Julie Ollivier, originaire de Mâcon (Saône-et-Loire), est la première femme à avoir accusé Sébastien Cauet de viol et d'agression sexuelle. Cinq jours après la mise en examen de l'animateur, elle s'est confiée à France 3 Bourgogne.
L'affaire a éclaté suite à son témoignage. Le 18 novembre 2023, Julie Ollivier, originaire de Mâcon (Saône-et-Loire), se rendait à la gendarmerie de Saint-Laurent-sur-Saône (Ain) pour porter plainte contre Sébastien Cauet. La jeune femme l'accusait de viol et d'agression sexuelle, les premiers faits ayant été commis, selon elle, alors qu'elle était mineure.
Depuis, plusieurs autres femmes ont à leur tour accusé l'animateur de faits similaires. Accusations qui ont abouti, vendredi 24 mai dernier, à la mise en examen de Cauet pour viols et agression sexuelle sur mineure. S'il a toujours nié en bloc, l'ancien présentateur de NRJ a été placé sous contrôle judiciaire avec obligation de verser un cautionnement de 100 000 euros et de suivre des soins.
Un "soulagement" pour Julie, qui a vu sa vie bouleversée depuis sa prise de parole. Cinq jours après cette nouvelle avancée dans l'affaire judiciaire, elle a accepté de témoigner auprès de France 3 Bourgogne.
Quelle a été votre réaction quand vous avez appris la mise en examen de Sébastien Cauet ?
Julie Ollivier : C’est un journaliste de RTL qui m’a appelée et qui m’a demandé si j’avais vu la nouvelle. À ce moment-là, j’étais en train de prendre de l’essence, et finalement j'étais tellement abasourdie et choquée que je suis repartie sans avoir pris de carburant.
Ça a été un grand soulagment, une première reconnaissance. Ça montre que la brigade des mineurs a suffisamment investigué pour avoir des faits, que la justice a des éléments. Quand ils m'avaient entendu, je m'étais dit que comme beaucoup d'autres choses, ça passerait à l'as. Donc la mise en examen m'a touchée : je me suis dit qu'enfin, on me prenait au sérieux.
Comment votre vie a-t-elle été bouleversée à partir du moment où vous avez pris la parole ?
Julie Ollivier : Des choses mauvaises, voire très mauvaises, me sont arrivées. Au début, j'ai parlé de façon anonyme sur un compte Twitter, ce qui m'a très vite valu des ennuis : j'ai été contactée par une fausse avocate, des gens sont venus sonner chez moi... c'était assez terrible.
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Quand j'ai été entendue par la brigade des mineurs, fin mars, ça a été très difficile. J'y suis restée 8 heures et à la fin j'en suis ressortie lessivée, parce qu'ils te posent des questions très précises. Tu te remémores tout : au début ils te posent des questions basiques sur ta vie sexuelle, sur tes pratiques... ensuite ils te demandent comment se sont déroulés l'agression et le viol, te font te rappeler les détails, te demandant de les dessiner... ça m'a à la fois soulagée et détruite.
Donc pour oublier tout ça, je suis tombée dans l'alcool. J'ai aussi perdu mon travail - étant dans la fonction publique, ça n'a pas trop plu que je devienne "médiatique". Maintenant, je suis hospitalisée pour le traumatisme et la dépendance à l'alcool. J'en rêvais, j'y pensais tout le temps, c'était obsessionnel.
Dès le début, vous avez choisi de médiatiser votre parole. C'était un moyen de montrer que les victimes pouvaient parler ?
Julie Ollivier : Oui, j'ai voulu montrer que c'était faisable. Ces gens-là ont l’impression qu’avec de l’argent on peut tout acheter, tout avoir et qu’on peut faire taire tout le monde. Sauf que pas du tout. C'est pour ça qu'il a porté plainte pour extorsion en bande organisée, parce qu'il n'aurait jamais imaginé une seule seconde que moi, une Mâconnaise perdue dans la campagne, je puisse parler.
C'est 15 ans de ma vie qui sont partis en fumée.
Julie
Quand on vient porter plainte et qu'on dit que c'est contre monsieur Sébastien Cauet, tout de suite, on pense qu'on le fait pour l'argent. On est vite catalogué. Donc c'était aussi une façon de casser le tabou, de montrer que la parole libère et que les filles qui ont été victimes n'ont plus à avoir peur. La peur doit changer de camp parce qu'on n'a rien à se reprocher.
Avec le recul, quel regard portez-vous sur l'affaire ?
Julie Ollivier : Je ne pensais pas que ça pourrait avoir autant d'impact. À titre personnel, ça faisait des années que je le cachais à ma famille, que je ne montrais rien. Mais aujourd'hui je sais que je m'en voudrai à vie de n'en avoir jamais parlé à ma grand-mère, qui est partie depuis, mais qui m'aurait soutenue jusqu'au bout et qui aurait fait tout ce qu'il fallait pour pour moi.
Dans ce genre de situation, c'est vrai qu'on se sent seule. J'ai la chance d'avoir mon avocate qui me soutient pas mal, et mes parents aussi. Les autres victimes, je ne les connais pas et il vaut mieux que je ne les connaisse pas, afin d'éviter de donner du poids à la plainte pour extorsion en bande organisée.
Plus de six mois après votre plainte, comment vous sentez-vous aujourd'hui ?
Julie Ollivier : Maintenant, je suis sous antidépresseurs. J'essaie d'avoir des projets dans la vie mais pour l'instant tout tourne autour de ça. Je vais avoir 26 ans et jusqu'à présent j'ai été incapable d'aimer et d'avancer dans la vie. C'est 15 ans de ma vie qui sont partis en fumée. Il va y avoir un gros travail de reconstruction à la fois morale et physique. Après, on verra.
La mise en examen a permis d'affirmer qu'il y avait des faits qui lui étaient reprochés, qui étaient véritables. Mais au fond, ça n'apporte pas un vrai soulagement. Je pense que pour toutes les victimes, c'est pareil et je ne sais pas si sur la reconstruction, la justice peut vraiment aider. Ce que je voudrais aujourd'hui, c'est pouvoir le regarder dans les yeux et lui dire tout le mal qu'il m'a fait. Je veux qu'il le reconnaisse.