Après avoir connu des pics à près de 6.000 visiteurs par jour en 2022, l'île de Bréhat devrait limiter leur nombre à 4.700 cet été. Et ailleurs, comment les collectivités gèrent-elles l'afflux des touristes de plus en plus nombreux en Bretagne ?
Au coeur de l'été, il faudra problablement s'y prendre à l'avance pour organiser sa visite sur l'île aux fleurs. Olivier Carré, le maire de Bréhat l'a annoncé ce mardi 30 mai 2023, en conseil municipal : il envisage de prendre un arrêté pour limiter la fréquentation à 4.700 visiteurs sur son île entre le 14 juillet et le 25 août inclus de 8h30 à 14h30. Reste à définir les modalités d'application.
Des pics à 6.000 visiteurs
Il faut dire qu'en 2022, certains jours, sur le "caillou" d'à peine trois kilomètres carrés, plus de 6.000 visiteurs se sont agglutinés sur les plages et les petits chemins de terre. Une promenade forcément moins bucolique et qui n'est pas sans conséquence sur l'environnement de l'île.
Le maire s'appuie sur l'article l. 360-1 du code de l’environnement modifié en février dernier par la loi Climat et Résilience permettant de réglementer "l'accès et la circulation des personnes aux espaces protégés [...] dès lors que cet accès est de nature à compromettre leur protection."
Une première en France qui pourrait aussi inspirer l'Île-aux-Moines dans le Morbihan.
Même superficie, mais située côté sud du Morbihan, l'Île-aux-Moines est accessible en à peine 5 min de bateau. Elle abrite 630 habitants mais voit elle aussi affluer jusqu'à 6.000 touristes par jour au plus fort de l'été.
LIRE : La question pas si bête. Faut-il limiter la fréquentation du golfe du Morbihan en haute saison ?
Le problème est le même sur de nombreuses îles bretonnes qui, au-delà de la préservation de leur environnement, peinent à assurer le traitement des déchets en haute saison et même parfois l'approvisionnement en eau comme à Groix lors de la sécheresse de 2022.
La plage de l'île Vierge à Crozon interdite d'accès
Dans le Finistère cette fois, la mairie de Crozon a pris une décision encore plus radicale : depuis l'été 2020, l'accès à la plage de l'île Vierge est interdit par arrêté préfectoral.
Après son classement parmi les plus belles plages d'Europe en 2016 par le journal britannique The Guardian, la petite crique de l'île Vierge à Crozon avait vu sa fréquentation tripler en quelques années.
Un compteur installé sur le GR 34 qui surplombe la plage ne dénombrait que 20.000 passages par an avant 2014, contre 60.000 six ans plus tard. Le sol fragilisé risque désormais de s’effondrer, engendrant des chutes de pierre sur la plage.
L'accès à la grève est donc interdit y compris par la mer. En revanche, il est toujours possible de venir profiter des eaux turquoise en kayak, en paddle, en bateau, et même de se baigner, à condition de ne pas accoster.
Une quarantaine de contrevenants ont été verbalisés l'an dernier avec à la clef 135 € d'amende.
Pas de bâtons à pointe sur les chemins de Belle-Île
Même problème à Belle-Île où le GR340, qui fait le tour de l'île, a été élu GR préféré des Français l'année dernière.
L'Île a d'abord décidé de bouder la remise de prix pour éviter de faire encore plus de publicité et attirer encore plus de touristes... Face à l'afflux de visiteurs, ce sont les bâtons de marche à pointe des promeneurs qui ont ensuite été interdits, accusés de détériorer les 83 km du chemin de randonnée.
LIRE : RANDONNEE. Faut-il interdire les bâtons de marche à pointes sur le sentier du littoral ?
Une mesure envisagée sur les sites du Cap-Fréhel et de la Pointe-du-Raz qui accueillent respectivement un million et 800 000 visiteurs par an.
Des parkings et des navettes en périphérie des sites
Sur la Côte de granit rose, 85% des visiteurs arrivent en voiture. À Ploumanac’h, des parkings déportés payants ont été créés pour désengorger la zone. Ils permettent de financer l’entretien et la préservation des espaces naturels.
Une solution envisagée à Arzon dans le Golfe du Morbihan. Le maire souhaite créer 5.000 places de parking à l'entrée de la Presqu'Île de Rhuys et un système de navettes électriques pour transporter le public aux différents points des communes engorgées.
Au Mont-Saint-Michel, depuis 2012, les parkings périphériques permettent d'éloigner les voitures, mais pas toujours de fluidifier la visite dans les étroites ruelles.
Le week-end de l'Ascension, les milliers de visiteurs ont dû patienter des heures pour accéder au site totalement saturé.
Sortir les visiteurs des sentiers battus
Pour désengorger Carnac, Brocéliande, les remparts de Saint-Malo ou la Côte de granit rose, les offices du tourisme bretons tentent désormais d'attirer les touristes loin des sentiers battus.
Aucune promotion des îles n'est faite pendant la saison estivale. L'accent est mis sur la forêt de Huelgoat dans le Finistère ou encore les marais de Bain-sur-Ouest et les mégalithes de Saint-Just en Ille-et-Vilaine.
De quoi préserver un pôle économique non négligeable en Bretagne : le tourisme représente 8 % du produit intérieur brut et 80.000 emplois dans la région