Onze morts dans un incendie à Wintzenheim : un an après, l'organisation de vacances pour personnes handicapées a-t-elle vraiment évolué ?

Le 9 août 2023, onze personnes, dont dix en situation de handicap mental, périssaient dans l'incendie d'un gîte à Wintzenheim (Haut-Rhin). Un drame qui a mis en exergue les failles d’organisation et de contrôle des vacances adaptées organisées. Les VAO, dont la sécurité semble avoir été améliorée.

Les images du bâtiment détruit par les flammes sont encore dans toutes les têtes.  Il y a un an, le 9 août 2023, un violent incendie ravageait un gîte de Wintzenheim, dans le Haut-Rhin, où était organisé un séjour pour adultes handicapés. 11 personnes y trouvèrent la mort, dont un accompagnateur. 

Un drame qui a conduit deux mois plus tard à la mise en examen de la gérante des lieux pour "homicide involontaire par violation manifestement délibérée d’une obligation de sécurité ou de prudence". Les juges d’instruction du pôle des accidents collectifs de Paris lui reprochent de ne pas avoir respecté les normes en matière de sécurité incendie mais surtout d’avoir accueilli du public sans autorisation spécifique et sans avoir déclaré "la destination du bâtiment ni la capacité d'accueil du public lors du dépôt des permis de construire ou déclarations de travaux auprès de la mairie".

Sollicité par l'AFP, le parquet a indiqué que l'information judiciaire était toujours en cours et qu'il n'y a pas de nouvelle mise en examen.

"L'enquête suit son cours, explique Denis Renaud, président de l'AEIM 54, une association qui a perdu quatre de ses membres dans l’incendie et s'est constituée partie civile. Un certain nombre de rapports ont été rendus par les experts. Il y a un bon mouvement, quelque chose de positif qui se passe. C'est long mais on a bon espoir d'avoir un procès, peut-être en 2025."

Tirer les leçons du drame

Dans l’attente d’une avancée judiciaire, son association comme d’autres, espèrent aussi le renfort de mesures administratives pour empêcher d’autres accidents.

"Nous, 365 jours par an, dans nos établissements, on a des notions de sécurité qui vont largement au-delà de celles qui sont proposées" en vacances adaptées, constate Denis Renaud. "Quand on les envoie en vacances, on baisse la garde pendant 15 jours avec des personnes qui ne sont pas formées, qui ne sont pas encadrées, dans des lieux qui ne sont pas contrôlés ?" s'étonne-t-il.

Lui, comme d’autres, partage le sentiment que toutes les leçons n'ont pas encore été tirées. Et ce, malgré plusieurs annonces de la ministre des Solidarités Aurore Bergé en septembre dernier. "Des actions immédiates s’imposent", avait lancé cette dernière alors que le rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) pointait un dysfonctionnement général ayant conduit au drame.

"Il n'y a pas eu d'avancée notable", estime Denis Renaud, pointant l'engagement du gouvernement de communiquer une "liste des organismes de séjours adaptés qui auraient été revérifiés et contrôlés". "On n'a rien eu", soupire-t-il.

Des contrôles renforcés mis en place

Pourtant, du côté des organisateurs de vacances adaptées organisées ou VAO, on l’assure, les choses évoluent tant au niveau des recrutements que des contrôles administratifs et sécuritaires. "Ça s’est durci", confirme l’employée d’une structure d’accueil vosgienne.

Pour le responsable de Supernova, société basée dans la Loire, proposant 50 destinations, 90 séjours par an, il y a bien eu un avant et un après "Wintzenheim".

"Il y a plus de contrôle, plus de paperasse. Mais c’est normal. Cette année, ça nous a permis de nous rendre compte qu’on avait un ou deux hébergements limites. Avec des papiers vérifiés pas forcément bien datés. Des lieux où on ne va plus", confie son directeur Julien Carret.

"Ce qui a changé principalement, ce sont les normes administratives pour la déclaration d’un séjour. Avant, c’était à l’organisateur de s’assurer que la sécurité était respectée. Maintenant, l’administration de tutelle demande à ce qu’on lui fournisse deux documents. Il faut qu’on s’assure que l’hébergement a bien été déclaré à la mairie et qu’il y a bien eu un contrôle de la commission sécurité. Auparavant, on n’était pas obligé de fournir ces documents. Certains organisateurs, comme nous, vérifiaient, d’autres pas", détaille encore le professionnel.

342 contrôles réalisés en 2023

Une avancée significative, si ce n’est que pour lui, il faudrait aller encore plus loin évoquant le manque de structuration du secteur des vacances adaptées. "Un métier qui fait un peu peur, qui est assez nouveau. Chaque organisateur a dû construire une méthode, une façon de faire, sans habitudes professionnelles et sans forcément beaucoup de réglementations".

De son côté, le ministère des Solidarités rappelle que 342 contrôles ont été réalisés en 2023 auprès de ces organismes, qui ont organisé plus de 5 000 séjours.

L'agrément d'Oxygène, la société de Nancy qui avait organisé le séjour à Wintzenheim, n'a pas été renouvelé. Il était provisoire au moment du séjour, ce que ne comprend pas Jean-Claude Jacoby, président de l'APEI Vallée de l'Orne, qui a perdu quatre résidents: "Normalement, on a un agrément ou on ne l'a pas." L'agence a fermé ses portes.

Le groupement Vadev, dont faisait partie Oxygène, possède plusieurs autres entreprises à Lille ou à Lyon. Fin Juillet 2024, un séjour porposé par l'une de ses sociétés, Escapades adaptées, basée dans le Jura, a été interrompu par les services de l'Etat, sur décision administrative.

Ce vendredi 9 août, une stèle en hommage aux onze victimes sera dévoilée à Wintzenheim, à partir de 11h. 

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