Un tiers des collèges de Dordogne est labellisé bio. D'ici à 2028, tous le seront. Un pari précurseur sur le 100 % bio, au maximum local et fait maison dans les cantines, initié depuis plusieurs années qui fait désormais référence en France, en Europe et même jusqu'au Japon.
Il a fallu bien des convictions et des efforts à quelques précurseurs pour que l'idée du bio, au maximum local et fait maison fasse son chemin dans la restauration collective. En octobre 2018, la loi EGalim visait les 20 % de bio et 50 % de produits durables pour 2022 dans les 3,7 milliards de repas servis dans les collectivités chaque année.
Ambition qui pouvait sembler insuffisante, mais il faut rappeler qu'en 2019, on ne servait encore que 3,2 % de bio dans les cantines. Faute de contrôle officiel, il est difficile de dire si cet objectif est respecté aujourd'hui et quelle partie des repas servis est réellement bio, mais l'idée n'est plus une pure utopie.
Précurseurs du bon goût
Parmi les défricheurs qui ont compris plus tôt que les autres l'intérêt à manger bio, au maximum fait maison et produit localement, le Conseil Départemental de la Dordogne. Dans ce département, dont la gastronomie est l'un des atouts majeurs, la lutte a débuté il y a plusieurs années.
- En 2018, la cantine de la commune de Villars recevait un label bio Ecocert assurant 50 % d'aliments bio
- En 2019, le collège Pierre Fanlac de Belvès proposait une alimentation 100 % bio.
- En 2021, la cité scolaire de Nontron devenait la première de France à servir du 100 % bio, au maximum local et fait maison à ses 570 élèves. Un label à nouveau certifié par Ecocert.
"Nous avons 12 collèges qui sont labellisés déjà, et tous les collèges de Dordogne sont engagés dans la démarche bio et au maximum locale,"se réjouissait à l'époque Germinal Peiro, président du Conseil Départemental. "On est les premiers de France. On a eu le premier collège de France, on a eu le deuxième collège de France, et aujourd'hui, on a la première cité scolaire de France qui est 100 % bio !
On est les premiers, mais j'espère bien qu'on va faire des émules !
Germinal Peiro,président du Département de la Dordogne
VIDÉO ►► Le reportage de France 3 Périgords - Florian Rouliès & Delphine Roussel-Sax
La boucle vertueuse du Bio
La victoire du Département, c'est d'avoir prouvé que l'on pouvait servir de la qualité sans faire exploser le budget alimentation scolaire. Mieux, cette somme sert à dynamiser l'activité locale. "Le budget de l'alimentation sur nos établissements scolaires, collèges, flirte déjà autour des quatre millions d'euros. Donc une fois qu'ils seront tous en 100 % bio local, on sera sur quatre millions d'euros d'injectés sur le territoire !" se félicite Johan Sees, chef de service Agriculture et Agroalimentaire du Conseil Départemental de la Dordogne.
Raisonnable et gratifiant
Le tout, avec des tarifs maîtrisés pour les bénéficiaires. L'augmentation n'a été que d'une dizaine de centimes par repas, soit une quinzaine d'euros de plus par élève et par an. Bien sûr, le Département a aussi investi dans des appareils de transformation pour les aliments de base, et le personnel a dû se former. Mais le travail en est devenu d'autant plus gratifiant par rapport à un simple rôle de "passe-plat industriel". "J'ai travaillé dans des étoilés, j'ai travaillé dans des grosses boutiques, et c'est la plus grande satisfaction personnelle que j'ai pu avoir : mettre tous ces plats aussi sains et d'aussi bonne qualité avec des produits aussi frais et de saison, ça a redonné vraiment du sens à notre métier !" se réjouit Jérôme Rouzade, chef au collège Jean Ladignac de Saint-Cyprien.
Brochettes bulgares et légumes slovaques
"J'ai des sociétés qui proposent aux collèges de Dordogne des brochettes de poulets qui arrivent de Bulgarie, des frites qui arrivent du Maroc en étant passées par la Belgique, de la julienne de légumes qui arrive de Slovaquie : voilà ce qui est proposé dans la restauration scolaire aujourd'hui !" s'indigne Germinal Peiro. "Eh bien moi, je veux lutter contre, je veux soutenir l'économie locale et je veux préserver la santé et l'environnement". Frappé au coin du bon sens. Surtout dans un département dans lequel 20 % du territoire et 1 500 producteurs sont passés au bio (contre une cinquantaine en 1990) et où les conversions s'accélèrent chaque année.
Quand la Dordogne fait rêver les Japonais
Exemplaire jusqu'au-delà de l'hexagone, cette conquête bio de la Dordogne a fait rêver une délégation d'une quinzaine de professionnels japonais venus découvrir la "méthode périgourdine". Un grand écart culturel pour ce pays où le bio, à son grand désespoir, ne représente que 0,2 % des surfaces agricoles.
VIDÉO ►► Le reportage de France 3 Périgords - Anne-Laure Meyrignac & Delphine Roussel-Sax
100 % bio dans 100 % des collèges
La conversion des collèges du département offrira de beaux débouchés à tous ses producteurs bio puisque le Département continue sur sa lancée vertueuse. Si aujourd'hui un tiers des collèges est labellisé bio, la totalité d'entre eux devrait l'être d'ici à cinq ans, en 2028.