Quatre policiers de la BAC de Marseille sont poursuivis pour des violences sur un jeune homme de 21 ans, en marge des émeutes, début du mois de juillet.
Le patron de la police Frédéric Veaux a fait le déplacement à Marseille ce samedi 22 juillet pour calmer la colère qui gronde dans les rangs des agents des BAC de la ville depuis la mise en examen de quatre fonctionnaires jeudi dernier pour violences policières. France 3 Provence-Alpes vous résume en 6 actes cette affaire qui a démarré avec la mort de Nahel à Nanterre.
Acte 1 : Un adolescent est tué à Nanterre
Vers 8 heures du matin le 27 juin, deux brigadiers de Nanterre (Hauts-de-Seine) repèrent une Mercedes immatriculée en Pologne, "roulant à vive allure" selon le parquet de Nanterre. La voiture emprunte un couloir de bus quand elle est prise en chasse par des policers à moto.
Après avoir grillé plusieurs feux rouges, la voiture est immobilisée dans les bouchons, sur la place Nelson-Mandela. Les agents mettent pied à terre. Nahel 17 ans est au volant, deux passagers de 17 et 14 ans sont à bord avec lui. Un des policiers tire sur le conducteur qui selon lui refuse d'obtempérer. L'adolescent est mortellement blessé.
Le parquet de Nanterre ouvre une enquête pour homicide volontaire. Le procureur de Nanterre considère que "les conditions légales d'usage de l'arme (par le policier) ne sont pas réunies". Le motard de la police de 38 ans est mis en examen et placé en détention provisoire. Les policiers et les passagers entendus par l'IGPN ont des versions contradictoires du drame, dont les circonstances exactes ne sont toujours pas éclaircies.
Connu pour "détention et usage de stupéfiants, provocation à la rébellion, remise d'objet à détenu", Nahel n'était ce jour-là ni positif à l'alcool, ni aux stupéfiants.
Acte 2 : Des émeutes urbaines éclatent
La mort de Nahel provoque une flambée de violence à travers la France. Dans la nuit du 29 au 30, les premiers échauffourées se produisent entre jeunes et forces de l'ordre. Deux policiers en dehors de leur service sont passés à tabac à Marseille.
Cette nuit-là, 20 policiers sont blessés dans les Bouches-du-Rhône, dont 12 dans la cité phocéenne.
Acte 3 : Hedi, 21 ans, est roué de coups
Dans la nuit du samedi 1er au dimanche 2 juillet, les émeutes continuent à Marseille. Jets de projectiles, poubelles incendiées, tirs de lacrymogènes... et 400 commerces saccagés ou pillés. La Chambre de Commerce et d'Industrie chiffre les indemnisations à quelque 100 millions. Près d'une centaine de personnes sont interpellées dans la cité phocéenne.
Un peu avant 2h du matin, Hedi, 21 ans, employé dans la restauration à Meyrargues retrouve des amis dans le centre-ville de Marseille. Peu après, à proximité du boulevard Baille (5e arrondissement), il est touché par un tir de LBD à la tempe. Il raconte avoir été "roué de coups". Son avocat, Me Jacques Preziosi, précise que son client n'a pas de casier et qu'il a "reçu des coups-de-poing, de pieds, a la mâchoire cassée et l'œil gauche qui ne voit plus". "Ils l'ont laissé sans connaissance par terre". Le jeune homme souffre d'un traumatisme crânien. Il accuse des policiers qu'il dit avoir identifiés par leurs brassards et leurs armes.
Cette même nuit à Marseille, Mohamed Bendriss, 27 ans, marié, père d’un enfant, est mort d'un tir causé par un projectile de "type Flash-Ball".
Acte 4 : L'IGPN est saisie
Le 5 juillet, au la lendemain de l'ouverture d'une enqupete sur la mort de Mohamed Bendriss, le parquet ouvre une deuxième enquête pour “violences en réunion par personne dépositaire de l’autorité publique ayant entrainé une incapacité totale de travail supérieure à huit jours” suite à la plainte de Hedi.
L'IGPN, la police des polices est saisie. Les policiers mis en cause pour l'agression d'Hedi appartiennent à la Brigade Anti-Criminalité.
Acte 5 : Un policier de la BAC est écroué
Le 20 juillet, quatre policiers sont mis en examen à l'issue de 48 heures de garde à vue, indique le parquet de Marseille. Trois d'entre eux sont placés sous contrôle judiciaire et remis en liberté avec interdiction d'exercer, et le quatrième est placé en détention provisoire au centre pénitentiaire d'Aix-Luynes.
A leur sortie, les policiers relâchés sont acceuillis par des applaudissements de leur collègue. Une cagnotte est mise en ligne, elle récolte près de 32 000 euros en deux jours.
Acte 6 : Le patron de la police à Marseille
La colère monte à Marseille. Le 22 juillet, le directeur général de la police nationale Frédéric Veaux fait l'aller-retour express de Paris pour rencontrer les deux syndicats de policiers majoritaires et un collectif d'agents de la BAC après la mise en détention de leur collègue. Deux heures d'écoute "empathique", selon le représentant du syndicat de police SGP FO Eddy Sid, qui ajoute :"la première et l'unique des doléances énoncées, c'est la libération le plus rapidement possible de notre collègue incarcéré".
Signe d'un profond malaise, quelques centaines de policiers se sont mis en arrêt-maladie et les syndicats ont appéle à un service minimum. "Cela reste d'actualité tant qu'il n'y aura pas d'évolution", annonce Eddy Sid. Les urgences et les appels au 17 seront assurés "comme il se doit", souligne le syndicaliste, mais les délais d'attente pour les procédures qui ne sont pas en flagrant délit comme les dépôts de plaintes seront plus longs dans les commissariats.