Depuis plusieurs années les ostréicultures françaises et mondiales connaissent une chute de leur production en raison d'une surmortalité des huîtres. Une étude publiée ce mardi 17 octobre 2023 démontre que le virus et les bactéries pathogènes responsables de ces pertes travaillent en coopération pour se répandre dans les huîtres infectées.
Depuis 2008, la filière ostréicole mondiale enregistre des pertes conséquentes dans ses naissains et ses cultures d'huîtres juvéniles. En France, la filière a perdu près de 75 % de ses jeunes huîtres entre 2008 et 2018. Près de Montpellier, l'étang de Thau qui représente 10 % de la production nationale chaque année, est particulièrement touché par ce phénomène.
Une première explication
Cette surmortalité a en partie été expliquée par une étude de l'IFREMER, du CNRS et de l'Université de Montpellier publiée en octobre 2018. Les chercheurs avaient alors découvert que les jeunes huîtres étaient attaquées par un virus qui affaiblissait leurs défenses, permettant la prolifération de bactéries pathogènes dans le mollusque. Cette combinaison d'attaques virales et bactériennes entraînait finalement la mort de l'huître dans les 68 heures.
L'étude se précise
Depuis, le CNRS s'est penché plus attentivement sur la surmortalité des jeunes huîtres. En collaboration avec les laboratoires de Montpellier et de Perpignan notamment, le centre de recherche a publié une nouvelle étude ce mardi 17 octobre 2023 intitulée Quand les bactéries coopèrent avec un virus pour tuer les huîtres.
"Au sein de ces consortiums microbiens, les microbes interagissent et accélèrent la progression de la maladie."
Ces recherches ont permis de découvrir une réelle coopération entre virus et bactérie au sein même de l'animal, permettant aux deux maladies de se répandre plus rapidement... Et même méthodiquement : "Au sein de ces consortiums microbiens, les microbes interagissent et accélèrent la progression de la maladie."
Un microsystème viral et bactérien
Le virus et les bactéries pathogènes qui sévissent dans les ostréicultures provoquent ce que les chercheurs appellent le syndrome de mortalité des huîtres du Pacifique (POMS). Ce syndrome mène à la création d'une très rare coopération entre les cellules "qui incluent la production de biens communs (par exemple, des métabolites partagés), la division du travail, le transport des ressources, ainsi que la création et la maintenance de l'environnement extracellulaire."
La découverte de cette coopération entre virus et bactéries constitue donc une piste de recherche qui pourrait permettre de prévenir la mort prématurée des huîtres dans les cultures mondiales.
La malaïgue : autre fléau
Qui plus est, la lagune de Thau est également en proie depuis 2018 au phénomène de la "malaïgue", qui explique aussi les pertes importantes enregistrées ces dernières années. Ce terme signifie littéralement "mauvaise eau" en occitan : la malaïgue est caractérisée par le blanchiment de l'eau, lié à la prolifération d'une algue, elle-même favorisée par le réchauffement climatique. Cette algue fait chuter le taux d'oxygène présent dans l'eau, et provoque des pertes colossales dans les ostréicultures.
Dans le bassin de Thau, la malaïgue n'avait pas sévi depuis 2006. Sa soudaine réapparition en 2018 avait causé la disparition d'un tiers des huîtres de la zone.