Vanessa, une habitante de Saône-et-Loire, a été victime d'un viol conjugal il y a plus de 40 ans. Elle n'a que très rarement parlé de son histoire, même à ses proches, mais a accepté de témoigner pour inciter les victimes à se manifester auprès des autorités.
C'est un fléau dont on ne mesure que trop peu l'étendue. Impossible en effet de déterminer combien de femmes sont victimes, chaque année, de viol conjugal - nul doute que le chiffre exact nous glacerait le sang. Mais l'une d'elle, une habitante de Saône-et-Loire qui souhaite rester anonyme, a accepté de nous raconter son histoire.
Les faits remontent à plus de 40 ans. Celle que nous appellerons Vanessa, toujours très émue à l'idée de dévoiler ce qu'elle a vécu, vit à l'époque avec son mari et ses enfants. Elle dit n'avoir jamais subi de violences de la part de son conjoint, mais elle sait que celui-ci la trompe avec plusieurs maîtresses. Puis un jour, ordinaire d'apparence, tout bascule. "J'ai vécu un viol. J'ai été violée par mon mari. C'est venu d'un coup."
"Même si c'était des rapports forcés, il restait mon mari"
Immédiatement, elle décide de quitter le domicile familial. "Dans les heures qui ont suivi, j'ai attendu qu'il parte", se souvient-elle. "J'ai rassemblé mes affaires et ai pris mes enfants. Je suis partie juste après, et je les ai déposés chez ma mère." À celle-ci, elle explique avoir quitté son époux, sans donner la véritable raison ; elle affirme avoir eu assez de ses nombreuses infidélités. "Ce qui était vrai aussi", glisse-t-elle.
J'en assumais la responsabilité, car c'est comme s'il exigeait son devoir conjugal. J'ai mis très longtemps à admettre que c'était un viol.
Vanessa (le prénom a été modifié),victime de viol conjugal
Vanessa engage alors des démarches auprès des gendarmes et d'assistantes sociales, pour se reloger et récupérer des affaires, notamment des meubles. Elle ne dépose toutefois jamais plainte et n'évoque pas davantage son viol. "Pour moi, à l'époque, je ne pensais pas encore que c'en était un. Car même si c'étaient des rapports forcés, il restait mon mari."
Le silence pour protéger sa famille
Depuis, Vanessa a totalement coupé les ponts avec son ex-conjoint. Lui n'est jamais revenu vers elle, pas même pour demander des explications quant à son départ. "À croire qu'il savait", lance-t-elle amèrement. "Mais il ne s'est jamais occupé de ses enfants non plus." Elle a cherché à se reconstruire, sans demander de l'aide et sans jamais, ou presque, raconter son histoire. "Ma famille ne sait pas. Mon deuxième mari l'a su, le gynécologue qui m'a consultée après cet acte aussi, et puis deux amis. C'est tout."
Si elle peut désormais parler de ce traumatisme le plus sereinement possible, elle l'assure, elle a délibérément choisi de ne pas mettre sa famille au courant. "En faisant ça, je protège mes enfants", juge-t-elle. "Avec le recul, je me rends compte que ne pas le raconter, pour moi, c'est un bien." Mais en rendant publique son histoire, Vanessa espère avant tout dire aux femmes "qui vivent ça maintenant qu'elles ne doivent pas hésiter à porter plainte, à se défendre, à partir tout de suite. Moi, si je ne l'avais pas fait, je ne sais pas si je serais encore là aujourd'hui."