Alors que Paris s'apprête à accueillir les Jeux Olympiques d'été, quelle a été la place des Bretons au cœur de ce rendez-vous sportif depuis sa création en 1896 ? Derrière chaque médaille, s'inscrit une histoire d'athlète singulière. Deux livres édités récemment retracent cette épopée.
Les Jeux olympiques d'été de 2024 seront célébrés du 26 juillet au 11 août 2024 à Paris. À près de 100 jours de l'événement, sept athlètes bretons sont déjà sûrs d'y participer. D’autres espèrent encore se qualifier et écrire à leur tour une page de l'histoire sportive, lors de cette XXXIIIᵉ olympiade. Au fil des éditions, les Bretons ont décroché 104 médailles pour la France. C'est avec sa passion de journaliste sportif, que le brestois Georges Cadiou a retracé ces victoires dans son livre "Les Bretons aux jeux olympiques."
Nés en Bretagne ou liés à la Région, figures incontournables ou Bretons dans l'âme : c'est leur attachement à notre territoire et pas seulement leurs racines que Georges Cadiou a pris en compte pour recenser ces noms illustres dans son ouvrage.
Honneur d'abord à Eugène-Henri Gravelotte, originaire de Paris, mais avec des racines quimpéroises (il sera inhumé à Bénodet). Soyons chauvins, on peut le considérer comme Breton ! En 1896, ce jeune étudiant en médecine sera vainqueur dans sa catégorie en escrime, à l'âge de 20 ans. Il offrira à la France la toute première médaille d'or olympique à Athènes. Seulement 241 sportifs et neufs sports différents participeront aux épreuves.
Une parenthèse fraternelle en marge des troubles de l'Histoire
L'auteur déroule les années, les anecdotes et les portraits, tout au long d'un travail documenté et illustré. De la Rennaissance des jeux à Athènes, à ceux d'Anvers en 1920, pour oublier la guerre de 14/18. De Berlin en 1936, sur fond de propagande nazie, à l'édition de 1952 à Helsinski en pleine guerre froide avec la première participation de L'URSS.
De l'événement des jeux de Tokyo en 1964, retransmis en mondiovision pour 600 millions de téléspectateurs, aux jeux de Mexico en 1968, première ville hôte dans un pays en voie de développement, jusqu'au rendez-vous de Tokyo en 2021, sans spectateurs étrangers à cause de la pandémie du Covid, c'est dans la Grande Histoire que s'inscrit ce rendez-vous, fidèle à l'esprit de fraternisation de son créateur Pierre de Coubertin.
Les femmes en compétition
Aux Jeux de Paris en 1920, la dinardaise Yvonne Prévost, championne de France de tennis, décroche deux médailles d'argent au tennis, en simple et en double mixte. Ce sera la première médaille féminine française de l'histoire des Olympiades.
Cette année-là, le malouin Philippe Cattiau montera pour la première fois sur le podium pour ses victoires en Fleuret. Il accrochera 7 médailles à son palmarès dans la discipline jusqu’en 1932 ! Étonnant personnage encore que Micheline Ostermeyer, née d'un père alsacien et d'une mère vannetaise. Dans la vie, elle est une illustre pianiste concertiste de renom. Aux JO de Londres, en 1948, elle sera trois fois championne olympique au poids, au disque et en saut en hauteur. Alliance subtile de force et de grâce !
Ces femmes montreront le chemin. Tout est possible pour les Bretonnes. De l'or pour Nathalie Even-Lancien en cyclisme sur piste en 1996.
En 2004, la Brestoise Faustine Merret s'illustre en planche à voile et Emilie Lepennec (originaire du Trégor) en gymnastique, barres asymétriques. Pour elle deux, de l'or ! Nouvelles disciplines olympiques, le BMX et le VTT donneront respectivement de l'argent et de l'or pour Laëtitia Le Corguillé et Julie Bresset en 2012.
À son retour de Londres, la jeune cycliste sera accueillie triomphalement par les habitants de sa commune de Ploeuc-l'Hermitage, dans les Côtes-d'Armor.
Citons encore la licenciée brestoise Camille Lecointre en voile 470, médaillée de bronze en 2016 et en 2020 !
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Gorges Cadiou égrène les titres et les succès tout au long des 172 pages de son livre : Barcelone, en 1992, record pour les sélectionnés bretons. Ils remporteront quatre médailles d'or en voile, planche à voile, escrime, et tir à l'arc. À Londres en 2012, quand Julie Bresset remporte l'or en VTT, Bryan Coquard gagne, lui, une médaille d'argent en cyclisme.
Les Jeux de Rio voient, eux, arriver une forte délégation bretonne. Vingt-trois athlètes ont été sélectionnés en cette année 2016. Jamais le sport breton n'a été autant représenté. À l'arrivée, trois médailles par équipes et le bronze en individuel pour le Briochin Pierre Le Coq en planche à voile.
L'ancien chroniqueur de Radio Bleu Breiz Izel regrette de n'avoir jamais pu "couvrir" les Jeux Olympiques. Mais dans sa carrière, Georges Cadiou a souvent croisé des athlètes médaillés durant des épreuves en terre bretonne.
De Jean Galfione, champion olympique du saut à la perche en 1996 à Atlanta, il se souvient d'un garçon doué : "Il est issu d'une famille de sportifs avec un père escrimeur et une mère basketteuse de haut niveau. Les chiens ne font pas des chats ! Et pour moi, cet athlète est breton quoiqu'on en dise. Sa mère était bretonne et désormais, il vit en pays bigouden !"
Une anecdote aussi sur Gilles Quénéhervé, médaillé de bronze du relais 4X100 m aux Jeux Olympiques de Séoul en 1988. "Il a été sous-préfet de Morlaix. Il avait un caractère de breton bien trempé et sa vocation est arrivée par hasard" raconte le journaliste. "A 18 ans, quand il passe les épreuves de sport au baccalauréat, il court le 100 mètres en 11 secondes. Et il court en tennis, même pas avec des chaussures à crampon ! L'examinateur est bluffé, sa carrière sera amorcée ce jour-là, alors qu'il pratiquait jusqu'alors le cyclisme !" Georges Cadiou épluche depuis plus de vingt ans les archives de la presse sportive. Son livre est celui d'un érudit qui, plus que tout, souhaite partager sa passion.
Une véritable enquête
Le nantais Stéphane Gachet, élu à la Région Pays de la Loire et passionné de sport, a également pris la plume pour un recensement détaillé des médaillés olympiques. Publié aux éditions "Talent Sport", son livre s'intitule : "JO d'été, tous les médaillés français de 1896 à nos jours".
C'est en fin limier que Stéphane Gachet a mené l'enquête pour répertorier tous les médaillés olympiques français durant une vingtaine d'années. La tâche est difficile, la base du comité olympique français et celle du CIO n'ont pas toujours les mêmes données" explique-t-il. "Certains sportifs ont des différences de noms, d'orthographe ou de prénom." Mais au final, il a réussi à identifier 1266 médaillés français. Via les archives de presse, mais aussi celles des clubs, en plongeant dans les registres de l'état civil ou celles des élections ou du recensement, la piste se resserre et Stéphane Gachet est souvent arrivé à ses fins.
C'est un détail qui va donner naissance à ce livre. Stéphane Gachet découvre par hasard, en faisant des recherches sur son patronyme sur internet, un Jean Gachet, médaillé olympique de boxe en 1920. Mais en revanche, aucune trace de lui au Comité National Olympique ni du côté de la Fédération française de boxe. À force de ténacité, le parcours de Jean Gachet sera retrouvé et son exploit sorti de l'oubli, même si au final, aucun lien de parenté ne lie les deux hommes !
Un hommage aux anonymes sortis de l'oubli
La tâche se répète pour d'autres anciens médaillés tombés dans l'oubli. En cause : l'absence d'archives avant la création des fédérations sportives dans les années 20. Difficile aussi pour les Jeux de Paris en 1900 qui se déroulent dans le cadre de l'exposition universelle. "On a même des médaillés olympiques qui n'ont pas su qu'ils avaient gagné cette année-là" explique-t-il.
Parfois, il y a même des surprises au sein des familles, comme pour Jules Dubois, double médaillé olympique en voile en 1900. "Dans les listes officielles, il était juste identifié J. Dubois. Son prénom ne figurait pas. J'ai réussi à retrouver son club, il était membre d'un cercle de voile à Paris. Puis j'ai retrouvé un arbre généalogique où il figurait sur internet. J'ai ainsi retrouvé son petit-fils et c'est moi qui lui ai appris les exploits de son ancêtre, 123 ans plus tard !"
Chez les Bretons, Stéphane Gachet a ainsi inhumé et remis en lumière trois athlètes. Le rennais Jean Bruneval, médaillé en rugby en 1920. Pierre Guyot d'Asnières de Salins, médaillé d'argent en équitation et voltige par équipe, originaire de Saint-Avé (56) et enfin Albert Dubosq, médaillé de bronze en voile en 1900.
En réhabilitant ces atlhètes oubliés, c'est l'occasion pour leur ville de les honorer. Un gymnase ou un équipement peut enfin saluer leurs exploits.
Stéphane GachetAuteur : "JO d'été, tous les médaillés français de 1896 à nos jours"
Une véritable encyclopédie
L'auteur passe en revue plus d'un siècle d'épreuves, des Jeux d'Athènes en 1896 à ceux de Tokyo en 2020, retraçant le parcours d'athlètes de légendes.
Bien sûr, on retrouvera les grandes figures du sport olympique français. De la nageuse Laure Manaudou et son frère Florent, de David Douillet à Teddy Riner en judo, d'Alain Mimoun à Marie-José Perec en athlétisme ou encore Jean-François Lamour en escrime . Évoquons aussi les exploits de Tony Estanguet en canoë slalom et ceux handballeurs Nikola Karabatic, Michael Guigou et Luc Abalo. La liste est longue. Chaque athlète est présenté individuellement avec photo et court historique.
Il s'agit d'un livre collector qui permet de se replonger dans les plus belles pages écrites par les sportifs français dans le livre des Olympiades. Ce travail offre au lecteur une liste de 1266 médaillés qui ont porté haut le drapeau tricolore, au fil de 650 pages. Tous les résultats des compétitions sont aussi indexés au livre.