Législatives 2022 : les Hauts-de-France envoient 20 députés du Rassemblement National à l’Assemblée

Marine Le Pen réélue à Hénin-Beaumont, Caroline Parmentier à Béthune, Thibaut François à Douai, Philippe Ballard à Beauvais… 20 candidats du parti d’extrême-droite ont été élus députés dans notre région.

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C’est un record depuis l’instauration de la Vème République. À l’issue du second tour des élections législatives, 89 députés du Rassemblement national ont été élus. Pour rappel, ils n’étaient que 8 lors de la précédente mandature.

Présente à Hénin-Beaumont où elle a été facilement réélue avec plus de 61% des voix, Marine Le Pen n’a pas caché sa joie à l’annonce des résultats. "Nous allons envoyer un puissant groupe parlementaire de députés RN à l’Assemblée. Ce groupe sera de très loin le plus nombreux de l’histoire de notre famille politique". Elle s’est félicitée d’avoir atteint ses "3 objectifs", à savoir : "faire d’Emmanuel Macron un président minoritaire (…), poursuivre la recomposition politique indispensable et constituer un groupe d’opposition déterminant face aux déconstructeurs, les macronistes, et aux déconstructeurs d’en bas, cette extrême gauche antirépublicaine".

Dans notre région, 20 députés RN ont été élus : 12 dans le Nord Pas-de-Calais et 8 en Picardie. En 2017, 5 députés RN étaient issus de notre région.

Marine Le Pen et Sébastien Chenu réélus

Lorsqu’on s’attarde sur les circonscriptions remportées par le parti d’extrême-droite dans les Hauts-de-France, on s’aperçoit d’abord que les circonscriptions gagnées par le RN en 2017 sont toutes restées dans l’escarcelle du parti, à l’exception de la 3ème circonscription du Pas-de-Calais (Lens). Battu d’à peine 71 voix par le candidat de la NUPES Jean Marc Tellier, Bruno Clavet a annoncé qu’il allait déposer un recours pour contester l’élection du maire communiste d’Avion.

À Hénin-Beaumont, la cheffe de file du RN pulvérise ses scores : avec 61.03 % des suffrages exprimés, elle va retrouver son siège à l’Assemblée et devrait, pour la première fois de sa carrière politique, prendre la tête du groupe parlementaire.

Extrait du discours de Marine Le Pen à Hénin-Beaumont, dimanche 19 juin 2022 ©FTV

Une réélection qui n’a rien d’une surprise, car Marine Le Pen avait même frôlé la qualification dès le premier tour. Avec 54% des suffrages exprimés, elle avait toutefois dû passer par le second tour car son score ne représentait pas un nombre de voix égal au quart des électeurs inscrits sur les listes dans la 11ème circonscription.

Dans le Pas-de-Calais, les circonscriptions de Bruay-la-Buissière et de Liévin conservent leur couleur bleu marine :

  • Dans la 10ème circonscription, Thierry Frappé, premier adjoint au maire de Bruay-la-Buissière totalise 65.4% des voix face à Michel Dagbert, candidat de la majorité présidentielle
  • Dans la 12ème circonscription, Bruno Bilde l’emporte face au candidat de la NUPES Jérôme Darras avec 56,21% des voix

Dans le département voisin, Sébastien Chenu conserve son siège de député du Denaisis dans la 19ème circonscription du Nord. Avec 57.15% des voix, le porte-parole du parti et conseiller régional d’opposition a platement battu Patrick Soloch, candidat de la NUPES. Il était le seul député du RN pendant la précédente mandature dans le département.

Les circonscriptions des Hauts-de-France qui basculent

Mais au soir du second tour des élections législatives de 2022, la donne a changé.

> Dans le Nord

Cinq circonscriptions ont basculé dans le Nord :  

  • À Haubourdin (5ème circonscription), Victor Catteau l’a emporté avec 51,14% des voix face à la candidate de la NUPES. Le député sortant Sébastien Huyghe, patron de la fédération LR dans le département, avait été éliminé dès le premier tour.
  • Au Quesnoy (12ème circonscription), Michaël Taverne l’a emporté face à la députée sortante. Anne-Laure Cattelot, candidate de la majorité, n’a récolté que 47,18% des voix.
  • À Hazebrouck (15ème circonscription), le candidat RN Pierrick Berteloot l’a emporté face à Emilie Ducourant, candidate de la NUPES, avec 54,09% des suffrages exprimés. La députée sortante, Jennifer De Temmerman, avait été élue en 2017 avec l’étiquette En Marche avant de quitter le parti. Elle ne s’est pas représentée.
  • À Aniche (16ème circonscription), le député communiste sortant a été battu par Matthieu Marchio. Le candidat du RN a récolté 50.33% des suffrages et devance Alain Bruneel d’un peu plus de 200 voix.
  • À Douai (17ème circonscription), Thibaut François s’impose face au député sortant. Dimitri Houbron, candidat de la majorité présidentielle, n’a réussi à recueillir que 46,43% des voix.

> Dans le Pas-de-Calais

Dans le département voisin du Pas-de-Calais, le RN fait basculer dans son escarcelle trois circonscriptions.

  • À Saint-Pol-sur-Ternoise (1ère circonscription), le député sortant membre de la majorité est platement battu. Bruno Duvergé n’a recueilli que 44,23% des voix. Emmanuel Blairy, député de la 3ème circonscription durant la dernière mandature, avait été investi par le RN dans cette circonscription et en devient le député.
  • À Desvres (6ème circonscription), le RN remporte la bataille face à l’actuelle ministre de la Santé Brigitte Bourguignon avec 56 voix d’avance. Christine Engrand, la discrète candidate du RN, a été élue avec 50,06% des suffrages exprimés. Avec cette victoire, elle va rentrer dans l’histoire comme celle qui a fait démissionner la ministre de la Santé du gouvernement d’Emmanuel Macron.
  • À Béthune (9ème circonscription), Caroline Parmentier s’impose face à la députée sortante avec 53,31% des suffrages exprimés. Marguerite Deprez-Audebert, candidate de la majorité, n’a pas réussi à s’imposer. La nouvelle députée RN du territoire du béthunois est également élue au conseil régional d’Île-de-France.

En Picardie, les trois départements vont envoyer des députés RN à l’Assemblée.

> Dans l'Aisne

Dans l’Aisne d’abord, où Marine Le Pen avait explosé ses scores au second tour de la présidentielle en atteignant près de 60% des voix, 3 députés RN ont été élus.

  • Dans la 1ère circonscription, le candidat du Rassemblement national Nicolas Dragon l'emporte avec 54,56% des voix contre 45,44% pour la députée sortante et candidate de la majorité présidentielle Aude Bono-Vandorme.
  • La 4ème circonscription, bastion historique de la gauche acquis par LREM en 2017, bascule désormais à l’extrême-droite. Le candidat du RN José Beaurain, qui avait déjà beaucoup d'avance au premier tour, obtient un score de 57,15 % et l’emporte ainsi sur le sortant Marc Delatte (42,85%).
  • La 5ème circonscription était le théâtre du seul duel entre le Rassemblement national entre Nupes du département, engendré par la division du camp présidentiel, dont deux candidats se réclamaient au premier tour. Arrivé en tête avec une large avance (35,22%) au premier tour face à l'insoumis Stéphane Frère (18,9%), le candidat d'extrême droite Jocelyn Dessigny conquiert la 5e circonscription de l'Aisne, soit celle du sud du département incluant Château-Thierry et Villers-Cotterêts. Jocelyn Dessigny est d'ailleurs le premier adjoint au maire RN Frank Briffaut de cette dernier commune. "Le plafond de verre est enfin brisé, se félicite le maire de la cité d'Alexandre Dumas, qui a préféré conserver sa mairie et laisser son adjoint concourir à la députation. Nous concrétisons un travail local dans le milieu rural, nous ne subissons plus d'ostracisme, le vote utile ne joue plus en notre défaveur. Notre positionnement était clair, face à des adversaires qui disaient tout et n'importe quoi."

> Dans la Somme

Dans le département de la Somme, deux circonscriptions ont basculé dans l’escarcelle du RN.

  • Dans la 4e circonscription, le député sortant Jean-Claude Leclabart (LREM) a été battu par Jean-Philippe Tanguy (RN) élu avec 54,59% des voix contre 45,41%. Comme en 2017, Jean-Claude Leclabart se retrouvait face à un candidat RN au 2nd tour, mais cette année il était largement devancé par Jean-Philippe Tanguy. Malgré son appel aux "démocrates, républicains et humanistes à se rassembler derrière lui", cela n'a pas suffi pour élire le député sortant. Sur notre plateau, Jean-Philippe Tanguy s'est réjoui de cette victoire : "sur le terrain, on a fait que du porte à porte depuis le premier jour, je pense que c'est la politique aujourd'hui, on doit aller vers les gens, au-delà des convictions, il faut être au service de la population (...). C'est évidemment une vague mariniste qui s'impose, ce sont les scores de la présidentielle, nous sommes un vote d'adhésion."
  • Dans la 5ème  circonscription, Yaël Menache a visiblement réussi à convaincre les électeurs déçus du premier tour et l’emporte largement avec 60,79 % des suffrages, devant le candidat de la Nupes Guillaume Ancelet, qui a obtenu 39,21% des suffrages. Le barrage républicain auquel la candidate du camp présidentiel Virginie Caron-Decroix avait appelé n'a donc pas fonctionné. À noter tout de même un nombre important de votes blancs : 3868, contre seulement 670 au premier tour. Beaucoup d'électeurs déçus du premier tour n'ont visiblement pas voulu choisir dans ce duel Nupes / Rassemblement national.

> Dans l'Oise

Dans l’Oise, trois députés RN ont été élus.

  • Dans la 2ème circonscription, l’appel au barrage républicain fait par la candidates Nupes, éliminée au premier tour, n’a pas fonctionné. L’ancien journaliste, et conseiller régional d’Île-de-France Philippe Ballard (RN) l’emporte avec 55,83% des voix contre 44,17% pour la candidate du camp présidentiel Chanez Herbanne. Un résultat qui s’inscrit dans la logique de ceux de l’élection présidentielle : Emmanuel Macron était arrivé derrière Marine Le Pen lors des deux tours dans cette circonscription. Sur France Inter, Philippe Ballard a réagi à la percée du Rassemblement national en parlant de "tsunami politique".
  • Dans la 3ème circonscription, Michel Guiniot l'emporte d'une courte tête sur la députée sortante LREM Carole Bureau-Bonnard, avec un score de 52,57% contre 47,43%. En 2017, c'était la même affiche au second tour, mais la candidate marcheuse l'avait largement emporté, avec 58%. Ce résultat sonne donc comme une punition pour le parti présidentiel, tout comme lors de l'élection présidentielle, puisque Marine Le Pen l'avait emporté au deuxième tour dans cette circonscription.
  • Dans la 6ème circonscription, historiquement à gauche jusqu’à son acquisition en 2017 par La République en Marche, l’extrême-droite l'emporte. Alexandre Sabatou l’emporte de justesse, avec 52,42 % des suffrages, face à la candidate Nupes Valérie Labatut qui obtient 47,58% des suffrages. 

Le "grand chelem" du RN annoncé dans la région s’est réalisé

 Au soir du premier tour des élections législatives dimanche dernier, 39 candidats RN sur 50 s’étaient qualifiés dans les cinq départements des Hauts-de-France : 24 dans le Nord Pas-de-Calais sur les 33 circonscriptions et 15 en Picardie sur les 17 circonscriptions. Plus de la moitié d’entre eux ont donc été élus.

Lors de son passage dans la région pendant l’entre-deux-tours, le président du RN avait débuté son pèlerinage dans le Pas-de-Calais. Face aux journalistes, Jordan Bardella affichait alors ses ambitions. "Nous nourrissons des espoirs d’envoyer un maximum d’avocats du peuple à l’Assemblée nationale en provenance de ce département du Pas-de-Calais", et des Hauts-de-France tout entier.

Une déclaration avant de débuter un road-trip des circonscriptions jugées gagnables. Le départ a été donné depuis Béthune pour soutenir Caroline Parmentier. Jordan Bardella s’est ensuite affiché à Bapaume avec Emmanuel Blairy, avant d’aller supporter Mathieu Marchio et Thibault François à Douai, respectivement candidats dans les 16ème et 17ème circonscriptions du Nord. Un dernier arrêt a été effectué dans la 2ème circonscription de l’Oise pour s’afficher aux côtés de Philippe Ballard.

Un voyage semble-t-il prémonitoire puisque les cinq députés qu’il est allé soutenir dans ces circonscriptions jugées gagnables par le parti ont tous été élus.

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