Polluants éternels : dans le Jura, les analyses de cheveux de plusieurs habitants révèlent la présence de PFAS

Le 4 février 2024, des cheveux d’habitants du secteur de Tavaux près de Dole dans le Jura ont été prélevés pour faire des analyses. Les résultats ont été dévoilés ce 7 mars par les écologistes à l’origine de cette initiative.

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Un syndicaliste de l'ancienne usine Solvay de Tavaux, un agriculteur de Peseux, une élue de Dole, une adolescente de Damparis. C’est sur un panel d’habitants du Jura de tous les âges qu’ont été réalisées ces analyses. Objectif : y détecter la présence de "polluants éternels", “car les PFAS, y' en a partout", expliquait le jour du prélèvement Dominique Voynet, secrétaire régionale d'Europe-Ecologie-les-Verts (EELV) et ancienne ministre de l'Environnement. 

Le secteur choisi par Europe Écologie Les Verts pour faire ces analyses n’a pas été choisi par hasard. À Tavaux près de Dole, se trouve une usine du groupe Solvay (appartenant désormais à l'entité Syensqo) qui fait l’objet d’une enquête préliminaire pour pollution des eaux, des milieux et écocide lancée après la publication en février 2023 d’une enquête du journal Le Monde. Selon le quotidien, l'usine de Tavaux dans le Jura est l'un des cinq producteurs de PFAS en France. 170.00 sites en Europe seraient pollués dont une cinquantaine en Bourgogne Franche-Comté.

Quels sont les résultats de ces analyses dans le Jura ?

Les cheveux des quatre Jurassiens ont parlé. Sur 12 types de PFAS recherchés, quatre sont présents. Le député de la Gironde Nicolas Thierry n’est pas surpris : “On voit que sur des pollutions historiques, PFOA, PFOS, des molécules interdites depuis des années, tout le monde est contaminé. Je fais le tour de France, tout le monde est contaminé où qu’on soit. Après, il y a des taux sur une personne qui est très jeune (l’adolescente, ndlr). Il y a des taux très élevés. C’est à déterminer. Les prélèvements ne nous permettent pas de déterminer d’où vient la pollution” explique le député au micro de notre journaliste Emmanuel Rivallain. 

Dans un mail transmis à France 3 Franche-Comté, le groupe Syensqo indique "que l'usine de Tavaux n'a jamais utilisé de PFOA et de PFOS dans les processus de fabrication de polymères. Il ne peut dès lors y avoir de lien entre les résultats de ces analyses et les activités de l'usine. Il en va de même pour la présence de ces substances dans l'eau."

PFAS, ces polluants invisibles et sournois

Les PFAS (prononcer "pifasses") sont l’acronyme de per- et polyfluoroalkysées. Ce sont des substances chimiques qui sont présentes dans de nombreux objets de notre quotidien pour leur pouvoir antiadhésif, imperméabilisant, et résistance aux fortes chaleurs.

On en trouve par exemple dans les poêles de nos cuisines, dans les emballages alimentaires, les lentilles de contact, les lignes de pêche, les revêtements des touches de piano ou encore les répulsifs contre les moustiques ou les semi-conducteurs. Avec le temps, ces substances s'accumulent dans l'air, le sol, les eaux des rivières, la nourriture... jusqu'au corps humain. Un polluant pernicieux, invisible et qui va rester éternellement dans la nature. Ces polluants sont capables de se déplacer sur de très longues distances, loin de la zone où ils ont été émis.

Dans la famille des PFAS, les produits sont multiples. Les plus répandus sont le PFOA (acide perfluorooctanoïque) et le PFOS (sulfonate de perfluorooctane). En novembre dernier, ces deux substances ont été classées respectivement "cancérogène pour les humains" et "cancérogène possible" par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC). En cas d'exposition sur une longue période, les PFAS peuvent aussi avoir des effets sur la fertilité.

Un projet de loi pour avancer sur la question des polluants éternels

Le député de la Gironde Nicolas Thierry estime que “tout le monde est concerné par les PFAS, tout le monde en a dans son corps. Il faut une réponse adaptée” estime le député qui veut agir en lanceur d’alerte, sans prétendre effectuer une étude épidémiologique pour autant. 

Pourquoi un député comme moi doit aller arracher des cheveux sur des gens, c’est plutôt cela la question que l’on pose.

Nicolas Thierry, député EELV de la Gironde, spécialiste des polluants éternels

Le député estime que les derniers gouvernements n’ont rien fait sur ce sujet alors que l’on connait la toxicité de ces molécules. Il a déposé un projet de loi qui sera examiné le 4 avril 2024. Ce projet demande l’interdiction des polluants éternels, dans les produits ou l’on a les alternatives pour s’en passer (emballages alimentaires, cosmétiques). Le député souhaite également que des tests soient réalisés partout en France pour détecter ces polluants. Et que les entreprises mises en cause soient taxées pour payer la dépollution. 

Dialoguer avec Syensqo à l'usine de Tavaux

Les écologistes du Jura ont noué le dialogue avec l’usine de Tavaux, que tout le monde appelle encore l'usine Solvay, mais qui appartient désormais à Syensqo. Une délégation a été reçue ce 7 mars. “C’est la seule entreprise en France qui a accepté d'ouvrir le dialogue avec les écologistes” souligne Dominique Voynet, secrétaire d’Europe Écologie les Verts en Bourgogne-Franche-Comté. “On va leur demander si c’est possible de doubler la capacité de production des ateliers fluorés sans augmenter les rejets. On est très inquiets par les relargages de PFAS dans l’eau potable” précise l’ancienne ministre. Dans le Jura, les résultats des analyses d’eau effectuées dans le secteur de Tavaux ne seront connus que dans quelques semaines. 

Des polluants éternels à forte concentration dans le secteur de Lyon

La prise de conscience sur les polluants éternels avance un peu partout en France. Les actions aussi. Ces derniers mois, plusieurs collectivités et des particuliers ont lancé des plaintes collectives pour "mise en danger de la vie d'autrui" en s'inquiétant de "concentrations alarmantes" de PFAS liés à des sites industriels de la vallée de la chimie, au sud de Lyon, où se trouve le site d'Arkema.

Début mars, la préfecture a émis de nouvelles recommandations sanitaires pour les riverains de ce site industriel : il y est désormais recommandé de ne pas manger les fruits et légumes produits dans les jardins potagers situés dans un périmètre de 500 mètres autour de l'usine Arkema.

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