Michel Fourniret a commis son premier crime dans l'Yonne. Il a lui-même reconnu devant la justice son implication dans deux autres disparitions de jeunes filles à Auxerre. Retour sur l'itinéraire du tueur en série dans le département.
22 octobre 1987 : Michel Fourniret s’installe dans l’Yonne
Michel Fourniret sort de prison en octobre 1987, après avoir purgé une peine pour plusieurs agressions sexuelles. Dès sa sortie, il retrouve Monique Olivier, avec qui il avait entamé une relation épistolaire pendant sa détention. Le couple décide de s’installer dans une maison de Saint-Cyr-les-Colons, dans l’Yonne.11 décembre 1987 : Michel Fourniret commet son premier crime
Moins de deux mois après leur arrivée dans l’Yonne, le couple Fourniret-Olivier commence son parcours meurtrier. Il prend pour cible Isabelle Laville, 17 ans, scolarisée au collège Bienvenu-Martin d’Auxerre.Le duo utilise un terrible stratagème pour la mettre en confiance. Alors qu'Isabelle Laville rentre du collège à pied, un véhicule s’arrête à sa hauteur. Une femme est au volant, elle cherche son chemin, c’est Monique Olivier. La jeune fille accepte de monter avec elle.
Un peu plus loin, la voiture marque un second arrêt. Un homme, un bidon d'essence à la main, réclame de l'aide, c'est Michel Fourniret. Isabelle Laville sera droguée, violée et étranglée. Son corps ne sera retrouvé que bien plus tard, le 11 juillet 2006, dans un puits désaffecté à Bussy-en-Othe, sur les indications du tueur en série.
Cette affaire a été jugée en 2008 par la Cour d'assises des Ardennes en même temps que six autres crimes commis par Fourniret. Il a été condamné à la réclusion criminelle incompressible, sa compagne Monique Olivier à la perpétuité assortie d'une peine de sûreté de 28 ans.
8 juillet 1988 : Marie-Angèle Domece disparaît
Marie-Angèle Domece, 18 ans, est hébergée au foyer Leclerc de Fourolles d'Auxerre. Le 8 juillet 1988, alors qu'elle est en chemin pour la gare, la jeune femme handicapée mentale se volatilise. "Elle a disparu entre le foyer et la gare. Elle n'est jamais arrivée à la gare, elle n'a pas échangé son bon de transport contre un billet de train", raconte sa sœur Véronique Domece au magazine 13h15 de France 2 en 2019. À l'époque, Michel Fourniret n'est évidemment pas soupçonné. La justice n'a pas encore eu connaissance de ses crimes. "Il y a eu une toute petite enquête et un non-lieu en 1989", se souvient Véronique Domece.Le nom de Fourniret est associé à cette affaire pour la première fois en 2005. Sa compagne, Monique Olivier l'accuse son mari de deux meurtres, sans donner le nom des victimes. Mais sa description fait penser aux cas Domece et Parrish (voir ci-dessous). En 2006, elle revient sur ses déclarations. Mais deux ans plus tard, la justice met en examen Fourniret dans les deux affaires pour assassinat, Monique Olivier pour complicité.
En 2011, la justice ordonne un non-lieu dans cette affaire. Non-lieu annulé un an plus tard, en juin 2012. Les gendarmes reprennent alors l'enquête à zéro. "Ils ont pu retrouver pas mal de copines de Marie-Angèle qui ont pu parler. Elles ont pu dire que Fourniret traînait quand même devant le foyer", affirme Véronique Domece à France 2.
En février 2018, de nouveau entendu par la justice, Michel Fourniret s'attribue cette fois-ci les meurtres Parrish et Domece. Pour tenter de retrouver le corps de Marie-Angèle Domece, des fouilles sont organisées en mars 2018 dans la forêt de Saint-Cyr-les-Colons, mais elles ne donnent rien.
En septembre de la même année, c'est dans un jardin ayant appartenu à la famille du tueur que de nouvelles fouilles ont lieu en présence de Michel Fourniret. Mais là encore, rien de probant n'en ressort.
"Il ne donne pas d'éléments, on ne sait pas pourquoi. Est-ce que c'est sa mémoire qui défaille ou est-ce qu'il ne veut pas qu'on retrouve ce corps ? Ça reste pour le moment une inconnue", nous explique alors l'avocat Didier Seban, qui défend la famille Domece comme d'autres familles de victimes supposées de Fourniret.
En septembre 2019, une nouvelle reconstitution en présence de Fourniret et d'Olivier est organisée dans plusieurs endroits liés aux affaires Parrish et Domece. À Avallon, Auxerre, Saint-Bris-le-Vineux, Saint-Cyr-les-Colons ou encore Monéteau.
Notre reportage du 20 septembre 2019
17 mai 1990 : Joanna Parrish retrouvée morte dans l'Yonne
Joanna Parrish, 20 ans, est assistante d'anglais au lycée Jacques-Amyot d'Auxerre. Elle disparaît le 16 mai 1990. Le corps de la jeune Britannique est retrouvé le lendemain sur les bords de l'Yonne, à l'écluse de Monéteau. La jeune femme était nue, l'autopsie révèle qu'elle a été violée et battue avant sa mort.Durant quinze ans, le mystère demeure autour de sa mort. L'affaire est relancée en 2005 par les aveux de Monique Olivier, sur lesquels elle revient en 2006. Le couple bénéficie d'un non-lieu en 2011, annulé un an plus tard.
Le dernier rebondissement date de février 2018 quand, entendu par un juge d'instruction, Michel Fourniret reconnaît avoir "croisé la route" de Joanna Parrish et Marie-Angèle Domece. Il fait alors des aveux "réitérés" selon l’avocat de la famille Parrish, Me Dider Seban, qui entrevoit "l’aboutissement d’un long combat, après 28 ans".
L'instruction touche à sa fin dans les dossiers Parrish et Domece. Un procès pourrait se tenir prochainement. Mais le 20 novembre dernier, Michel Fourniret a été hospitalisé en réanimation à Créteil, en région parisienne.
Selon franceinfo, il aurait été admis pour des problèmes cardiaques, après avoir été retrouvé allongé dans sa cellule de la prison de Fresnes. Âgé de 78 ans, il est par ailleurs atteint de la maladie d’Alzheimer.
La piste Fourniret explorée dans d'autres affaires
La justice enquête sur l'implication possible de Michel Fourniret dans d'autres disparitions de jeunes femmes. Tout dernièrement, la juge d'instruction Sabine Kheris en charge des meurtres attribués à Michel Fourniret a demandé l'exhumation du corps d'une femme enterrée sous X en octobre 1997 à Mont-Saint-Sulpice, dans l'Yonne.Exhumer ce corps pourrait permettre d'en comparer l'ADN à différentes traces retrouvées sur un matelas saisi en 2003 dans une maison de Ville-sur-Lumes (Ardennes), près de Charleville-Mézières. C'est dans cette maison, affirme l'ex-épouse du tueur en série âgé aujourd'hui de 78 ans, qu'il aurait violé et tué Estelle Mouzin.
La famille de Virginie Bluzet demande également que la piste Michel Fourniret soit étudiée dans l'enquête sur le meurtre de cette jeune femme de 21 ans retrouvée sans vie en Saône-et-Loire en 1997. Le parquet a donné un avis favorable à l'examen de cette hypothèse, tout comme à l'examen de la piste Pascal Jardin, condamné pour un meurtre commis dans le secteur en 1996, celui de Christelle Blétry. La justice dira en décembre 2020 si elle accepte la poursuite de l'enquête.