la mesure, dénoncée aussi par plusieurs associations écologiques, n'est que provisoire. Elle doit - pour l'heure - durer jusqu'à la fin de l'année 2024.