Après deux semaines de règlements de comptes liés au trafic de drogue, sa présence était attendue à Dijon. Le ministre de l'Intérieur est arrivé en début d'après-midi pour présenter l'opération place nette XXL. Sur place, il s'est fait interpeller par la mère d'un des jeunes décédés récemment.
Il est près de 14 heures. Gérald Darmanin vient tout juste d'arriver dans le quartier de Fontaine d'Ouche, à Dijon, et il se fait déjà interpeller. Celle qui interpelle le ministre de l'Intérieur, c'est Anissa*, la mère du jeune de 19 ans qui est mort poignardé, il y a une semaine. Accompagnée d'un de ses enfants, en larmes, tous deux vêtus de noir, ils souhaitent lui communiquer leur détresse.
"Il y avait un truc qui tournait dans les réseaux comme quoi Fontaine d'Ouche était faible et qu'il fallait qu'ils se rendent à Talant pour montrer qu'ils étaient forts. C'était juste une balade en voiture... Malheureusement, mon fils se trouvait dedans...", lance-t-elle avant de reprendre de vive voix :
"Mon fils n'avait aucune histoire de drogue. Je n'ai jamais vu de drogue rentrer chez moi. On n'avait pas de problème de trafic de drogue, c'était plus un problème de jeune du quartier, l'entente entre eux."
Anissa*
"Un quart des 67 interpellés seraient des mineurs"
La discussion ne dure qu'une simple minute, un visage sur un fait divers... Gérald Darmanin fait alors quelques pas et la discussion devient plus officielle avec les élus locaux. "67 interpellations ont eu lieu depuis que l'opération a commencé en début de semaine. C'est au-delà de notre objectif qui était fixé à 64 interpellations. Une présence massive dans des quartiers populaires... Nous devons rendre le calme et la paix publique aux quartiers populaires", lance le ministre accompagné du procureur de la République de Dijon.
Des interpellations qui entrent dans le cadre de l'opération place nette XXL lancée dans l'agglomération dijonnaise depuis le 25 mars. "Un quart des 67 interpellés seraient des mineurs. Ça pose la question de la réponse pénale pour les mineurs", annonce le ministre. Selon le procureur, Olivier Caracotch, il y en aurait deux types de profils parmi les jeunes interpellés : "certains ancrés dans la délinquance, jeunes, souvent avec des antécédents judiciaires, des personnes. D'autres sont plus classiques, de tous âges, parfois moins d'antécédents judiciaires."
500 policiers mobilisés chaque jour
Reste une question importante : la réponse pénale pour ces mineurs interpellés dont la peine est souvent moins élevée, lorsqu'elle n'est pas inexistante. "On dit souvent que la justice a du mal à répondre à la délinquance des mineurs. Il y a un certain nombre de garanties qui protègent ces mineurs mais le code de justice des mineurs est un vrai progrès dans la sévérité de la réponse", illustre le procureur de la République.
Il faut dire que cette opération de grande ampleur mobilise 500 policiers par jour, et 500 gendarmes par semaine, à Dijon et son agglomération. La Division de la criminalité territoriale et la Division de la criminalité organisée et spécialisée procèdent à des interpellations sur des faits de violence et de stupéfiants.
Le service départemental de la sécurité publique mène aussi des opérations de contrôle de personnes et de véhicules. La BAC, une section d'intervention, une brigade spécialisée de terrain, des effectifs cynophiles ainsi que des CRS.
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Un dispositif déployé après cinq faits de violence à Dijon
Ce dispositif massif déployé par le gouvernement a été lancé quelques jours seulement après cinq faits de violence perpétrés en moins de quinze jours dans l'agglomération. Ces faits étaient tous directement reliés au trafic de drogue qui sévit dans les quartiers, notamment des Grésilles, de Fontaine d'Ouche mais aussi à Chenôve ou encore à Talant.
Une marseillisation?
Aussi parle-t-on ici de "marseillisation", puisque ces règlements de compte se dérouleraient pour certains entre des bandes locales et des Marseillais qui tenteraient de s'installer ou de reprendre les points de deals. De quoi mettre l'agglomération de Dijon sous le feu des projecteurs pour mettre un terme à la pieuvre des réseaux de trafics de drogue.
Pourtant, selon le ministre de l'Intérieur, rien n'est aussi simple : "Il n'y a plus le gang des Lyonnais, des Corses et des Marseillais comme on le voit à la télévision...Ce n'est plus le cas aujourd'hui. Aujourd'hui, il y a un lien entre petite délinquance et grande délinquance, entre délinquance et terrorisme...Vous voyez que la vie de la drogue, c'est le blanchiment dans des commerces illicites qui pourrissent la vie des quartiers, c'est des gamins de 14-15 ans parfois exploités...", commente Gérald Darmanin,
"Je suis aussi venue pour dire aux Dijonnais et à tous les habitants de Côte-d'Or que bien sûr, nous ne laisserons pas faire, mais on n'est pas du tout au niveau de ce qui existe à Marseille ou en Seine Saint Denis."
Gérald Darmanin
Outre les problèmes de drogue, le ministre est venu aussi remette aussi des médailles aux trois policiers qui sont intervenus dans le collège de Chenôve lors de la tentative d'attaque d'un élève auprès de sa principale.
(*) Les prénoms ont été modifiés pour respecter l'anonymat.